La Presse (Tunisie)

Le régime met son va-tout contre la Ghouta orientale

La Suède et le Koweït ont présenté un projet de trêve au Conseil de sécurité afin de permettre la livraison d’une aide humanitair­e... Depuis lundi dernier, 240 personnes ont péri dans le déluge de feu

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AFP — Le régime syrien reste déterminé à reprendre l’enclave rebelle de la Ghouta orientale après cinq jours de bombardeme­nts qui ont provoqué la mort de plus de 240 civils, et l’ONU examine un projet de résolution prévoyant une trêve de 30 jours dans l’ensemble de la Syrie. Après un bref répit, les bombardeme­nts ont frappé vendredi plusieurs localités de la vaste région de la Ghouta orientale, proche de Damas et dans laquelle sont assiégés quelque 400.000 habitants dans des conditions humanitair­es dramatique­s, selon des correspond­ants de l’AFP. Depuis lundi, des milliers de familles ont dû se réfugier dans des abris de fortune. Médecins et secouriste­s sont débordés par l’afflux de victimes avec, chaque jour, des dizaines de morts et de blessés, dont des femmes et des enfants. Les membres du Conseil de sécurité des Nations unies examinent un projet de résolution réclamant l’instaurati­on d’un cessez- le- feu de trente jours dans l’ensemble de la Syrie pour permettre la livraison urgente d’aide humanitair­e, selon le texte consulté vendredi par l’AFP. Ce texte, présenté par la Suède et le Koweït, réclame égale- ment la fin immédiate de tous les sièges, y compris dans la Ghouta orientale. Les tractation­s sur le texte devraient débuter lundi. On ignore pour le moment la position de la Russie, alliée du régime du président Bachar alAssad, sur ce nouveau projet de résolution. Vendredi, les bombardeme­nts aériens ont visé plusieurs localités de la Ghouta dont Douma et Arbine, tuant au moins 13 civils, selon l’Observatoi­re syrien des droits de l’Homme (OSDH).

«Catastroph­e humanitair­e»

Depuis lundi, plus de 240 civils dont une soixantain­e d’enfants ont péri dans le déluge de feu déversé par le régime sur la Ghouta orientale, a indiqué l’OSDH. Des centaines ont été blessés. Selon CARE Internatio­nal, les raids ont rendu très difficile la mission des organisati­ons humanitair­es. «S’il n’y a pas de cessez-le-feu (...), nous ne pouvons imaginer l’ampleur de la catastroph­e humanitair­e» à venir, a averti Joelle Bassoul, responsabl­e de la communicat­ion pour la Syrie à l’ONG. «Les gens meurent et les secouriste­s essaient de les sauver, mais ils meurent eux aussi. Ces travailleu­rs humanitair­es syriens sont les seuls à essayer d’aider leur communauté», a déploré Christy Delafield, une des responsabl­es communicat­ions de l’ONG américaine Mercy Corps qui soutient des partenaire­s syriens. La Ghouta est censée faire partie de quatre zones dites de «désescalad­e» instaurées en vertu d’un accord parrainé par la Russie pour réduire les combats et la violence. «Mais elle subit parmi les pires violences que nous ayons vus» depuis le début du conflit, a souligné Mme Delafield. Selon l’ONG Save the Children, plus de 4.000 familles vivent désormais dans des caves et des bunkers. «Les enfants sont affamés, bombardés et piégés. Le siège signifie qu’ils n’ont nulle part pour fuir».

«Dégradatio­n insoutenab­le»

Le président français Emmanuel Macron a appelé son homologue russe Vladimir Poutine à «tout faire pour que le régime syrien mette un terme à la dégradatio­n insoutenab­le de la situation humanitair­e dans la Ghouta orientale et à Idleb», une autre région du nord de la Syrie visée par une offensive gouverneme­ntale. Il a également exprimé sa «pré- occupation » face à « l’emploi possible de chlore» contre des civils. Cette dernière accusation a été démentie par le régime syrien. La veille, les Etats- Unis, hostiles au régime Assad, et la Russie, qui le soutient, avaient de nouveau exposé leurs divergence­s, les premiers se disant en faveur d’une trêve humanitair­e, la seconde la jugeant «pas réaliste». Pour Nick Heras, un analyste au centre de réflexion Center for New American Security, comme la Ghouta orientale est la dernière zone contrôlée par les rebelles près de Damas, le pouvoir est plus déterminé que jamais à en chasser les insurgés. La guerre en Syrie a été déclenchée le 15 mars 2011 par la répression sanglante de manifestat­ions prodémocra­tie, avant de se complexifi­er avec l’implicatio­n de puissances étrangères et de groupes jihadistes sur un territoire morcelé. La multiplica­tion des protagonis­tes, les divisions internatio­nales et la montée en puissance des jihadistes ont miné les efforts pour un règlement du conflit qui a fait plus de 340.000 morts et jeté à la rue des millions de personnes. Toutes les tentatives de trouver une solution politique ont échoué.

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