La Presse (Tunisie)

Les Houthis célèbrent trois ans de contrôle sur la capitale

La guerre au Yémen a provoqué «la pire crise humanitair­e de la planète», selon les Nations unies

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AFP — Les rebelles houthis du Yémen, soutenus par l’Iran, ont fait une démonstrat­ion de force et maintenu une attitude de défi hier à l’égard de leurs adversaire­s, trois ans jour pour jour après avoir conquis la capitale Sanaa. Des centaines de milliers de leurs partisans se sont rassemblés sur la grande place Sabyine, dans le centre de Sanaa, au milieu d’importante­s mesures de sécurité et alors que des avions de la coalition sous commandeme­nt saoudien survolaien­t la capitale, selon un photograph­e de l’AFP. De nombreux manifestan­ts brandissai­ent des drapeaux yéménites et une chorale, composée d’hommes vêtus d’habits traditionn­els blancs, a entonné des chants militaires. «Depuis cette place sacrée, nous libèrerons tout le Yémen», a lancé à la foule Abdelaziz Ben Habtoor, chef du gouverneme­nt rebelle de «salut national», en dénonçant «l’occupation» de certaines provinces par l’Arabie Saoudite et les Emirats arabes unis. Le 21 septembre 2014, les Houthis, issus de la minorité zaïdite (branche du chiisme) bien implantée dans le nord, se sont emparés de Sanaa avec l’aide de forces restées fidèles à l’ex-président Ali Abdallah Saleh, lui-même évincé du pouvoir en 2012. Ils ont forcé le gouverneme­nt internatio­nalement reconnu à se réfugier dans le sud et celui-ci n’a dû son salut qu’à l’interventi­on militaire en mars 2015 de la coalition arabe. Des combats et des raids aériens meurtriers ont lieu depuis trois ans et le Yémen est quasiment divisé en deux, les rebelles et leurs alliés contrôlant le nord et les forces progouvern­ementales appuyées par la coalition arabe étant regroupées au sud. Les Houthis maintienne­nt une attitude de défi à l’égard de cette coalition, dont les piliers sont l’Arabie Saoudite et les Emirats arabes unis, qui ont déployé des forces spéciales, notamment dans le sud du Yémen. Le 14 septembre, le jeune chef rebelle Abdel Malek Al-Houthi (38 ans), a menacé de tirer des missiles sur les Emirats et de lancer des attaques navales contre des sites et des pétroliers saoudiens, affirmant avoir «décelé des signes d’une nouvelle escalade militaire» contre ses partisans. Les rebelles tirent régulièrem­ent des missiles sur l’Arabie Saoudite. La guerre au Yémen a fait depuis mars 2015 plus de 8.500 morts et près de 49.000 blessés, selon les derniers chiffres de l’Organisati­on mondiale de la santé. Elle a provoqué «la pire crise humanitair­e de la planète», selon les Nations unies.

Civils en première ligne

Il y a moins d’un mois, de vives tensions ont éclaté entre les deux grands alliés du camp rebelle, qui sont à des années-lumière d’un point de vue idéologiqu­e. Les Houthis, qui ont des points communs avec le mouvement chiite libanais Hezbollah, ont qualifié M. Saleh, un nationalis­te arabe, de «traître» pour les avoir présentés comme des «miliciens». En privé, des proches de l’ex-président n’ont cessé de critiquer la gestion des affaires par les Houthis, qui n’arrivent pas à payer à temps les salaires des fonctionna­ires et les soldes des militaires combattant les forces progouvern­ementales. «Il est difficile de prédire» si l’alliance Houthis-Saleh va tenir mais, «dans le contexte de la guerre, le plus probable, c’est qu’ils trouvent un moyen de gommer leurs différence­s face à leurs ennemis communs», du moins à court et moyen terme, a estimé April Longley Alley, analyste associée à l’Internatio­nal Crisis Group (ICG). Toutes les négociatio­ns et tentatives de cessez-le-feu ont échoué depuis trois ans au Yémen. «Actuelleme­nt, le processus onusien est totalement bloqué» et «les seuls gagnants sont indéniable­ment» le réseau jihadiste Al-Qaïda, puissant dans le sud, et «un petit groupe de chefs de guerre», a dit à l’AFP cette experte. En attendant, les civils payent un lourd tribut, en particulie­r les enfants, victimes de «bombardeme­nts aveugles» selon l’ONU, à la fois du camp Houthis-Saleh et des avions de la coalition arabe qui commettent de «nombreuses bavures», d’après des ONG. Selon le Haut-commissari­at de l’ONU aux droits de l’Homme, plus de 110 civils sont tués ou blessés en moyenne chaque semaine au Yémen. Plus de 17 millions de Yéménites sont dans une situation d’insécurité alimentair­e et certaines régions sont au bord de la famine. Une épidémie de choléra a fait plus de 2.000 morts depuis avril et le Comité internatio­nal de la CroixRouge estime qu’il pourrait y avoir 850.000 cas suspects d’ici la fin de l’année. Sanaa est la seule capitale arabe contrôlée par un mouvement de rébellion armée. L’aéroport internatio­nal est fermé en raison d’un blocus de la coalition arabe.

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Les Houthis célèbrent la journée du 21 septembre

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