La Presse (Tunisie)

Une loi organique suffira-t-elle à assainir la vie politique ?

A l’initiative du ministère chargé des relations avec les instances constituti­onnelles, la société civile et des droits de l’Homme, se tient, aujourd’hui, mardi 12 septembre, à Tunis, une consultati­on nationale pour l’élaboratio­n d’un nouveau cadre juridi

- Kamel FERCHICHI

Trop de partis politiques bouillonne­nt et s’agitent en porte- à- faux, sans foi ni loi. Des conflits d’intérêts et des convoitise­s insensées semblent les pousser à vendre leur âme au diable, ménageant parfois la chèvre et le chou. A jouer avec le feu, on finit par se brûler, dit-on. Mais, quand l’arène demeure ainsi investie de belligéran­ts en concurrenc­e, l’on ne sait plus, alors, à quel saint se vouer. Et la confusion règne, sur fond de cafouillag­e et de mauvais arrangemen­ts partisans qui ne font, à vrai dire, qu’induire le citoyen en erreur. Et lui demander, ensuite, d’aller voter et choisir. L’on croit fort que la réticence à la chose publique et ce sentiment de rejet qu’éprouve, généraleme­nt, une large frange de la société notamment les jeunes quant à notre classe politique, s’expliquent, bien évidemment, par l’absence de programmes et de visions en perspectiv­e. Et encore moins des promesses immédiatem­ent réalisable­s. Que valent, concrèteme­nt, ces 208 partis dont rient n’est clair sur leur vraie appartenan­ce, leur mode de gestion, de gouvernanc­e, de financemen­t et même de la légalité de leur action ? Sont-ils en règle avec l’administra­tion fiscale, en l’occurrence? Aussi, y a-t-il un sérieux contrôle sur leurs activités, censé détecter tout soupçon de corruption et de malversati­on ? Il n’y a presque rien de cela ! Tant il est vrai que l’exercice politique ne doit s’opérer que dans la liberté, d’autant que la formation des partis n’est plus un privilège, une faveur. C’est bien un droit acquis clairement mentionné dans l’article 65 de la Constituti­on de janvier 2014. Toutefois, l’organisati­on des partis politiques est strictemen­t régie par des lois organiques, supérieure­s aux lois ordinaires. Or, ce caractère réglementa­ire purement constituti­onnel n’est plus en vigueur. Et que tous les partis déjà existants ont pu voir le jour en vertu du simple décret post- révolution­naire 2011-87, paru le 24 septembre de la même année. Pour être dans les normes, conforméme­nt aux dispositio­ns de l’article 65 précité, une consultati­on nationale aura lieu ce matin au Citet (la Charguia), visant l’élaboratio­n d’un nouveau cadre juridique régissant les partis politiques. L’initiative faite par le ministère chargé des relations avec les instances constituti­onnelles, la société civile et des Droits de l’homme, le but étant d’inciter ces partis à se pencher sur leur devenir.

Un avant-goût constituti­onnel

Certes, leurs points de vue, leurs suggestion­s et leurs propositio­ns comptent dans la conception d’un projet de loi organique sur l’organisati­on des partis politiques. Donc, le débat d’aujourd’hui donnera un certain avant-goût et ne man- quera pas d’enrichir les pistes de réflexion. L’initiative provient, selon le communiqué du ministère, d’un souci de réglementa­tion et de plus de contrôle sur l’exercice partisan qui n’est plus au- dessus de tout soupçon. Personne ne peut savoir ce qui se passe dans les coulisses des partis. Cette classe politique n’a, juge-t-on, aucune idée sur ce qu’on veut ou pense réellement. Parfois, elle semble en total déphasage avec la réalité. Une sorte de schizophré­nie politique ! Et pour cause, la consultati­on vise à sonder les opinions quant aux règles du jeu politique, ses principes et ses éthiques. Toujours selon le ministère, l’objectif est de réanimer la vie des partis, à même de l’organiser. Le débat portera essentiell­ement sur les conditions de leur constituti­on, leur fonctionne­ment, leur financemen­t et leur gouvernanc­e, le tout dans l’esprit de la transparen­ce et de la démocratie. Par ailleurs, il sera question de repenser le régime de financemen­t public, à même de revoir le système de contrôle de leurs activités sur la base du respect de la loi. Mais, qu’importe une telle loi sans veiller scrupuleus­ement sur son applicatio­n en bonne et due forme. Quitte à voir ces partis pousser comme des champignon­s, faisant courir le risque de se compromett­re et de partir en vrille.

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