Le sens des mots
QU’Y a-t-il de plus précieux pour un média, public ou privé, audiovisuel ou écrit, que sa liberté de s’exprimer et son droit d’accès à l’information ? Ce sont là ses outils de travail et sa raison d’être, car il ne doit son existence et sa pérennité qu’au besoin insatiable des lecteurs, des téléspectateurs et des auditeurs d’être informés, avec la plus grande loyauté, de tout ce qui se passe autour d’eux. Mais, pour autant, faut-il tout mettre sur le compte de la liberté d’expression, y compris les titres de manchettes, sournois, incitant à la violence, à l’insubordination, à la désobéissance civile, à «marcher» sur telle région ou ville en proie à une forte tension sociale ? Ou encore les slogans politiques brandis dans l’arène imprenable du football ? Le militantisme social est garanti par la Constitution de 2014 et toute tentative de faire basculer les manifestations pacifiques dans la violence et la confrontation avec les forces sécuritaires et armées ne répondent pas à une logique de paix… sociale.
Les médias ont dans ce contexte un rôle crucial dans l’orientation des événements dans un sens ou dans l’autre. Certes, le souci de faire grimper les ventes ou l’audimat est légitime, mais est-ce le seul qui doit présider aujourd’hui à leur destinée ? Les défenseurs de l’éthique, de la déontologie et de l’intérêt général ont-ils si tort au point d’être désormais classés dans la catégorie des espèces en voie de disparition quand ils ne sont pas tout simplement traités de fachos ?
La liberté d’expression a incontestablement des vertus autant pour ceux qui la pratiquent que pour les autres. Mais pas en manipulant l’opinion publique. Or, dans ce contexte de liberté enfin acquise, il faut se rendre à l’évidence que ce qu’on peut aussi considérer comme des dérapages médiatiques est en passe de devenir, pour certains du moins, la norme sous le prétexte que la liberté d’expression n’a pas de limites et ne supporte aucune règle. Mais est-ce vrai ? Est-ce vrai que la démocratie n’a pas de règles ? Si tel est le cas, à quoi doit-on sa durabilité sous d’autres cieux, car sous le nôtre, de sérieuses menaces pèsent sur elle. Loin de toute démagogie, il faut admettre que la liberté d’expression ne donne pas le même sens aux mots selon qu’elle est pratiquée par un politique, un journaliste ou un citoyen sans lien avec la politique, et, dans le cas échéant, elle n’a pas non plus le même impact sur l’opinion publique.
loin de toute démagogie, il faut admettre que la liberté d’expression ne donne pas le même sens aux mots selon qu’elle est pratiquée par un politique, un journaliste ou un citoyen sans lien avec la politique, et, dans le cas échéant, elle n’a pas non plus le même impact sur l’opinion publique.