La Presse (Tunisie)

Ligne rouge

- Par Jawhar CHATTY

On ne peut pas aller à l’encontre des chiffres. A l’instar des faits, ils sont têtus. Face à eux, trois postures sont possibles : 1. faire l’autruche ; 2. se faire passer pour un faiseur de miracles ; 3. tenir un langage de vérité. « Gouverner, c’est choisir », dit-on. Or, les différents gouverneme­nts qui se sont succédé jusque-là semblent avoir souvent fait le choix soit carrément du déni de la réalité, soit de l’usage des promesses comme palliatifs et tranquilli­sants. Le choix, en somme, de la fallacieus­e facilité et du courtermis­me, de la démagogie et du populisme. Face à la grande complexité de la situation dans laquelle le pays se trouve depuis des années, un tel choix est tout simplement synonyme de fuite en avant. Personne n’ignorait bien sûr qu’une telle voie est périlleuse mais l’immaturité de la classe politique, les petits calculs partisans, les querelles de chapelle, les corporatis­mes étroits empêchaien­t beaucoup de monde de voir que, pardelà la survie d’un tel gouverneme­nt ou d’un autre, c’est l’Etat qui pourrait être menacé. Il faudrait à cet égard prendre toute la mesure du propos de Youssef Chahed quand il affirme que « s’opposer au gouverneme­nt ne me dérange pas, s’opposer à l’Etat, c’est grave ». S’opposer au gouverneme­nt, quoi de plus naturel en effet dans une démocratie. Quand elle est une force de propositio­n, l’opposition est une réelle et véritable source de vigueur et de vitalité pour le pays et pour la démocratie. Dans tous les autres cas, elle devient une source d’obstructio­n, d’inertie, d’instabilit­é politique, de régression et d’assèchemen­t de la démocratie. Au risque de choquer, le chef du gouverneme­nt a eu l’audace de dire: « On n’a rien promis, mais on assume notre responsabi­lité » , faisant ainsi le procès des promesses non tenues de ses prédécesse­urs. C’était important de le souligner et plus encore sans doute d’indiquer la ligne rouge à ne pas franchir : mettre en péril l’Etat.

S’opposer au gouverneme­nt, quoi de plus naturel dans une démocratie. Quand elle est une force de propositio­n, l’opposition est une réelle et véritable source de vigueur et de vitalité pour le pays et pour la démocratie. Dans tous les autres cas, elle devient une source d’obstructio­n, d’inertie, d’instabilit­é politique, de régression et d’assèchemen­t de la démocratie.

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