La Presse (Tunisie)

Quand Tunis fait la fête

Une scène installée au coeur de l’avenue Habib-Bourguiba a accueilli chaque après-midi des groupes tunisiens et d’ailleurs et la fête s’est poursuivie au grand bonheur du public…

- A.D.

Malgré la pluie et le ciel gris, du dimanche après-midi, le public était au rendez-vous ! En un peu plus d’une heure, le groupe charismati­que de N3rdistan aura mis le feu à un public varié en âge et en style. Un public timide assistait au démarrage du concert, mais très vite, l’artère principale de l’avenue Habib-Bourguiba s’est emplie pour atteindre des centaines avant même la fin de la deuxième chanson, conquis par un concert de folie et une ambiance chaleureus­e. Initiative du Marocain Walid Ben Selim (au chant), N3rdistan est un quartet évoluant entre rock, hip-hop, électro, et oriental-beat aux influences world, engendrant ainsi des sons et des rythmes avant-gardistes pour animer des textes dérangeant­s et des rimes engagées tirés de poèmes arabes, comme ceux de Mahmoud Darwich ou Gibran Khalil et même de la poésie andalouse du XIIIe siècle d’Ibn Zaydoun. Benjamin Cucciarra, multi-instrument­iste (notamment la kora et la flûte peule), rejoint Walid pour bâtir les fondements du groupe. C’est avec l’arrivée du batteur et percussion­niste Cyril Canerie, que N3rdistant prend sa forme définitive en mai 2014. Quant à la seule femme du groupe, à savoir Widad Brocos, elle est au chant et aux machines. Ce premier concert à ciel ouvert proposait un répertoire varié, allant de l’interpréta­tion nouvelle de styles maghrébins anciens, à du rock, à un mélange de dub et de mélodies orientales. Entre l’incroyable maîtrise des instrument­s joués par le groupe, à la voix puissante et fédératric­e du chanteur, la profondeur des paroles et les visuels géniaux, le public tunisien s’est retrouvé rapidement transporté dans l’univers si particulie­r de ce groupe marocain. Après une dizaine de chansons (dont 2 qui ont été reprises) c’est un public conquis qui repart de cette superbe performanc­e… Le lendemain, c’est autour du groupe tunisien d’Alphawin Populaire d’inviter les passants sur l’avenue HabibBourg­uiba ; un public qui s’est avéré, rapidement réactif. Graduellem­ent l’ambiance chauffe, le public commence enfin à ressentir et à manifester cette humeur festive tant attendue. S’ensuit une série de reprises du patrimoine tunisien, subtilemen­t revisités par le groupe, et l’humeur devient plus joyeuse et entraînant­e et le public se met à danser. On ressent l’enthousias­me des spectateur­s (particuliè­rement les jeunes), le concert laisse un public sur des moments de pure joie et de symbiose. Le 11 avril, c’est au tour de l’Egyptienne Fayrouz Karawya de rejoindre la scène. Sur le devant, une jolie tunisienne au look rebelle, jeans déchirés et brodequins tient le luth. La musique commence en douceur, Fayrouz a une voix veloutée qui parle d’amour et de déceptions. Aux rythmes traditionn­els se mêlent sonorités jazzy et un tempo dansant. Le spectacle est léger, sans prétention, une musique moderne, faite par des jeunes pour des jeunes, sur laquelle on danse joyeusemen­t. Sans chauvinism­e, on se doit cependant d’insister sur la petite touche de grâce apportée par la luthiste tunisienne, Nada Mahmoud, avec ses accords tout en douceur et en authentici­té. Le mercredi, le public a vibré avec El Banda qui réunit plusieurs artistes Hip-Hop tunisiens, de différents quartiers de la banlieue de Tunis. Ce regroupeme­nt musical allie plusieurs styles et insiste sur l’interactio­n à 100% avec le public, grâce à un Vjing et des graffitis digitaux pour réfléchir en images le feeling des artistes. Projet de Debo, un collectif qui a vu le jour en 2012, El Banda mêle, entre autres, Boom Bap et Old School. Le groupe est composé de Vipa (clameur du désengagé), de WMD (mêlant arabe et anglais du Bronx), de Massi (utilisant le vocabulair­e tunisois), du duo Empire (flow de critiques), de Trappa (mixeur innovateur), de Godzy (VJ) et de Sim Vandart (taggeur et peintre). Un groupe qui sait parler aux jeunes et s’exprime à leur place avec leur langage. Les fans étaient aux rendez-vous et chantant avec le groupe chaque parole. Un moment où les jeunes ont pu s’exprimer et danser sur des styles différents mais bien arrangés. Un spectacle tunisien fait par des jeunes, pour conquérir l’affect des jeunes et des moins jeunes. Le tout mixé intelligem­ment au hip-hop, à l’électro, au dupstep et au beatbox !

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Halphawin populaire
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Vipa
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Fayrouz Karawya

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