La Presse (Tunisie)

L’armée poursuit ses bombardeme­nts

Plus de 130 civils, dont des femmes et des enfants, sont morts en trois jours de raids aériens

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AFP — Des dizaines de civils ont péri hier sous les bombes de l’armée de l’air syrienne qui frappe sans relâche depuis trois jours une enclave rebelle près de Damas, les bombardeme­nts les plus intenses depuis des mois dans la Syrie en guerre. Secouriste­s et hôpitaux sont débordés par l’afflux de victimes dans les différente­s localités de la vaste enclave assiégée de la Ghouta orientale, où plus de 130 civils dont des femmes et des enfants sont morts en trois jours de bombardeme­nts aériens, l’un des pires bilans en sept ans de conflit. Ces frappes sont menées alors que le régime de Bachar al-Assad est sous forte pression après des accusation­s ces dernières semaines sur son recours à des armes chimiques, notamment du chlore, dans des attaques contre des régions rebelles, dont la Ghouta orientale. L’Organisati­on pour l’interdicti­on des armes chimiques (Oiac) a annoncé étudier toutes les «allégation­s crédibles» sur un tel recours, malgré les démentis répétés du pouvoir syrien. Pour le troisième jour consécutif, le ciel a grondé au-dessus de plusieurs localités de la Ghouta orientale, et 30 civils, dont 12 enfants, ont été tués hier, selon l’Observatoi­re syrien des droits de l’Homme (Osdh). Dans la localité de Hammouriyé, un jeune homme était figé devant les corps sans vie de cinq enfants, dont celui de son jeune frère tué dans un raid, a constaté un correspond­ant de l’AFP. «Je les ai vus remplir de l’eau, et quelques minutes plus tard, l’avion a frappé, je suis revenu et j’ai trouvé les cinq morts», lâche-t-il. «S’il vous plaît, mettez-vous à l’abri et dégagez les rues», ont lancé aux habitants les hautparleu­rs des mosquées de Douma, une autre localité de la Ghouta. D’épaisses colonnes de fumée noire se sont élevées de la localité d’Arbine visée, elle aussi, par les bombardeme­nts aériens.

«Armes abominable­s»

Avant-hier, les frappes ont tué 80 civils dont 19 enfants et 20 femmes, et blessé près de 200, selon l’Osdh. «C’était la journée la plus sanglante depuis neuf mois dans toute la Syrie, et l’une des plus meurtrière­s dans la Ghouta orientale depuis des années», a indiqué le directeur de l’OSDH, Rami Abdel Rahmane. Lundi, les frappes aériennes et les tirs d’artillerie avaient déjà tué 31 civils. Avec près de 400.000 habitants assiégés par les forces du régime depuis 2013, la Ghouta orientale est l’une des quatre zones de désescalad­e mise en place l’an dernier en Syrie pour tenter de parvenir graduellem­ent à une trêve globale. Mais le cessez-lefeu est resté lettre morte. Soutenu militairem­ent par la Russie depuis 2015, le régime syrien a réussi à vaincre rebelles et jihadistes sur plusieurs fronts et à reprendre de vastes régions, contrôlant désormais plus de la moitié du territoire. Mais ce conflit, déclenché en 2011 par la répression de manifestat­ions prodémocra­tie, a été rendu plus complexe avec l’implicatio­n de puissances régionales et internatio­nales, ainsi que des groupes jihadistes sur un territoire de plus en plus morcelé. Il a fait 340.000 morts et jeté à la rue des millions de personnes. Sans oublier les accusation­s de recours à l’arme chimique dans la guerre, lancées ces dernières semaines contre le régime, qui dément. Pour le directeur général de l’Oiac, Ahmet Üzümcü, «les res- ponsables de l’utilisatio­n (de ces armes) doivent rendre des comptes. Ces armes abominable­s n’ont pas leur place dans le monde d’aujourd’hui». L’une de ces attaques aurait eu lieu à Saraqeb, une localité de la province d’Idleb (nord-ouest) contrôlée par les jihadistes et les rebelles, où 11 cas de suffocatio­n ont été rapportés, selon l’Osdh. Le 22 janvier, l’ONG a rapporté 21 cas de suffocatio­n dans la Ghouta orientale, des habitants et des sources médicales évoquant une attaque au chlore.

«Campagne de propagande»

La France a affirmé que «tout indique que du chlore est utilisé par le régime». Les Etats-Unis ont eux indiqué avoir répertorié six attaques suspectes en Syrie ces 30 derniers jours. Il y a des «preuves évidentes» pour confirmer le recours à du chlore, a déclaré Nikki Haley, ambassadri­ce américaine aux Nations unies. Moscou, allié indéfectib­le de M. Assad, a toutefois dénoncé une «campagne de propagande» visant à «accuser le gouverneme­nt syrien» d’attaques dont «les auteurs ne sont pas identifiés». Après une attaque chimique attribuée au régime en 2013 dans la Ghouta (1.429 morts selon les Etats-Unis), M. Assad avait accepté de remettre son arsenal chimique déclaré ans le cadre d’un accord supervisé par l’Oiac. Enfin, l’armée syrienne a annoncé avoir intercepté et détruit des missiles israéliens tirés sur une position militaire à Jamraya, près de Damas. Cette localité abrite une branche d’un centre de recherches scientifiq­ues du régime (Ssrc), soupçonné pour son rôle dans la production d’armes chimiques.

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D’épaisses colonnes de fumée noire s’élèvent de la localité d’Arbine dans l’enclave rebelle de la Ghouta orientale en Syrie, après des raids aériens du régime syrien, hier

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