Le drame est quotidien
Les Tunisiens semblent, dans leur majorité, pessimistes. C’est ce que révèle le dernier rapport de Sigma Conseil. 73,3% des Tunisiens interrogés dans ce sondage sont pessimistes quant à la situation dans le pays, ce qui est un record. Ce pessimisme, palpable depuis les 6 dernières années, se retrouve dans diverses manifestations souvent dramatiques.
Les Tunisiens semblent, dans leur majorité, pessimistes. C’est ce que révèle le dernier rapport de Sigma Conseil. 73,3% des Tunisiens interrogés dans ce sondage sont pessimistes quant à la situation dans le pays, ce qui est un record. Ce pessimisme, palpable depuis les 6 dernières années, se retrouve dans diverses manifestations souvent dramatiques.
Ainsi, le dernier rapport mensuel du Forum tunisien des droits économiques et sociaux révèle que le nombre de suicides et de tentatives de suicide a augmenté d’une façon considérable en septembre dernier. En effet, 52 cas de suicides et de tentatives de suicide ont été enregistrés en septembre contre 17 en août, 32 en juillet, et 13 en juin 2017. On précise que ce sont les jeunes les plus touchés, la moitié des victimes ont entre 20 et 39 ans. Les raisons sont multiples. Selon Mehdi Ben Khelil, assistant hospitalo-universitaire en médecine légale, «hier strictement confiné à l’espace domestique, le suicide tend aujourd’hui à être employé comme un instrument d’appel désespéré à l’aide». « Outre la recrudescence des immolations, une augmentation des suicides commis dans des endroits publics symboliques (souvent devant des municipalités, des postes de police, etc.) est également à déplorer, démontrant ainsi qu’un conflit endémique s’est enraciné entre les représentants de l’autorité et les exclus de la société. Et si la plupart sont célibataires, l’on assiste à un accroissement de suicides commis par des personnes mariées, souvent en raison de la pression qu’exercent les difficultés financières sur leur ménage. Sans surprise, ce sont d’ailleurs les chômeurs et les ouvriers qui se suicident le plus, représentant plus de 80% des cas ».
Le pessimisme pousse aussi les jeunes et les moins jeunes à aller chercher des solutions ailleurs. Ils n’hésitent pas à mettre leur vie en danger pour tenter d’atteindre des rivages d’un hypothétique Eldorado sur des embarcations de fortune. Le plus significatif est que leurs parents les aident à réunir les sommes exigées par les passeurs. Selon le conseiller auprès du secrétaire d’Etat chargé de l’Immigration et des Tunisiens à l’étranger, Fahd Trimech, le nombre des Tunisiens ayant émigré de manière clandestine vers l’Italie a atteint les 1500, et ce, du 1er au 18 octobre. Mais chaque jour, on déplore des victimes malgré les interventions permanentes des autorités maritimes qui interceptent des tentatives de migrations clandestines.
Et qu’est-ce que ces mouvements sociaux à répétition, si ce n’est l’expression d’un mal-être ? Le Forum tunisien des droits économiques et sociaux révèle que la Tunisie a connu 7941 mouvements sociaux durant les 9 premiers mois de l’année. Une hausse considérable par rapport à la même période de 2016. Bien entendu, la dégradation du pouvoir d’achat et les difficultés matérielles ainsi que le chômage en sont les causes importantes. Mais il y a aussi une absence de vision claire quant à l’avenir.
Cette situation de pessimisme a amené plusieurs au terrorisme, et à la délinquance voire à la criminalité. Dernières actions en date : jeudi dernier, la brigade d’inspection de la Garde nationale de Sidi Bouzid a réussi à démanteler une cellule terroriste entièrement féminine. Elle est composée de 8 femmes dont 5 jeunes filles qui, lors de leur interrogatoire, ont avoué faire allégeance au groupuscule Daesh. Et une campagne contre les vols et les braquages a été lancée cette semaine dans le Grand-Tunis, pour veiller à la sécurité des usagers du transport public. La Transtu a mobilisé ses 1.400 agents sécuritaires pour cette campagne qui se poursuivra toute l’année.
Outre les réformes et les mesures engagées pour redresser l’économie, on devrait se soucier également du social et du moral du Tunisien. Redonner de l’espoir. En commençant par ces politiques et ces experts, inconscients, qui ne cessent de prédire des catastrophes.