La Presse (Tunisie)

La réforme des entreprise­s publiques en priorité

La mission de revue du Fonds monétaire internatio­nale (FMI) vient de finaliser sa visite en Tunisie. Un bilan positif pour cette mission qui s’est mise d’accord avec les autorités tunisienne­s sur les politiques économique­s nécessaire­s pour achever la prem

- Maha OUELHEZI

Selon Lamia Zeribi, ministre des Finances, le travail de la mission du FMI a porté sur l’évaluation de ce qui a été convenu dans le programme initial des réformes. Ce programme a été finalisé et signé en mai 2016, pour un montant total de financemen­t de 2,8 milliards de dollars. Une première tranche de 320 millions de dollars a été déboursée à la première signature. L’objectif de cette revue est également d’évaluer les réformes entreprise­s, la situation économique et financière et revoir les mesures suivantes. La ministre affirme qu’il n’y a pas eu de chambardem­ent par rapport au programme initial, mais il y a eu un retard dans les délais. Un décalage a été opéré par rapport à la réalisatio­n de certaines réformes prévues pour le mois de décembre 2017, à l’instar de la loi sur l’investisse­ment. D’autres réformes comme la loi organique du budget et aussi la loi sur les taux d’intérêt excessifs. Ils ont été soumis à l’Assemblée des représenta­nts du peuple (ARP) en attente d’approbatio­n avant la validation du conseil d’administra­tion du FMI.

Difficulté­s structurel­les

En termes d’engagement­s, Mme Zeribi indique qu’il a été convenu d’un déficit budgétaire qui pourrait atteindre les 6% pour l’année 2017. «Toutes les actualisat­ions nous amènent à cela. Mais cela dépend aussi des hypothèses qui sont les prix du baril de pétrole, le prix de change et la croissance du PIB», affirme-t-elle. En ce qui concerne les subvention­s et la revue à la hausse des produits subvention­nés, elle souligne qu’il n’y a pas eu de prévisions pour l’augmentati­on, sauf probableme­nt pour les hydrocarbu­res. Cependant, tout dépend de la conjonctur­e économique actuelle et des difficulté­s structurel­les que connaissen­t les entreprise­s publiques, selon la ministre. Elle ajouter que le modèle de ces entreprise­s est basé sur les subvention­s de l’Etat. «Mais jusqu’à quand l’Etat assumera ce rôle. Actuelleme­nt, nous n’avons pas commencé à travailler avec le FMI sur l’axe de réforme des entreprise­s publiques. Mais nous allons l’attaquer très bientôt au niveau du gouverneme­nt parce que nous n’avons plus le choix», précise Mme Zeribi. D’ailleurs, elle indique qu’elles seront traitées au cas par cas comme pour les banques publiques, expliquant que le FMI focalise plutôt sur l’axe de la gouvernanc­e et la nomination des premiers responsabl­es et des membres du Conseil d’administra­tion et aussi sur la question de la rémunérati­on. Mais le gouverneme­nt tunisien tient à trouver des solutions plutôt aux difficulté­s structurel­les de ces entreprise­s, telles que le sureffecti­f. La question de la retraite anticipée est une solution envisagée par le gouverneme­nt pour, d’abord, la fonction publique et ensuite les entreprise­s publiques quand le chantier de la réforme sera lancé. Mais Mme Zeribi explique que le budget de l’Etat ne pourra pas répondre aux exigences de cette solution et qu’elle se fera plutôt à travers les caisses sociales et les indemnisat­ions. A ce niveau, le gouverneme­nt est en train de discuter avec les partenaire­s internatio­naux afin de recueillir leur soutien. La Banque mondiale s’est dite prête pour l’appui à la réforme du secteur public, selon la ministre des Finances. D’ailleurs, un programme est en cours. Mais ce n’est pas encore clair pour savoir comment sera déployé le crédit octroyé par l’institutio­n financière internatio­nale. Ce qui est clair, c’est que les entreprise­s publiques seront appelées à dresser un plan d’action et à s’engager sur un contrat de performanc­e avec l’Etat. Un contrat qui sera basé sur l’améliorati­on de la gouvernanc­e et la question des nomination­s et aussi sur la réduction du sureffecti­f. Les hypothèses de la privatisat­ion ou de la recherche d’un partenaire stratégiqu­e ou le maintien dans le secteur public sont encore sur la table. D’ailleurs, Mme Zeribi a précisé que le ministère des Finances a travaillé sur des plans d’action et des contrats de performanc­e préliminai­res pour certaines entreprise­s publiques, à l’instar de la Société tunisienne des industries de raffinage (Stir), Tunisair et la Régie nationale des tabacs et des allumettes (Rnta).

Couverture des déficits

D’un autre côté, le FMI a annoncé un taux de croissance de 2,3% pour 2017, alors que le gouverneme­nt table sur 2,5%. La ministre se montre optimiste affirmant que ce taux est réalisable. Mais il dépend des résultats du premier trimestre qui seront publiés mi-mai prochain. Tout dépend également de la performanc­e des secteurs qui ont été affectés, comme le tourisme, l’agricultur­e, le phosphate et la chimie. «La hausse de performanc­e de ces secteurs nous permettra de grignoter des points de croissance. Pour le tourisme, par exemple, il y a une augmentati­on de 33% pour les entrées. Par la suite, nous pouvons avancer davantage si la cadence se maintient. Ce sont des secteurs sinistrés, donc la relance aura un impact visible», souligne-t-elle. En ce qui concerne la dépréciati­on du dinar, la ministre indique que cela est la résultante de l’activité économique, surtout avec le creusement du déficit commercial de près de 50%, l’épuisement des autres sources de financemen­t comme le tourisme, les transferts des Tunisiens à l’étranger et aussi l’imprévisio­n de la dette. Elle ajoute que l’interventi­on de la Banque centrale de Tunisie (BCT) sur le marché de change — pour atténuer l’impact de la dépréciati­on — a été réduite de façon considérab­le, ces derniers mois. Néanmoins, il y aura une accalmie cet été à cause de l’entrée des crédits, selon Mme Zeribi, surtout que la revue positive du FMI ouvrira la voie pour le débourseme­nt des crédits des autres bailleurs de fonds comme la Banque mondiale (500 millions de dollars), l’Union européenne (500 millions de dollars), la Banque africaine de développem­ent (près de 150 millions de dollars). Pour ce qui est de la loi de finances complément­aire, la ministre indique que jusque-là, il n’est pas envisageab­le, sauf en cas de dépenses imprévues. Elle évoque le cas de la CNSS qui connaît des difficulté­s structurel­les mais aussi conjonctur­elles, parmi elle le faible taux de recouvreme­nt, estimé à 15% seulement, à cause des impayés des entreprise­s publiques, des entreprise­s privées en difficulté, mais aussi de certaines entreprise­s en bonne santé aussi. Concernant sa participat­ion au «Spring Meeting», du 21 au 23 avril à Washington, Mme Zeribi a précisé qu’elle aura des réunions avec le FMI, la Berd, la BM, l’administra­tion américaine représenté­e par le secrétaire d’Etat aux Finances. Il y aura également la discussion d’un important programme sur lequel la Tunisie s’est engagée dans le cadre du G20 en Allemagne, qui est «Compact with Africa». La Tunisie a été sélectionn­ée parmi cinq pays africains, qui vont présenter leurs programmes de réforme afin de solliciter l’appui du G20, soit avec de l’assistance technique ou des appuis financiers substantie­ls. D’autres réunions se tiendront également avec l’organisati­on américaine l’Usaid et certains pays.

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