Soumoud, encore et toujours
On a choisi de mettre en image une constante de l’Histoire de la Tunisie, celle qui a fait sa cohérence tout au long des siècles : la Résistance ou Soumoud.
Expliquer une notion intime, abstraite, et viscérale, donner forme à un instinct, une passion, un réflexe, illustrer un héritage, une mission, un devoir, telle est la tâche superbe et ardue que s’est donnée la présidence de la République à l’initiative de M. Béji Caïd Essebsi, dans le cadre de son action culturelle. Pour concrétiser ce propos, on a choisi de mettre en image une constante de l’Histoire de la Tunisie, celle qui a fait sa cohérence tout au long des siècles : la Résistance ou Soumoud Entouré d’une nuée d’enfants, car c’est à eux qu’il souhaitait s’adresser en premier lieu, le président de la République inaugurait, dimanche dernier, une exposition pas comme les autres. On avait symboliquement ouvert pour la recevoir un des lieux du pouvoir, Dar Dhiafa à Carthage, avant de la faire voyager à travers les 24 gouvernorats. On avait réuni des oeuvres d’artistes modernes et contemporains ayant tous exalté ce sentiment, ce pouvoir, cette volonté de résistance tout au long des temps. Aux côtés des grands noms, comme Jellal Ben Abdallah, Zoubeïr Turki ou Ammar Farhat, on retrouvait également de jeunes artistes, comme Najoua Jarray, Hassen Mechichi, ou encore le photographe qui saisit au vol le geste magnifique de la jeune fille au drapeau. Mais cet aspect artistique et culturel, pour intéressant qu’il soit, ne constitue pas l’essentiel de cette initiative. Car cette exposition se veut essentiellement pédagogique. A partir de ce support visuel, on lancera un concours à travers le public scolaire, invitant les élèves à exprimer leur notion de Soumoud aujourd’hui. Dix lauréats seront retenus pour chaque gouvernorat, et les 240 textes édités et largement distribués.
Autre action que fera naître cette exposition : un concours lancé auprès des artistes les incitant à investir les grands moments de résistance. Car curieusement, les épopées tunisiennes, les grands récits nationaux, de la bataille de Zama à Ben Guerdane, de Sakiet Sidi Youssef à la bataille de Bizerte n’ont à ce jour jamais inspiré les artistes tunisiens. Seul l’Anglais Turner a évoqué la traversée des Alpes d’Hannibal. Non plus ne les ont d’ailleurs inspiré les héros que ce soit Jugurtha ou Ali Ben Ghedahem, Hannibal ou Daghbaji. Comment expliquer ces creux, ces vides, ces no man’s land de notre histoire artistique. Ou peut-être comment y remédier si ce n’est en demandant aux artistes de se réapproprier ces épopées nationales, et, sans démago- gie aucune, de leur donner vie, image et mémoire. Un concours sera donc lancé, doté d’un jury, et les oeuvres retenues seront intégrées à l’exposition. Aux artistes de s’emparer du thème, d’en filer l’argumentaire, d’en explorer les sujets. Mais pas seulement les plasticiens : sont également interpellés cinéastes, dramaturges, musiciens… Une exposition qui se nourrit d’elle-même, en perpétuel mouvement, féconde d’inspirations, mais aussi de créations de lieux. Car au cours d’une année entière, elle se déplacera à travers tout le pays, et là où cela sera nécessaire, créera ou réhabilitera des lieux d’accueil. Plus qu’un événement artistique ou culturel, davantage qu’une entreprise didactique et pédagogique, au-delà d’un désir de revivifier le sentiment patriotique, Soumoud sera un événement dégageant une énergie féconde et fédératrice, qui saura amalgamer les belles et bonnes volontés.