La Presse (Tunisie)

Le grand Monsieur

L’université tunisienne et le monde littéraire sont en deuil. Ils viennent de perdre l’un de leurs piliers

- S.B.S.

Cet homme grand de taille, aux yeux clairs, qui arbore son béret casquette comme une griffe, et qui lorsqu’il parle impose le silence parce qu’il a ce ton hypnotique et la passion des mots, c’est Taoufik Baccar, un des piliers de l’université tunisienne. Cet homme aux connaissan­ces vastes et pourtant si humble, qu’on a toujours du plaisir à écouter lors de conférence­s littéraire­s ou rencontres avec les profession­nels de la plume est décédé hier, lundi 24 avril, et sera enterré aujourd’hui vers 15h00 au cimetière El Jellaz à Tunis. Son histoire de vie est celle d’un pionnier. Il est l’un des fondateurs de l’université tunisienne, le fondateur de la collection « Sources de la modernité» aux éditions Sud, le découvreur de talents, et le novateur en matière de critique littéraire. L’écrivain et professeur universita­ire de langue et littératur­e arabes né le 27 décembre 1927 a eu tout le temps de laisser des traces et des disciples. Ces derniers admirent sa capacité à trouver les différents sens et nuances d’un mot, sa façon d’actualiser des textes anciens, et d’en tirer des leçons de vie valables pour tous les temps. Une fois, à l’occasion d’un hommage qu’on lui a rendu à la faculté des Lettres de Tunis, il a fait part à l’audience de sa lecture de l’une de ces fables animalière­s intitulées « Kalila we Dimna» d’Ibn Al Muqaffa, en précisant que ce recueil d’apologues devrait servir à l’éducation morale de ceux qui peuplent ce monde d’aujourd’hui si trouble et si sanglant. Tout comme ces animaux qui se sont unis pour vaincre l’ennemi, nos peuples doivent eux aussi dépasser les conflits et oublier leurs différends pour la bonne cause : paix et solidarité. Cet authentiqu­e enfant de son pays, ce militant progressis­te, tire sa révérence et s’en va après avoir contribué à l’éclat de la littératur­e tunisienne. Entre autres écrits réalisés par feu Taoufik Baccar : Poétique arabe, partie I, Maison du Sud 1996 et la traduction en français du roman La naissance de l’oubli de Mahmoud Messaâdi, sous le titre de La Genèse de l’oubli.

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