De culture et de télé
Une primeur : le lancement sur la «Watania» de «La république de la culture», émission de notre collègue universitaire Abdelhalim Messaoudi. L’initiative réjouit. Ne serait-ce que pour la référence. Abdelhalim Messaoudi nous revient, en effet, auréolé de l’expérience de «Maghribouna» sur «Nessma TV». Excellente culturelle, qui aura accueilli le nec plus ultra de l’intelligentsia tunisienne, et eu le mérite de défendre nos traditions des lumières et nos valeurs de modernité à un moment où le pays avait «maille à partir» avec l’islam politique et le fondamentalisme religieux. L’expérience avait bien tenu. Hélas, il y a été mis fin. Subitement, et sans que l’on en eut bien saisi les raisons. Contents, évidemment, d’apprendre qu’elle va se prolonger, et que c’est la «Watania» qui en reprendra le flambeau. Contents, surtout, de pouvoir nous (re)poser la question, la sempiternelle question :un projet culturel s’amorce-t-il enfin à la télévision ? Sous Ben Ali, le rapport de la télévision publique à la culture était de l’ordre du «voeu pieux». Concrètement, nul n’en voyait la nécessité. Le dictateur s’en offusquait. Pour lui (propos authentiques) c’était comme «fournir des armes à la population !?». La Révolution, elle, n’y a rien changé. Voire, les deux chaînes nationales ont allégé davantage leurs contenus. Le libéralisme rampant a déteint sur tout l’audiovisuel. Comble du paradoxe : sur le service public, en premier. Une certaine prise de conscience semble se manifester néanmoins. On parle de «coopération culturetélévision». On réintroduit de la culture à la télé. On réinsère même de grandes culturelles (exemple de l’émission de Halim Messaoudi). A la bonne heure !on l’a dit. Mais pourquoi ? Dans quel «cadre» ? Et à quel dessein ? Le monde a trop «muté», la culture s’est trop mondialisée, trop «marchandisée» ; ne jugeons pas vite de «ces prises de conscience». On ne sait, à vrai dire, si ce ne sont que des «faits» passagers, ou si c’est de toute une politique qu’il s’agit. On extrapolait, peut-être, l’autre jour (Contrepoint du 7 mars) au sujet de la rencontre du ministre des Affaires culturelles et du P-dg de la« Watania». Rien n’indique encore qu’elle aura une suite. Idem pour la culturelle de Halim Messaoudi, il est possible qu’elle ne représente qu’un choix isolé, «un raccommodement de grille» préconisé par la direction. Au surplus, des deux côtés, il semble bien que l’on s’occupe à autre chose. Le ministre est plongé dans sa «culture de proximité». Et à la «Watania» on est plutôt absorbé par les préparatifs du Ramadan. Dans l’attente, dès lors. Encore. Une politique télévisuelle de la culture n’est sans doute pas pour demain. Quant à une politique culturelle de la télévision, un regard suffit : il y faudra beaucoup.
Une grande culturelle sur la «Watania». Contents de l’apprendre… Contents, surtout, de (re)poser la question : un projet culturel s’amorce-t-il, enfin, à la télévision ?…