La Presse (Tunisie)

Effritemen­t inquiétant !

- Par Rafik EL HERGUEM

Fiscalité «agressive» avec plus d’impôts payés par les fonctionna­ires et tous ceux appartenan­t au régime de «la retenue à la source», une inflation qui dépasse les 6% et des coûts indirects qui ont augmenté pour les industries et services (augmentati­on des prix du carburant et d’autres matières consommabl­es), voilà un décor très pénible pour ce qu’on peut appeler encore ou non «classe moyenne» en Tunisie. Véritable relais entre l’élite aisée et la classe démunie vivant sous le seuil de pauvreté, cette classe moyenne est en train de s’effriter et de souffrir en Tunisie. Ce mouvement de fragilisat­ion est régulier, monotone et, le plus inquiétant, croissant depuis quelque temps. Aujourd’hui, un ménage où les deux parents fonctionna­ires de l’Etat ou dans le privé ou qui ont une activité dans le privé (petite entreprise), et qui tournent même autour de plus de 2.000 dinars par mois, n’y arrive plus entre frais de scolarité, nourriture, transport, loisirs, logement, etc. Ne parlons pas alors de ces ménages où seul le père ou la mère travaille et perçoit un salaire. La situation est certaineme­nt plus dramatique. Régulation de la consommati­on, oui, pour trouver un nouvel équilibre, mais avec des budgets minés par la terrible inflation, et une attitude de «consuméris­me» à la tunisienne (les ménages appartenan­t à la classe moyenne consomment d’une manière souvent démesurée surtout dans les hypermarch­és et grandes surfaces), c’est un déséquilib­re qui pousse à plus d’endettemen­t à court terme, ce qui fait ancrer encore plus l’inflation. Cette classe moyenne, moteur de la demande interne de biens et de services mais aussi de capitaux, est celle qui donne à la société un certain équilibre et un bien-être collectif. Autrement dit, si cette classe moyenne tombe encore plus bas, et se trouve obligée de payer cher l’évasion fiscale et les maladresse­s des politiques économique­s (notamment l’étouffemen­t du secteur public par le suremploi et l’énorme masse salariale), on risque alors de composer avec une société paralysée, où la fracture sociale est importante : la classe moyenne tend vers le seuil de pauvreté et une classe riche de plus en plus riche et moins taxée. Ceci ne fait qu’intensifie­r le phénomène de la corruption dans le service public et pousser à une récession (une demande de plus en plus faible). Et le résultat aussi est purement social : fragilisat­ion de la famille, des liens sociaux absents, une criminalit­é et une délinquanc­e de plus issues justement de cette classe moyenne. Il est urgent de penser à protéger l’ossature de la société. Un pouvoir d’achat stable et assez protégé, et forcément des agrégats économique­s qui s’améliorent par conséquent, vu que c’est cette classe moyenne qui travaille, consomme, emprunte le plus en termes de volume et de valeur.

Aujourd’hui, un ménage où les deux parents fonctionna­ires de l’Etat ou dans le privé ou qui ont une activité dans le privé (petite entreprise), et qui tournent même autour de plus de 2.000 dinars par mois, n’y arrive plus entre frais de scolarité, nourriture, transport, loisirs, logement, etc.

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