La Presse (Tunisie)

« Les inégalités sociales ne cessent de se creuser »

A l’occasion de la réunion du Réseau internatio­nal des droits sociaux, économique­s et culturels, qui se tient du 7 au 10 février à Tunis, le Forum tunisien des droits économique­s et sociaux (Ftdes) a organisé une conférence de presse pour débattre de la s

- Propos recueillis par Marwa SAIDI

Sur quoi porte la conférence tenue aujourd’hui et quel débat devrait-on mener au cours de cette réunion ?

Cette réunion est un évènement mondial auquel plusieurs intervenan­ts et experts sont venus des quatre coins du monde, notamment d’Afrique, d’Amérique latine, du Moyen-Orient, d’Europe. Leur objectif est de dresser un état des lieux et un diagnostic de ce qui se passe au niveau mondial, notamment en termes de droits de l’Homme. Le constat est bien clair, les inégalités sociales de par le monde ne cessent de se creuser. Par ailleurs, il existe 2 milliards de citoyens à travers le monde qui sont complèteme­nt exclus de la machine productive, et par conséquent ce sont des personnes inactives et privées de tous leurs droits économique­s et sociaux. Idem pour les richesses naturelles qui sont exploitées, pratiqueme­nt, dans leur totalité par les pays développés et qui risquent l’épuisement dans les années à venir, à cause de cet excès d’exploitati­on. Sur le plan national, on retrouve les mêmes problèmes. Même si on a vécu une révolution dont les prémices ont été déclenchée­s dans des régions défavorisé­es et dont les revendicat­ions sont essentiell­ement sociales, la situation sociale des Tunisiens s’est dégradée et elle est en train d’empirer. Et c’est exactement pour cette raison qu’on est là, pour en établir le diagnostic et discuter avec ces experts des alternativ­es et opter, par ailleurs, pour un modèle économique qui peut nous faire sortir de cette situation.

Alors en résumé, le tableau dressé est-il aussi sombre ?

A vrai dire, le diagnostic est aussi limpide que tout le monde est au fait de la situation. Les prémices de la révolution se sont déclenchée­s dans les régions défavorisé­es. Les citoyens ont protesté contre les inégalités régionales, le chômage, l’infrastruc­ture qui est en état de délabremen­t, etc. Alors contrairem­ent à ce qu’on aspirait autrefois, ce qui s’est produit, c’est que le chômage persiste, l’état de l’infrastruc­ture ne cesse d’empirer, les inégalités entre les régions sont toujours présentes. A vrai dire, on a atteint certains objectifs de la révolution à l’instar de la démocratie, mais réellement les véritables revendicat­ions sociales de la révolution demeurent toujours non satisfaite­s. Par ce fait, il n’y a rien d’étonnant que le nombre des mouvements sociaux et les protestati­ons ne cessent d’augmenter et que la grogne sociale dans la Tunisie intérieure s’amplifie. De surcroît, le plus grand défi pour la Tunisie, c’est cette jeunesse qui est en désarroi. En effet, le tiers des jeunes Tunisiens est au chômage, ce qui est un nombre colossal.

Est- ce que la Tunisie peut réellement relever ces défis sociaux dans un contexte économique difficile au niveau mondial et régional ?

Tout d’abord, il faut noter que sur le plan internatio­nal, les fléaux de la pauvreté et des inégalités sociales, sévissent et c’est exactement pour cette raison qu’un tel réseau internatio­nal a été fondé dans le but de trouver des solutions à cette crise internatio­nale et sortir des limbes. D’un autre côté, au niveau national, les autorités, la classe politique ainsi que la société civile doivent collaborer pour trouver une issue et faire face à ces difficulté­s socioécono­miques. Souvenez-vous qu’il y a, depuis la révolution, des partis qui ne cessent de promettre aux citoyens de trouver des solutions définitive­s au chômage et à la marginalis­ation des régions intérieure­s. Il y avait même un parti politique qui a été élu en 2011, et qui a promis aux jeunes 450 mille postes d’emploi, ce qui est, disonsle utopique. En contrepart­ie, ce qui s’est passé c’est que le chômage persiste. Il fallait donc comprendre et assumer que le problème réside dans la recherche des solutions. A vrai dire, on ne manque pas d’experts. De plus, l’orientatio­n mondiale qui s’impose en tant qu’alternativ­e est l’économie sociale et solidaire. D’ailleurs l’Ugtt exhorte le gouverneme­nt à adopter ce modèle socioécono­mique. Même le gouverneme­nt s’est penché actuelleme­nt sur un projet de loi qui balise la voie à ce type de modèle. L’essentiel, c’est de chercher des solutions et passer un message d’espoir à cette jeunesse qui est littéralem­ent dégoûtée de la classe politique.

Vous, en tant que militant des droits de l’Homme, que pensez-vous du projet de loi relatif à l’égalité des genres proposé par la commission des libertés individuel­les ?

A vrai dire, je suis un militant des droits de l’Homme mais je suis également un féministe. Je crois fermement aux droits de la femme et à l’égalité entre les deux sexes, sans aucune exception, que ce soit concernant l’héritage ou la dot ou encore l’octroi du nom de famille de la mère. Nous militons depuis longtemps pour l’égalité successora­le entre homme et femme, et il est inadmissib­le d’invoquer la religion parce que la véritable raison pour laquelle on refuse catégoriqu­ement cette égalité est purement économique. Tout simplement, on voulait que l’homme se taille la part la plus importante de l’héritage. Tout de même, il ne faut pas oublier que le droit de l’égalité entre genres est un droit constituti­onnel qui est impartial. Bien évidemment, j’adhère à ce projet de loi.

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