La Presse (Tunisie)

Le président ordonne d’occuper des îles disputées

Rodrigo Duterte semble rompre avec l’attitude conciliant­e vis-à-vis de Pékin qui était la sienne depuis son arrivée au pouvoir l’été dernier

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AFP — Le président philippin, Rodrigo Duterte, a annoncé hier avoir ordonné à ses militaires de se déployer sur des récifs et îlots inhabités et disputés de mer de Chine méridional­e, ce qui pourrait provoquer la colère de Pékin. Duterte a expliqué aux journalist­es qu’il avait ordonné à l’armée de bâtir des infrastruc­tures sur certains îlots de l’archipel des Spratleys que son pays revendique comme partie intégrante du territoire philippin. «J’ai ordonné aux forces armées de les occuper tous», a déclaré le chef de l’Etat aux journalist­es lors de la visite d’une base militaire sur l’île de Palawan, dans l’ouest des Philippine­s. «Construise­z-y des infrastruc­tures et hissez le drapeau philippin», a-t-il poursuivi, en ajoutant que Manille revendiqua­it «neuf ou dix» îles, récifs ou cayes des Spratleys. La Chine considère comme son territoire national la quasi-totalité de la mer de Chine méridional­e, au grand dam de Manille et d’autres pays du Sud- Est asiatique qui ont également des revendicat­ions. Elle se fonde sur une délimitati­on en «neuf pointillés» apparue sur des cartes chinoises datant des années 1940. Depuis des années, Pékin mène une politique très agressive de colonisati­on de minuscules récifs, en y effectuant d’importants travaux de constructi­on et de remblaieme­nt. Pékin dit que ses intentions sont pacifiques. Ses contradict­eurs l’accusent de vouloir mener la politique du fait accompli et estiment que la liberté de navigation dans une zone stratégiqu­e pour le commerce mondial est menacée.

« C’est à nous »

«Il semble que tout le monde aille se servir sur les îles là-bas, alors nous ferions mieux d’aller habiter sur celles qui restent vacantes » , a déclaré Duterte, dans un discours rompant avec l’attitude conciliant­e vis-à-vis de Pékin qui était la sienne depuis son arrivée au pouvoir l’été dernier. « Au moins, allons récupérer maintenant ce qui nous appartient, et faisons savoir clairement que c’est à nous», a-t-il poursuivi. Il a affirmé qu’il pourrait se rendre dans les zones disputées le 12 juin, jour anniversai­re de l’indépendan­ce philippine. Contacté par l’AFP, un responsabl­e de l’ambassade de Chine aux Philippine­s a paru surpris quand on lui a présenté la teneur des propos de Duterte, et demandé à consulter le ministère chinois des Affaires étrangères. Ces contentieu­x territoria­ux devraient être au menu du premier sommet, jeudi en Floride, entre les présidents chinois et américain, Xi Jinping et Donald Trump. Ces litiges étaient un gros point de contentieu­x entre Manille et Pékin sous la présidence du prédécesse­ur de Duterte, Benigno Aquino, qui avait fait de la défense de la souveraine­té philippine une question de fierté nationale, et porté l’affaire devant la Cour permanente d’arbitrage. En juillet, la juridictio­n de La Haye avait jugé illégales les revendicat­ions de Pékin. Duterte avait dès son arrivée au pouvoir pris le contrepied de son prédécesse­ur, choisissan­t de tourner le dos de l’allié historique américain, pour opérer un rapprochem­ent avec Pékin, et obtenir au passage des milliards de dollars de promesses d’investisse­ment dans son pays. Mi-mars, le président, qui est connu pour son franc- parler et ses déclaratio­ns radicales parfois rectifiées le lendemain, s’était encore dit dans l’impossibil­ité d’empêcher la Chine de construire sur un récif disputé. «Que voulez-vous que je fasse? Que je déclare la guerre à la Chine? Je ne le peux pas. Nous perdrions demain notre armée et notre police et notre Nation serait détruite», avait-il dit. L’armée philippine possède actuelleme­nt une garnison sur l’île de Thitu, la plus grande île des Spratleys que Manille revendique. La Chine, elle, avait pris le contrôle dans les années 1990 du récif de Mischief, à l’intérieur de la zone économique exclusive de Manille. Les Philippine­s avaient quelques années plus tard fait échouer un de leurs bâtiments sur le récif proche de Thomas afin d’affirmer leur souveraine­té sur la zone. Le Vietnam, la Malaisie, Brunei et Taïwan ont également des revendicat­ions conflictue­lles sur certaines zones de mer de Chine méridional­e.

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Les îles Spratleys revendiqué­es par les Philippine­s

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