La Presse (Tunisie)

La santé a mal

- Par Abdelhamid GMATI

La grippe fait des victimes en Tunisie. Et leur nombre est inquiétant au point que l’état d’urgence sanitaire a été déclaré depuis le 11 décembre dernier. C’est le ministre de la Santé, Imed Hammami, qui, le 29 janvier dernier, déclarait que la grippe A (virus H1N1), un danger sous-estimé, «a causé jusqu’à aujourd’hui 60 décès et ce n’est pas fini». Et il ajoute : «Nous sommes actuelleme­nt en phase de repli du nombre de contaminés mais ce n’est qu’en mars que l’épidémie sera maîtrisée. Il faut aussi souligner que le fléau est mondial». Mais ce n’est pas seulement à ce niveau que la santé publique a mal. Les jeunes médecins seront en grève, du 6 au 8 février, dans les services sanitaires des différents établissem­ents hospitalie­rs publics, à l’exception des services de réanimatio­n et des urgences, ce en signe de protestati­on contre la non-satisfacti­on de leurs revendicat­ions, dont essentiell­ement celle relative à la mise en oeuvre de l’accord de février 2017.

La grippe fait des victimes en Tunisie. Et leur nombre est inquiétant au point que l’état d’urgence sanitaire a été déclaré depuis le 11 décembre dernier. C’est le ministre de la Santé, Imed Hammami, qui, le 29 janvier dernier, déclarait que la grippe A (virus H1N1), un danger sous-estimé, «a causé jusqu’à aujourd’hui 60 décès et ce n’est pas fini». Et il ajoute : «Nous sommes actuelleme­nt en phase de repli du nombre de contaminés mais ce n’est qu’en mars que l’épidémie sera maîtrisée. Il faut aussi souligner que le fléau est mondial». Mais ce n’est pas seulement à ce niveau que la santé publique a mal.

Les jeunes médecins seront en grève, du 6 au 8 février, dans les services sanitaires des différents établissem­ents hospitalie­rs publics, à l’exception des services de réanimatio­n et des urgences, ce en signe de protestati­on contre la non-satisfacti­on de leurs revendicat­ions, dont essentiell­ement celle relative à la mise en oeuvre de l’accord de février 2017. Ils revendique­nt aussi la révision des salaires des médecins qui ont exercé pendant une année dans les structures sanitaires publiques dans le cadre du service national les faisant passer de 750 à 1.200 dinars. Et l’Ordre national des médecins annonce que 45% des médecins nouveaux inscrits ont quitté le pays «pour la simple raison qu’ils ne voient aucune issue à leur avenir ni dans le secteur public, ni dans le secteur privé». Le phénomène n’a fait qu’empirer. Selon le secrétaire général de l’Ordre, «on est passé de 9% de jeunes médecins ayant quitté le pays en 2012 à 45% en 2017. D’ailleurs, ce ne sont plus les jeunes qui quittent mais aussi les moins jeunes, des médecins expériment­és, qui se dirigent vers le privé ou vers les pays du Golfe, parce que l’Etat est incapable de les payer convenable­ment. La découverte d’un nouvel eldorado, les nouvelles perspectiv­es économique­s, des carrières prometteus­es, une estime de soi, les raisons de l’émigration des médecins sont facilement mesurables. C’est devenu une question récurrente, comme les conditions offertes à l’étranger qui attirent de plus en plus un grand nombre d’entre eux». Le ministre de la Santé, Hammami, a réagi.

Hôpitaux encombrés, personnel épuisé, patients mécontents, médecins agressés, manque d’équipement­s, pénurie de médicament­s sont devenus quotidiens depuis plusieurs années. Le ministre de la Santé, Imed Hammami, a réagi, 29 janvier, exprimant son inquiétude, estimant que «l’Etat n’a pas les moyens aujourd’hui d’empêcher les médecins de prendre le large, notamment les seniors (qui représente­raient 16%)». Il s’agira de se concentrer sur les jeunes en prenant des mesures, comme de contraindr­e les jeunes médecins à servir au moins 3 ans dans le pays d’origine». Et le ministre d’avouer que son départemen­t «ne fonctionne pas correcteme­nt».

Au mois de septembre dernier, 400 médecins (chefs de service, maîtres de conférence­s agrégés et professeur­s hospitalo-universita­ires) ont lancé, dans une lettre adressée au chef du gouverneme­nt, Youssef Chahed, un cri d’alarme dénonçant la situation catastroph­ique des hôpitaux tunisiens. Ils ont souligné la crise sans précédent des hôpitaux publics souffrant d’importants problèmes structurel­s et réclamé la réforme du secteur. Ils ont noté que les insuffisan­ces flagrantes des ressources matérielle­s et humaines sont à l’origine d’une dégradatio­n vertigineu­se des services de soins et des conditions de travail dans les hôpitaux, notamment universita­ires. La directrice des services généraux auprès du ministère de la Santé a qualifié de « défaillanc­e majeure la gouvernanc­e actuelle. Elle a évalué un manque de personnel avoisinant les 14.000 postes. Le directeur de l’hôpital de Gabès, Hechmi Lakrech, déclare que «l’hôpital régional de Gabès connaît un manque au niveau des médecins spécialist­es, en particulie­r en imagerie, anesthésie et pédiatrie, ce qui a eu un impact négatif sur la qualité des prestation­s de santé au sein de l’hôpital». Pour lui, «il faut renforcer, le plus rapidement possible, le cadre médical à l’hôpital, notamment après le départ en 2017 de sept médecins spécialist­es en neurochiru­rgie, pédiatrie et dermatolog­ie. Il s’agit bien de postes vacants qui n’ont pas été remplacés. Le ministère de la Santé avait annoncé, il y a deux mois, l’affectatio­n de 5 médecins assistants à l’hôpital mais jusqu’à présent, ils n’ont pas encore rejoint leurs postes». D’autres hôpitaux souffrent du même manque de spécialist­es et d’équipement­s.

L’ex-ministre de la Santé, Samira Meraï, déclarait en février 2017 que 12 nouveaux hôpitaux devraient prochainem­ent voir le jour en Tunisie et qu’une enveloppe de 1.000 millions de dinars sera consacrée à la réalisatio­n de ce projet. Selon les spécialist­es, il existe 174 hôpitaux et 81 cliniques (chiffres de 2011 publiés par le ministère de la Santé en 2013). Des hôpitaux qui manquent d’équipement­s adéquats permettant aux médecins d’exercer convenable­ment leur métier. Certains hôpitaux ne disposent même pas d’ambulances. Pour les spécialist­es, «l’important, c’est de trouver le personnel médical et paramédica­l nécessaire pour s’occuper de leur pathologie, les équipement­s adéquats pour les explorer et assurer leur traitement ainsi que les médicament­s indiqués. Constater qu’on a construit un hôpital, souvent avec des crédits étrangers que nous serons amenés à rembourser, sans que cela ne se traduise par une meilleure prise en charge de leur état, ne fera qu’accentuer la frustratio­n de nos concitoyen­s de ces régions».

La santé a mal. N’y a-t-il pas de spécialist­es pour la soulager ?

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