Une question de mentalité
Encore une fois (une énième fois ?), l’organisation des JCC a soulevé un tollé de critiques. L’édition du cinquantenaire de 2016, on s’en souvient bien, avait paru détenir «un record». Or, de l’avis de tout le monde, jusque des invités, jusque des jurys, jusque des participants, l’édition 2017 aura «largement fait mieux». Un propriétaire de salle a même annoncé son «retrait». Et il n’a pas été le seul. Beaucoup ont dû rebrousser chemin, beaucoup ont coupé court. Tout bonnement. Les causes vous arrachent le même soupir, le même sourire amer. Cela se passe uniquement aux entrées. Là où il y a régulièrement bousculade. Et, presque toujours, un nombre d’invités supérieur à celui des détenteurs de billets. A notre connaissance, cela n’a jamais lieu à Cannes, à Venise, à Berlin, à Los Angeles (bien sûr), ou même à Marrakech et à Alexandrie. On campe, hélas encore, parmi le lot des festivals «émergents» qui ne savent pas gérer les places disponibles dans une séance de cinéma. Une déduction logique, de simple bon sens : cette pagaille qui vire au «folklore permanent» doit absolument prendre fin. On reproche déjà à notre pays ses nombreuses «maladresses économiques», là, il s’agit d’art et de culture, il s’agit de montrer une image de nous-mêmes, il s’agit d’exhiber un mode de vie ;il faudra bien se reprendre un jour, nous en avons l’aptitude , et puis programmer une semaine de films, gérer des flux inhabituels de spectateurs, une fois l’an, n’est tout de même pas sorcier ! Les gens de la profession invoquent évidemment la question des moyens. Ils rappellent à la pénurie des salles, à leur vétusté. Ils rappellent aussi à l’extrême modicité des budgets. Aucune objection làdessus. La question, néanmoins, est aussi une question de mentalité. Dans tous les grands événements artistiques, aujourd’hui, la rigueur de l’organisation fait le plus souvent défaut. On le voit à «Carthage», l’été, on le voit en toute grosse manifestation, les billetteries ont beau être informatisées, surveillées de près, les privilèges jouent toujours, les affinités, les gratuités. Nous aurons les salles de la Cité de la culture à partir de 2018. Pour les cinéastes comme pour le public cinéphile, pour les JCC, ce sera un vrai soulagement. Mais que vaut une infrastructure sans esprit adéquat ? A être juste, la Cité de la culture n’arrangera pas les problèmes d’organisation des JCC (comme d’autres grandes joutes) ipso facto, comme «à la parade», en «un tour de magie». Il y aura d’autres valeurs, d’autres compétences à solliciter, il y aura de mauvaises habitudes à effacer par-dessus tout. «Une superstructure qui transforme les têtes», disait Gramsci. Tant à faire encore, soyons prudents.
Nous aurons les salles de la Cité de la culture en 2018. Pour les cinéastes, pour le public cinéphile, pour les JCC ce sera un soulagement. Mais que vaut une infrastructure sans esprit adéquat ? …Il y aura d’autres valeurs, d’autres compétences à solliciter. Il y aura de mauvaises habitudes à effacer par-dessus tout. «Une superstructure qui transforme les têtes» disait Gramsci.