Une musique contre l’oubli
Clôture, mardi soir, des nuits ramadanesques de l’Institut français de Tunis avec un docu-concert dédié au chanteur tunisien Henri Tibi.
Impressionnant cet amour que portait ce chanteur juif tunisien pour la Tunisie. Un amour qui pétillait de ses textes et de ses mélodies bourrées d’ambiances festives et colorées. Colorée était également la Tunisie dans laquelle il a vécu dans les années 60-70 par son aspect melting-pot et multiculturel où juifs, musulmans et chrétiens partageaient une vie paisible au bord des plages tunisiennes et surtout à La Goulette. C’est avec cette chanson «La Goulette» dédiée à cette figure de la chanson judéo-tunisienne, que le documentaire de Yassine Redissi a commencé pour dresser le portrait de ce personnage original qu’était Henri Tibi. Un documentaire entrecoupé de morceaux du chanteur en question, interprétés par un groupe de jeunes musiciens tunisiens, soit le trio La Rumba, composé de Slim Ben Ammar, Nader Charfi et Bilel Mansour. L’histoire de cet amoureux fou de la Tunisie, qui vécut entre Lafayette et La Goulette, est narrée essen- tiellement par Mustapha Chalbi qui comptait parmi ses amis les plus fidèles. Ce dernier raconte comment après le départ des juifs tunisiens après la guerre de 1967, ce chanteur s’est retrouvé contraint à s’installer à Besançon pour continuer à chanter ses airs tunisiens dans les rues en faisant l’aumône. Le portrait d’un artiste maudit, mais aussi un portrait cousu sur un fond historique et politique qui a marqué toute une génération de musulmans tunisiens et de juifs tunisiens. Le documentaire revient également sur d’anciens clichés d’une Goulette et d’une Tunisie qui respiraient la joie de vivre, qui baignaient dans une sorte de «carpe diem» aujourd’hui perdu à jamais. Une grande découverte pour le public qui a assisté à cette soirée de clôture qui a réuni la musique et la mémoire sur une même scène, en faisant ressurgir toute une époque que les jeunes Tunisiens n’ont pas connue et qu’ils gagneraient à connaître...