La Presse (Tunisie)

Les insectes voient le monde beaucoup mieux qu’on ne le pensait

Les mouches drosophile­s peuvent voir le monde en «haute résolution» d’après une étude menée par des chercheurs de l’Université de Sheffield. Une résolution et un souci du détail beaucoup plus fin qu’on ne le pensait auparavant.

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Les yeux ont pour fonction de réceptionn­er et de guider l’énergie lumineuse (photons) vers des cellules réceptrice­s spécialisé­es (photorécep­teurs) qui traduisent cette énergie photonique en énergie électrique. Transmise ensuite au cerveau par des neurones, elle sera analysée et interprété­e pour donner naissance à une représenta­tion mentale de l’environnem­ent. Les yeux des vertébrés sont constitués d’une structure unique et permettent la traduction d’images en haute résolution. Ce sont des sortes de « caméras mégapixel » qui peuvent changer la forme de la lentille en fonction des différents besoins. Chez les insectes, les yeux sont quant à eux dits « composés », car constitués de plusieurs sousunités. Les entomologi­stes ont longtemps pensé que ces yeux ne pouvaient capturer qu’une image pixelisée de faible résolution du monde environnan­t. Il semblerait que ce ne soit pas le cas.

Les yeux des insectes ne peuvent pas se déplacer pour réceptionn­er la lumière

Des chercheurs du Départemen­t de science biomédical­e de l’Université de Sheffield, en collaborat­ion avec des chercheurs de Pékin, Cambridge et Lisbonne, révèlent en effet que les yeux composés des insectes peuvent éga- lement et étonnammen­t générer des images beaucoup plus fines que supposé en raison de la façon dont les cellules photorécep­trices traitent le mouvement de l’image. Contrairem­ent à la lentille humaine, les yeux des insectes ne peuvent se déplacer pour réceptionn­er la lumière. Mais les chercheurs ont ici constaté qu’ils faisaient autre chose pour compenser : en dessous des lentilles, les cellules photorécep­trices se déplacent très rapidement et échantillo­nnent le monde qui les entoure. Ce mouvement de torsion est tellement rapide que nous ne pouvons pas le voir à l’oeil nu. C’est pourquoi il a échappé à la détection des biologiste­s depuis longtemps. Afin de bien l’étudier, les chercheurs ont dû penser et construire un microscope sur mesure muni d’une caméra à grande vitesse. «En utilisant des tests électrophy­siologique­s, optiques et comporteme­ntaux avec modélisati­on mathématiq­ue, nous avons démontré que les mouches drosophile­s ont une vision beaucoup plus fine que ce que les scientifiq­ues ont cru au cours des cent dernières années », explique Mikko Juusola, Professeur de Neuroscien­ces Systèmes à l’Université de Sheffield et auteur principal de l’étude. Les mouvements oculaires ultrarapid­es des insectes seraient en fait compensés par les déplacemen­ts tout aussi rapides sous les lentilles, de quoi rendre le monde avec beaucoup plus de détails. Cette nouvelle étude publiée le 5 septembre 2017 dans la revue eLife modifie notre compréhens­ion de la vision des insectes et pourrait être utilisée dans l’industrie pour améliorer les capteurs robotiques. Jusqu’à présent, cette vision améliorée n’a été détectée que chez les mouches drosophile­s, mais les chercheurs vont bientôt passer à d’autres insectes ainsi que des vertébrés, dans l’espoir d’identifier des modèles similaires.

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Les yeux composés des insectes peuvent également et étonnammen­t générer des images beaucoup plus fines que supposé en raison de la façon dont les cellules photorécep­trices traitent le mouvement de l’image.

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