L’enthousiasme orienté
Les temps ont changé. Fini l’enthousiasme orienté. Il s’agit, désormais, de faire face à ceux qui, depuis des années, se servent du sport tunisien, des équipes nationales et des clubs comme arguments et justifications pour les messages qu’ils veulent pass
Au-delà de tout genre de récupération, le sport porte un message bien particulier : celui des valeurs, celui de la passion. N’en déplaise à ceux qui en font un prétexte, un argument pour se déchaîner et justifier les abus, il est, et il restera un jeu plutôt qu’une question de vie et de mort. Qu’elles gagnent ou qu’elles perdent, les équipes doivent être jugées sur ce qu’elles entreprennent sur le terrain. Tout ce qui s’en dit au-delà, de l’interprétation à la récupération ne mène à rien.
Il faut dire que les exemples de récupération du sport, et tout particulièrement du football, sont nombreux. Dans la forme, on invente chaque fois de nouvelles formules d’exfiltration. Mais dans le fond, les ambitions sont souvent les mêmes. Les raisons de cette récupération ne sont pas difficiles à deviner. Mais elles tournent essentiellement autour de l’impératif de ne pas donner l’impression d’être marginalisé. Les politiciens considèrent d’ailleurs que ne pas s’intéresser au sport peut être envisagé comme un éloignement vis-à-vis du peuple. Se couper du sport est, en effet, jugé comme un ‘’suicide’’ politique.
Dans les temps difficiles, c’est le sport qui rend la joie et le bonheur au peuple. Et quant le peuple est heureux, il est prêt à tout entendre.
La question ne cesse de revenir, à travers les temps et les différentes conjonctures : pourquoi le sport n’a pas gardé une certaine indépendance face au jeu politique? Ou pourquoi la politique a absorbé le sport?
Une précision, d’abord : si le sport peut être récupéré par les politiques, il peut aussi les mettre dans une situation défavorable. On en a vu de ces sifflets dans les grands matches. On en a vu de ces personnalités politiques discréditées par les sportifs eux-mêmes. Reste qu’il y a des événements qui constituent une occasion rêvée et qui font rêver! En sport, il est souvent défendu de penser aux choses basiques. Il faudrait toujours s’y attendre : les grandes victoires, les grandes consécrations provoquent un flot de réactions politiques aussi intenses que prolifiques. Les hommes politiques s’engouffrent dans cette porte d’accès aux coeurs des citoyens. Pleinement dans cette opération séduction.
Les ambitions électorales se mettent de plus en plus du côté du sport. Sa récupération reste un bon moyen pour les politiciens de passer les messages dont ils ont besoin. La preuve est dans toutes ces échéances et ces exploits qui servent de tremplin pour se rapprocher davantage du peuple, pour arracher sa sympathie et véhiculer les valeurs de solidarité, d’union.
S’il est évident que le sport en Tunisie perd de plus en plus l’une de ses caractéristiques principales, celle de rassembler, il continue tout de même à donner une image captivante, exaltante, emballante.
Il est clair qu’à elle seule, la politique ne réunit que très rarement les valeurs. Il n’y a pas mieux comme tribune et vitrine politique qu’un sport fédérant la plus grande partie de la population. La Tunisie, et pas seulement celle du football, a vécu des moments forts, émouvants, inoubliables mais surtout fortement récupérés outre mesure. Ces événements ont bien servi les hommes politiques !...
Les temps ont cependant changé. Fini l’enthousiasme orienté. Il s’agit, désormais, de faire face à ceux qui, depuis des années, se servent du sport tunisien, des équipes nationales, des clubs et des champions comme arguments et justifications pour les messages qu’ils veulent passer.
C’est aujourd’hui un fait : décrypter le sport comme la continuité de la politique par d’autres moyens s’est toujours avéré dénaturé. En dépit des apparences, un match de football par exemple n’a rien de politique. Dans tous les cas, l’amour du jeu est bien de la partie.
Mais pour ce qui est de la portée politique, on s’en passera carrément ! Parce qu’il n’y en a point.