L’opportunité d’un sauvetage unitaire
Aujourd’hui, autour de Chahed, une coalition de partis politiques solidairement responsables des succès comme des échecs est appelée à étoffer l’équipe sur des bases objectives d’efficacité. Sous peine d’éclater en morceaux ▸
Les partis politiques ayant cosigné le Document de Carthage puis appuyé le gouvernement d’union nationale ont fait la preuve, durant toute une année, qu’ils sont désormais solidaires dans l’action comme dans la stratégie de sortie de crise préconisée. Que certains d’entre eux se dégagent par à-coup de la responsabilité leur incombant en cette qualité, et lancent des fléchettes isolées ou même des boules puantes à l’adresse de Youssef Chahed, cela ne les délivre pas de leurs engagements pris solennellement à Carthage, en présence du président de la République.
Un long processus d’homogénéisation
Souvenons-nous, Ennahdha avait défendu avec acharnement l’idée d’un accord de gouvernement avec Nida Tounès, qui allait à l’encontre des arguments de campagne les ayant opposés lors des législatives. Puis Ennahdha avait milité pour un élargissement le plus large de l’alliance, pouvant inclure même le Front populaire. C’est dans ce cadre qu’Afek Tounès et l’UPL étaient cooptés. D’où la facilité avec laquelle l’accord de Carthage allait intégrer Al Massar, Al Joumhouri, le MPT. Tout ce processus était le fruit d’une grande sagesse de la part de la classe politique, le chef de l’Etat en tête. Et même si les résultats restent à potentialiser et à booster, la Tunisie a enfin creusé le sillon d’un programme commun de gouvernement crédible qui n’attend plus que les réformes de structure, dont le principe est désormais acquis pour tous, destinées à renflouer les caisses de l’Etat et relancer l’investissement.
Le président veut sauver cette logique unitaire
Est-il raisonnable, maintenant, que l’on en vienne à détrôner unilatéralement cette logique unitaire pour revendiquer égoïstement plus encore de ministres partisans et exiger le maintien de tous ceux en poste ? Y compris dans les départements économiques et financiers où des compétences techniques sont impératives si l’on veut maîtriser les réformes de fond enfin envisagées. Pour voler au secours de cet impératif, le président Béji Caïd Essebsi, initiateur et dynamo du consensus tunisien, élargit les consultations, multiplie les contacts avec les autres partis : Mohsen Marzouk, Yacine Brahim, Boujemâa Rmili, Samir Taïeb, lance des hypothèses, élabore des scénarios...
Etoffer sans disloquer
Aujourd’hui, autour de Chahed, une coalition de partis désormais solidairement responsables des succès comme des échecs est appelée à étoffer l’équipe sur des bases objectives d’efficacité. Sous peine d’éclater en morceaux Accusée de ne pas avoir réalisé le redressement souhaité et assuré toutes les conditions de la relance, cette coalition doit rester solidaire et faire appel à des techniciens efficaces pour sauver la mise. Afin d’avoir une chance de marquer son passage aux commandes de l’exécutif par un succès pouvant convaincre les électeurs de demain. Dans l’esprit de très nombreux Tunisiens, il s’agit là d’un devoir national majeur. Mais les grands partis mettent en avant leur ego partisan au détriment des intérêts collectifs de la coalition. Ainsi que de ceux, vitaux, du pays. Ils font ce qui ressemble à un chantage miséreux qui prétend troquer l’orgueil de leurs partis et de leurs ministres contre le vote de confiance. Un pari suicidaire, lorsque l’on met dans la balance ce que le pays attend comme action décisive en vue de la relance et du sauvetage.