Redonner de l’espoir aux tunisiens
Monsieur le chef du gouvernement, à l’occasion du premier anniversaire de votre entrée à La Kasbah, le 26 août 2016, je m’adresse à vous en tant que citoyen et chef d’entreprise pour vous faire part de toute mon «inquiétude» et celle de beaucoup de mes compatriotes concernant la situation économique du pays qui, malgré une légère reprise en 2017, reste fragile et préoccupante. En témoignent quelques indicateurs-clefs, à savoir : le déficit commercial record du premier semestre 2017 (environ 7.500 millions de dinars), le taux d’endettement général du pays estimé aujourd’hui à 75% du PIB et l’érosion de nos ressources en devises qui sont passées sous la cote d’alerte avec 90 jours d’importation en août 2017, soit le niveau le plus bas depuis 1986, au lieu de 120 jours en août 2016.
Etant entendu que vous héritez d’un bilan économique peu glorieux qui n’est rien d’autre que le résultat du laisser-aller des six dernières années caractérisées par la dévalorisation de la notion de travail et les revendications salariales sans fin avec leur cortège de sit-in et de grèves touchant de plein fouet l’investissement local et étranger, ralentissant la croissance économique et impactant directement les recettes de l’Etat d’où le recours de plus en plus à d’endettement.
Connaissant votre patriotisme et votre intégrité, le devoir national vous met dans l’obligation d’agir vite et fort en s’attaquant avec audace à certains maux de l’économie tunisienne, en l’occurrence : • La corruption qui freine le décollage
économique en poursuivant la guerre contre ce fléau qui sévit à tous les niveaux de la société. • Le retard pris dans la mise en place des
réformes structurelles attendues, notamment dans l’administration avec une masse salariale exorbitante, les entreprises publiques qui sont pour la plupart sous perfusion, le système bancaire et l’accès au crédit, les caisses
sociales avec leurs déficits structurels et la Caisse générale de compensation en inadéquation totale avec la réalité. • Le marché parallèle avec tout son lot
d’importations sauvages, souvent inutiles voire néfastes pour la santé publique créant une concurrence déloyale à notre production nationale, réduisant les recettes de l’Etat et creusant davantage le déficit budgétaire. • La dépréciation soutenue de notre
monnaie nationale qui a perdu durant les 18 derniers mois 26% de sa valeur par rapport à l’euro avec toutes les conséquences fâcheuses sur la dette publique, les coûts de production de nos entreprises et le niveau de vie du citoyen.
On a aussi beaucoup parlé de la restauration de l’autorité de l’Etat, mais rien n’a été fait pour y parvenir. Or cette autorité ne peut être restaurée que si elle est exercée par des personnes intègres qui ont le sens de l’Etat, et qui n’hésitent pas à appliquer la loi à l’encontre de tous les hors-la-loi et ce dans tous les domaines sans distinction d’où l’importance capitale des nominations dans les postes-clés de l’administration centrale et régionale.
Parlons enfin d’un sujet tabou, mais inévitable et qu’il va falloir discuter avec tous les partenaires sociaux, à savoir une trêve sociale de 2 ans (2018 et 2019) qui ramènera la confiance dans le pays et permettra d’engager sans heurts toutes les réformes structurelles nécessaires à la relance économique de notre pays.
Vous avez aujourd’hui une opportunité à saisir avec un appui populaire sans précédent en vue de mettre fin aux dérapages des dernières années et redonner de l’espoir aux Tunisiens et faire éviter à la Tunisie le scénario grec et toute la Tunisie vous en sera reconnaissante. Respectueusement.
*( Ingénieur agronome, chef d’entreprise)