«Les effets pervers du huis clos…»
Notre invité propose des sanctions alternatives qui ne tuent pas le spectacle et les clubs.
Que pensez-vous de la levée du huis clos du tableau disciplinaire par le bureau fédéral ?
Il faut dire que le huis clos est une des résultantes de la violence sur nos stades. C’est l’une des règles de droit les plus utilisées pour essayer de réduire la violence, mais en réalité, cela n’a pas atténué ce fléau. Je crois que cette décision est un point de départ pour comprendre et lutter, via une juridiction sportive plus efficace, contre la violence dans les stades.
Vous êtes contre le principe du huis clos donc ?
Oui, absolument. Cette mesure a enfoncé les clubs, et les a pris en otage par les agissements de groupes de supporters violents et délinquants. Le club dépend dans ce cas de ses supporters indisciplinés et malfaiteurs qui le privent de jouer devant son public. Je dis même que le huis clos a des effets pervers sur le club et sur le football tunisien. D’abord on a un spectacle pauvre, faute de l’absence de public qui crée le spectacle sur le terrain. Ensuite, ça accentue la culture de la désaffection, et la preuve, le public tunisien suit beaucoup moins les matches de foot en moyenne même sans huis clos. Et il y a aussi le manque de recettes, qui enfonce les clubs dans leurs crises financières et qui les prive de recettes stables pour gérer les besoins croissants de financement. Comment voulez-vous qu’un club fonctionne, et sans l’aide étatique, alors qu’il ne peut compter sur un stade plein ? Je crois aussi qu’on n’ a pas eu l’idée de faire une analyse des effets du huis clos. La violence ne s’est pas arrêtée, les caisses et les stades sont devenus vides. C’est le constat amer mais réel.
Mais à voir ces scènes dangereuses chaque semaine et le risque de perdre des vies humaines ne vaut-il pas la peine de décréter le huis clos ?
C’est vrai que la teneur de la violence s’est accentuée et que le risque est monstre. Mais, en même temps, cette sanction n’est plus en adéquation avec le contexte international. Il faut s’inspirer des expériences européennes, notamment en France et en Italie, pour trouver le bon remède à la violence. On doit prendre deux trois ans pour éradiquer la violence et éloigner les supporters violents.
Quelles sont les sanctions alternatives à votre avis ?
Il faut d’abord une prise en charge de l’Etat, via son appareil exécutif, du problème de la violence. Les clubs sont impuissants devant ce fléau. Accès seulement à des abonnés identifiés, jouer des matches loin de ses bases, placer des caméras de surveillance dans les stades, fermer ces enceintes où la violence persiste pour une ou deux saisons, interdiction de stade après même la poursuite pénale, sanctions financières contre le club, voilà, entre autres, quelques mesures, autres que le huis clos, qui peuvent aider dans cette lutte acharnée. Tout le monde souffre de cette violence, et du huis clos en même temps. On doit donc trouver ensemble, et d’une façon rationnelle, des solutions efficaces et qui protègent nos clubs déjà en difficulté.