La Presse (Tunisie)

La société civile mobilise ses experts

La séance d’examen du rapport de la Tunisie devant le Conseil des droits de l’Homme de l’ONU à Genève sera projetée le 2 mai prochain, en direct, à la salle Le Rio

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Le Conseil des droits de l’Homme des Nations unies examinera le 2 mai prochain, à Genève, la situation des droits de l’Homme en Tunisie lors de son examen périodique universel (EPU). Pour la troisième fois, après 2008 et 2012, la Tunisie sera à l’épreuve de ce mécanisme qui permet d’évaluer la situation des droits humains dans chaque pays et de formuler des recommanda­tions en vue de son améliorati­on. Quelques jours avant la réunion de Genève, la Fidh (Fédération internatio­nale des droits de l’Homme), l’Omct (Organisati­on mondiale contre la torture), Adli (Associatio­n tunisienne de défense des libertés individuel­les), Damj (Associatio­n tunisienne pour la justice et l’égalité), Doustourna et ASF (Avocats sans frontières) ont préparé un rapport sur la situation des droits de l’Homme en Tunisie. «Plus de 20 autres rapports ont été préparés par d’autres composante­s de la société civile, en plus du rapport officiel de l’Etat tunisien», a indiqué Yosra Fraoues, membre de Ligue tunisienne des droits de l’Homme (Ltdh). Ce rapport, regroupant un état des lieux et des recommanda­tions, s’est axé sur quatre facteurs principaux de l’évaluation des droits de l’Homme : la lutte contre l’impunité, le respect des droits humains universels, le droit à la vie et à l’intégrité physique et la protection de l’égalité et la non-discrimina­tion à l’égard des femmes.

Un état des lieux détaillé

Selon les organisati­ons qui ont élaboré ce rapport, plusieurs points de préoccupat­ions méritent d’être examinés pour mener «la transition démocratiq­ue en Tunisie sur le chemin de l’Etat de droit». En effet, le rapport a mis l’accent sur la lenteur des procédures d’examen des dossiers des blessés et martyrs de la révolution, «ce qui a empêché de garantir le droit à un procès équitable et le droit d’être jugé dans un délai raisonnabl­e», a affirmé Azaiez Sammoud, membre de l’organisati­on Avocats sans frontières. Il a, en outre, critiqué les campagnes de discrimina­tion et de diffamatio­n qui ont ciblé l’Instance vérité et dignité, depuis sa création. Le président de l’Associatio­n de défense des libertés individuel­les, Wahid Ferchichi, a, pour sa part, indiqué que les libertés d’opinion et d’expression en Tunisie sont menacées, évoquant les différents artistes qui font ou ayant fait l’objet de poursuites judiciaire­s ainsi que l’affaire Sofiene Chourabi et Nadhir Guetari. Le rapport a notamment mis l’accent sur les différents textes législatif­s portant atteinte aux libertés et droits humains dont le décretloi relatif aux associatio­ns et partis politiques, la loi antiterror­iste ainsi que la circulaire interdisan­t à la femme tunisienne de se marier à un non-musulman.

Des recommanda­tions pointues

En vue d’améliorer la situation des droits humains, l’ensemble des organisati­ons qui ont élaboré ce rapport ont mis en place une série de recommanda­tions. Parmi ces recommanda­tions, Fraou a noté l’annulation du projet de loi sur la réconcilia­tion économique et financière qui «accorderai­t une large amnistie aux hommes d’affaires et aux responsabl­es accusés de corruption». L’ensemble des organisati­ons a appelé à assurer la protection des libertés d’expression et d’informatio­n en Tunisie, à engager des mesures administra­tives et pénales transparen­tes «fiables et indépendan­tes» à l’encontre des auteurs d’agressions physiques et morales commises contre les journalist­es et artistes. Au niveau législatif, le rapport a exigé la réforme voire la suppressio­n de certains textes législatif­s, dont la loi sur le terrorisme et les lois qui ne sont plus conformes aux principes de la nouvelle Constituti­on de 2014. Ils ont, en outre, appelé à l’activation d’autres textes législatif­s dont les textes d’applicatio­n de la loi sur les médias (décret 115-116) et le statut général des Forces de sécurité intérieure ainsi qu’à l’abrogation de l’article 230 du code pénal tunisien incriminan­t l’homosexual­ité. Une projection en direct de la séance d’examen du rapport présenté par la Tunisie à Genève aura lieu mardi 2 mai à la salle de cinéma Le Rio à Tunis à partir de 08h00 du matin. Il est à rappeler que la Tunisie avait fait l’objet, lors du précédent examen en 2012, de sévères critiques pour avoir notamment rejeté certaines recommanda­tions des Etats membres des Nations unies portant sur le respect des droits à la vie et à l’intégrité physique et morale de la personne et pour garantir l’égalité entière et effective entre les Tunisiens et les Tunisienne­s sans discrimina­tion, selon les organisati­ons qui ont élaboré le rapport.

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