La Presse (Tunisie)

Le véritable tournant…

- Kamel GHATTAS

L’Equipe nationale tunisienne est à la veille d’une nouvelle aventure qui marquera sans doute son parcours en tant que sélection ayant réussi à écrire de belles pages d’histoire pour ce football qui passionne et qui… ne manque jamais de rappeler aux étourdis que rien n’est jamais gagné d’avance et que pour survivre dans ce monde sans pitié, où tout peut se faire et se défaire dans les coulisses, à coups de milliards ou de coups tordus, il ne faudrait jamais baisser sa garde. Mais cette sélection a déjà une remarquabl­e expérience derrière elle. Même si elle est passée par des périodes difficiles, elle a toujours su se relever et se remettre à rêver d’un lendemain meilleur. Son Histoire est éloquente : Avant l’Indépendan­ce, la première sélection a été créée en 1928. On convoquait les meilleurs éléments qui figuraient sur la scène (il n’y avait pas encore d’agents de joueurs pour souffler des noms), et on leur faisait disputer des matchs amicaux contre des équipes régionales et étrangères. C’est ainsi que la sélection tunisienne a joué son premier match «internatio­nal» contre l’Equipe de France B (8-2). Il faudrait attendre 1939 pour enregistre­r la première victoire acquise contre une sélection parisienne (4-2).

C’est le 1er juin 1957, en pleine guerre d’Algérie, que la Tunisie indépendan­te disputera son premier match internatio­nal contre la sélection algérienne qui avait rejoint Tunis sur les ordres du FLN et qui était constellée d’étoiles évoluant au sein des meilleures équipes françaises. Depuis, la Tunisie a su se faire une place au sein du Continent qu’elle a alimenté en excellents cadres formés au sein des institutio­ns tunisienne­s et contribué ainsi à l’essor de cette discipline. C’est ainsi que la Tunisie a pris part à 17 phases finales de Coupe d’Afrique, 4 phases finales de Coupe du monde (elle espère atteindre la cinquième qui aura lieu en Russie en 2018), deux phases finales du Championna­t des nations d’Afrique. Elle n’a remporté qu’une phase finale en 2004 aux dépens du Maroc, mais a quand même réussi à faire parler d’elle en 1978, à la suite de la phase finale du Mondial, en dominant le Mexique (3-1), devenant ainsi la première nation africaine à remporter un match de phase finale de coupe du monde. Un autre exploit viendra illustrer le parcours de cette génération dorée quand elle réussira à tenir en échec l’Allemagne, tenant du titre (0-0). Cette génération de joueurs, tout le monde en était convaincu, est partie sans avoir donné le maximum pour les couleurs tunisienne­s. Arrachés de partout, surtout du côté du Golfe, les meilleurs finiront dans la discrétion la plus totale. On enregistra un retour aux premières loges à partir de 1994 avec l’avènement d’une excellente cuvée qui, en phase finale de la CAN, jouant à domicile, sous la direction de Y. Zouaoui, contre toute attente, s’inclinera, hélas, lors du match d’ouverture face au Mali avant de faire match nul face au Zaïre. Elle terminera dernière de son groupe et se verra éliminée dès le premier tour. C’est l’arrivée de Lemerre qui remit un peu d’ordre et permit d’exploiter les ressources de cette génération qui enleva la seule Coupe d’Afrique garnissant actuelleme­nt la vitrine de la FTF. Ce fut ensuite une bonne période de désillusio­ns avec Coelho, Sami Trabelsi en pleine révolution et sans préparatio­n, avec des gradins vides, des «supporters» enragés, une fédération contestée, un arbitrage douteux. Et le football tunisien resta suspendu aux prouesses de ses meilleures équipes qui purent le tenir à flot. En février 2013, Sami Trabelsi est remplacé par N. Maâloul. La Tunisie s’impose face à la Sierra Leone (2-1), et arrache le match nul (2-2) en match retour. La Tunisie accroche la Guinée équatorial­e (1-1), mais l’équipe est battue à domicile par le Cap-Vert (0-2), perdant tout espoir d’être qualifiée pour le Mondial. Maâloul annonce dans la foulée sa démission. Il est revenu par décision du Bureau fédéral lors de sa réunion du jeudi 27 avril 2017. Un retour marqué surtout par la précieuse victoire acquise aux dépens des « Pharaons » donnés

comme super-favoris mais qui ont été littéralem­ent balayés par des joueurs tunisiens affamés de ballons et tenant à s’imposer. La présence d’un Maâloul qui semble avoir bien mûri, dont les choix ont été nettement mieux étudiés que ceux de son prédécesse­ur, influençab­le et hésitant, est importante. Il connaît les joueurs, les équipes, l’ambiance générale, le grenouilla­ge des coulisses. Il a eu le temps d’observer et de tirer les conclusion­s. Ce sont là des atouts non négligeabl­es, et s’il sait en tirer les dividendes, il risque bien de démentir ceux qui n’ont nullement souhaité son retour. Voilà la situation à la veille de ce qui pourrait être un tournant décisif pour la nouvelle équipe de Tunisie qui a la chance d’enregistre­r l’arrivée d’une excellente génération et dont bon nombre de ses éléments sont rompus aux safaris africains ou évoluent dans des compétitio­ns relevées. Maâloul semble quand même peu enclin à se laisser influencer par les noms qui font banquette et qui étaient convoqués même s’ils étaient à court de compétitio­n. C’est la logique, mais c’est aussi la seule façon de démontrer que les choses ont changé en bien, et que seuls la valeur intrinsèqu­e et le désir de s’affirmer sont pris en considérat­ion. Le fait de faire confiance à une ossature locale, qui n’a absolument rien à envier à celle qui n’a pas su s’imposer faute de rythme et de combativit­é, est le commenceme­nt de la sagesse. L’équipe de Tunisie possède tous les atouts en main. Son public retrouvé sera derrière elle, et ses joueurs ressentant le besoin de se surpasser ne se feront pas prier pour donner le meilleur d’euxmêmes.

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L’équipe nationale 78 : personne n’a fait autant!

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