La solidarité, un élément fondamental
Les mouvements sociaux dans les régions réclament de l’emploi et du développement, ce qui exige la solidarité de tous les politiciens et le soutien du gouvernement pour trouver des solutions durables
Le Forum sur la situation économique et sociale a été ouvert hier par l’Union générale tunisienne du travail (Ugtt) dans un hôtel de la place en présence de plusieurs membres de cette organisation ainsi que des experts et universitaires. C’était une occasion pour échanger les points de vue au sujet des problèmes d’ordre économique, social et politique ainsi que les mouvements de protestation que vivent certaines régions du pays pour demander de l’emploi et des projets de développement. Les travaux de ce forum se poursuivent aujourd’hui. M. Belgacem Ayari, de l’Ugtt, a indiqué que la crise en Tunisie a touché tous les secteurs politique, économique, social et sécuritaire. L’Etat est encore en cours d’édification dans la mesure où plusieurs institutions constitutionnelles ne sont pas encore actives. Les habitants de certaines régions ont exprimé leur ras-le-bol à travers des mouvements de protestation, comme c’est le cas de Tataouine, ce qui a incité le chef du gouvernement, M. Youssef Chahed, à se déplacer pour annoncer des mesures dans l’espoir de calmer les esprits.
Se référer au Document de Carthage
L’orateur a rappelé que certaines parties contribuent à envenimer la situation pour des intérêts politiques. « Nous sommes pour des protestations pacifiques pour des demandes tout à fait légales », souligne-t-il. Mais il est nécessaire de se référer au Document de Carthage dont une grande partie a été élaborée par l’Ugtt. M. Ayari s’est dit contre l’achat des députés par certains partis et contre le manque de solidarité de certains politiciens qui font pourtant partie du gouvernement d’union nationale et qui doivent, en principe, soutenir le gouvernement. Il n’est pas possible dans le contexte actuel de réaliser une démocratie et un développement en même temps à un taux de 100% ! L’objectif de tous les politiciens doit être l’intérêt suprême de l’Etat, loin de tout tiraillement infécond. M. Ayari a indiqué que les entreprises publiques sont à hauteur de 90% en difficulté pour plusieurs raisons. D’où la nécessité d’effectuer les réformes qui s’imposent en impliquant l’Ugtt en tant que partenaire social. Et d’ajouter que « le peuple, déjà pauvre, s’est appauvri davantage après le 14 janvier 2011. Tous les partis politiques, opposition comprise, sont appelés à conjuguer les efforts en vue de relancer l’économie en Tunisie dans le cadre du document de Carthage». De son côté, M. Khélil Ghariani, de l’Utica, a souligné aussi que la situation économique est difficile à cause d’un héritage qui date de plusieurs années. Tous les gouvernements post-révolution ont vécu cette situation précaire. Il est nécessaire, donc, d’étudier en profondeur la situation économique depuis les années 90. Une rétrospective doit être faite pour tirer les enseignements sur les trente dernières années. L’orateur a mis en exergue, par ailleurs, l’importance du dialogue social qui doit être enrichi par la présence d’experts et des représentants des organisations de la société civile. C’est dans ce cadre que tous intervenants peuvent exprimer leur avis au sujet des dossiers d’actualité. Il est nécessaire, de même, d’acti- ver les principes figurant sur le document de Carthage qui a été élaboré suite à un consensus entre les différents partenaires et qui a abordé, entre autres, le développement régional.
Le contrat social à l’ordre du jour
Le contrat social est entré en vigueur et plusieurs acquis sont réalisés ou en cours. C’est le résultat d’un dialogue entre les partenaires sociaux. L’orateur s’est félicité, en outre, du rapprochement entre l’Ugtt et l’Utica sur plusieurs dossiers d’intérêt commun. C’est une plate-forme balisée pour progresser encore, étape par étape, sur d’autres questions. Le Conseil national du dialogue social doit constituer un cadre propice pour discuter les différentes problématiques qui se posent et de trouver les solutions. Pour résoudre le problème des entreprises publiques, soutient M. Ghariani, il ne s’agit pas de licencier les fonctionnaires, mais de favoriser la croissance. Le représentant de l’Utica, qui a assisté aux réunions avec le FMI, estime que cette institution a été assez positive avec le gouvernement tunisien qui est appelé, cependant, à achever les réformes qu’il s’est engagé à faire. M. Hassine Abassi, ancien secrétaire général de l’Ugtt, a affirmé que le diagnostic de la situation économique et sociale tunisienne est connu de tous. La question à poser est « Pourquoi est-on arrivé à cette situation ? ». Le Forum va formuler des recommandations de nature à contribuer à désamorcer cette crise qui a eu ses impacts négatifs sur plusieurs régions. « Il est urgent de sauver le pays avant qu’il ne soit trop tard. Et en cas de faillite, ce sont les plus pauvres qui vont payer le prix », prévient-il. « La situation actuelle n’est pas comparable à des situations que nous avons vécues par le passé, explique M. Abassi, car chaque période a ses spécificités et son contexte ». La période de la Troïka, par exemple, était caractérisée par une prédominance du problème politique et on a constaté une recrudescence de la violence qui a abouti au terrorisme. Le pays est passé du provisoire aux élections législatives et présidentielle pour avoir un régime stable sur cinq ans. L’orateur a indiqué que la Constitution constitue la référence de toute politique à entreprendre en attendant l’achèvement de l’édification des différentes institutions constitutionnelles. Il ne faut surtout pas tomber dans l’improvisation pour résoudre les problèmes régionaux. Pas question non plus de criminaliser les partis politiques. L’Ugtt n’a pas l’intention de prendre la place des partis ou d’accéder au pouvoir. Elle peut se permettre, toutefois, de suivre le rendement du gouvernement et des partis pour prévenir et proposer. L’orateur a recommandé la mise en place de nouveaux mécanismes de dialogue sur la base du document de Carthage en lançant une initiative susceptible de résoudre la crise sans ignorer l’apport des partis politiques. Le dialogue aurait dû se poursuivre après le document de Carthage entre les différents partenaires pour mettre en place une stratégie économique et sociale adaptée aux nouveaux besoins et attentes de la population.