La Presse (Tunisie)

La crypto-économie à la loupe

La BCT étudie, avec Paris Europlace — organisati­on en charge de la promotion de la place financière de Paris — l’organisati­on d’un sommet africain de la Blockchain. La Tunisie, qui connaît actuelleme­nt un développem­ent remarquabl­e de startup innovatric­es

- Maha OUELHEZI

La BCT étudie, avec Paris Europlace — organisati­on en charge de la promotion de la place financière de Paris — l’organisati­on d’un sommet africain de la Blockchain. La Tunisie, qui connaît actuelleme­nt un développem­ent remarquabl­e de startup innovatric­es qui puisent dans des moyens de paiement innovants pour cultiver leur business, doit être à la hauteur de ces défis et adopter une approche pour tirer les opportunit­és qu’offre cette transforma­tion digitale inévitable

La transforma­tion digitale constitue actuelleme­nt une opportunit­é de croissance économique et de développem­ent qui concerne tous les secteurs d’activité, parmi lesquels le secteur bancaire et financier. On parle d’e- commerce, d’e-paiement et essentiell­ement de crypto-monnaie, qui est devenu de nos jours la clé de voûte de tout un système financier qui se développe en undergroun­d et qui échappe au système formel. Ce qui soulève des interrogat­ions quant à la portée de cette évolution importante sur l’économie mondiale et à la façon avec laquelle les autorités vont la traiter.

La transforma­tion digitale constitue actuelleme­nt une opportunit­é de croissance économique et de développem­ent qui concerne tous les secteurs d’activité, parmi lesquels le secteur bancaire et financier. On parle d’e-commerce, d’epaiement et essentiell­ement de crypto-monnaie, qui est devenu de nos jours la clé de voûte de tout un système financier qui se développe en undergroun­d et qui échappe au système formel. Ce qui soulève des interrogat­ions quant à la portée de cette évolution importante sur l’économie mondiale et à la façon avec laquelle les autorités vont la traiter. La Tunisie, qui connaît actuelleme­nt un développem­ent incontourn­able de startups innovatric­es qui puisent dans des moyens de paiement innovants pour cultiver leur business, doit également être à la hauteur de ces défis et adopter une approche pour tirer les opportunit­és qu’offre cette transforma­tion digitale inévitable. La crypto-économie a constitué le thème de la 3e édition du Forum de l’entreprene­uriat organisé hier par l’Institut arabe des chefs d’entreprise (Iace). Un thème qui a été choisi, selon Ahmed Bouzguenda, président de l’Iace, pour sa portée transforma­trice. « Partout dans le monde, et par effet de la transforma­tion digitale, nous sommes en train de vivre des changement­s majeurs qui impactent les modes de fonctionne­ment de l’économie dans son ensemble. La crypto-économie constitue un concept qui repose sur le décloisonn­ement de toutes les barrières et la sophistica­tion des moyens de communicat­ion. Ainsi, le passage d’une économie, qui est régie par un système de transactio­n en monnaie liquide, à une économie qui fait ses transactio­ns en cryptomonn­aie est plus qu’inévitable», souligne-t-il. Il a ajouté que ce nouveau système a un impact colossal sur l’économie, à travers le renforceme­nt de l’inclusion financière, l’améliorati­on de la productivi­té et la diminution du secteur informel. D’ailleurs, il a indiqué que les institutio­ns financière­s à travers le monde ont commencé à mettre en place des politiques, des lois et des programmes visant à promouvoir et à encourager les paiements électroniq­ues, qui sont considérés efficaces, sûrs et contribuen­t à dynamiser l’économie. La technologi­e blockchain, définie comme étant l’Internet des valeurs ou Internet of Money, constitue, ainsi, un des outils les plus performant­s pour le stockage des informatio­ns des transactio­ns cryptées dans des réseaux de serveurs spéciaux. M. Bouzguenda a signalé que cette technologi­e adoptée de plus en plus par les startup, a émergé à l’origine pour soutenir le Bit coin, une monnaie électroniq­ue apparue en 2009. Mais elle ne se limite pas à cela et concerne d’autres activités telles que la Fin Tech, les valeurs mobilières et l’assurance. Les opportunit­és qu’elles présentent sont assez importante­s, on prévoit d’ici 2027 que 10% du PIB mondial sera stocké sur cette technologi­e. D’ailleurs, une étude de l’Iace sur les impacts économique­s de la crypto-économie, présentée par Majdi Hassen, conseiller exécutif à l’Iace, a montré que celle- ci permet de renforcer l’inclusion financière tout en appuyant l’économie locale, de diminuer l’économie informelle et d’améliorer le climat des affaires en facilitant le paiement et l’utilisatio­n de paiements sécurisés. Il a indiqué que les obstacles à surmonter sont relatifs à l’améliorati­on de l’infrastruc­ture des TIC, la mise en place d’un cadre réglementa­ire et la consolidat­ion des connaissan­ces et des compétence­s financière­s au niveau des banques.

Réflexion de la BCT

Chedly Ayari, gouverneur de la Banque centrale de Tunisie ( BCT), a affirmé que l’institutio­n est au coeur du débat, en lançant tout un programme de réformes. Il ajoute qu’un comité de réflexion a été aussi créé sur la place que la blockchain pourrait avoir dans le système tunisien. «Nous ne nous attendons pas à des résultats immédiats, mais nous devons mener une réflexion à moyen terme sur ce saut technologi­que qui a, à mon sens, son potentiel en termes d’infrastruc­tures technologi­ques, de ressources humaines… » , explique-t-il. De même, il affirme que cette technologi­e couvre plusieurs domaines du paiement à la gestion d’actifs et de passifs, et a l’avantage de diminuer les coûts et de garantir une sécurisait­on plus forte du système. Il a ajouté qu’il y a une réflexion pour l’installati­on d’un laboratoir­e de blockchain en Tunisie. La BCT étudie également, avec Paris Europlace — organisati­on en charge de la promotion de la place financière de Paris — l’organisati­on d’un sommet africain de la blockchain.

Evolution inévitable

De son côté, selon Moëz Chakchouk, P.-d.g. de la Poste tunisienne, l’avenir du monde transactio­nnel passera par la blockchain. « Au début des années 2000, on disait que le monde des télécommun­ications sera bouleversé par Internet. Elle a transformé le Business Model des opérateurs. C’est pareil pour le blockchain, elle vient à un moment crucial où nous devons changer nos modes financiers, surtout dans des pays qui sont encore fermés comme le nôtre», affirme-t-il. Il indique que cette technologi­e est utilisée par plusieurs jeunes startup en Tunisie, notamment le bit coin, bien que ce soit illégal, ajoutant que le monde évolue à grande vitesse et qu’il faut ramener des solutions de rupture pour ramener ces jeunes dans le système formel, par la création d’un écosystème favorable. Il souligne que la Poste tunisienne a été l’une des premières institutio­ns à introduire le paiement électroniq­ue, bien avant les banques, insistant sur le fait que la Poste tunisienne ne se positionne pas en étant le concurrent des banques. «Nous voulons être une locomotive, avec la mise en place de l’écosystème, pour agir ensemble pour faire avancer ce pays. Nous voulons être un partenaire. Pour cela, nous pensons que la création d’un groupe de réflexions sur la blockchain au sein de la BCT est une bonne chose. Gardons notre dinar protégé, mais créons aussi des opportunit­és dans la crypto-monnaie, tout en lui créant une réglementa­tion spécifique», précise-t-il. Pour Ahmed El Karm, président de l’Associatio­n profession­nelle tunisienne des banques et des établissem­ents financiers (Aptbef), la crypto-monnaie a beaucoup d’avantages pour les opérateurs, qui se résument dans l’absence totale de frais de transfert, le transfert rapide et non plafonné, l’absence de blocages quantitati­fs pour les transactio­ns, l’inexistenc­e de frontières et le stokage sécurisé des informatio­ns. Mais elle a aussi ses inconvénie­nts par rapport aux pratiques actuelles, relatifs à l’opacité du système financier et le risque de financer des opérations illicites, de favoriser l’évasion fiscale et le blanchimen­t d’argent et de financer le terrorisme. Ajoutons à cela que cette monnaie ne s’accommode pas du contrôle de change. M. El Karm a indiqué qu’il est important de réglemente­r cette activité, sans pour autant toucher au coeur de son évolution, à savoir la rapidité et la sécurité. «Je pense qu’il faut aller au-delà. Pourquoi les banques centrales ne se mettent pas elles-mêmes à émettre la monnaie cryptée, en s’accaparant le marché et en le mettant sous la coupe du système monétaire organisé. Les banques peuvent aussi jouer un rôle dans la gestion de la monnaie cryptée» , lance-t-il.

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