La Presse (Tunisie)

Des ovules humains cultivés jusqu’à maturité

Pour la première fois, des ovules ont été développés in vitro dans un laboratoir­e. Cette avancée pourrait permettre de préserver la fertilité de femmes atteintes d’un cancer.

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Des scientifiq­ues britanniqu­es et américains ont cultivé des ovules humains en laboratoir­e jusqu’à leur pleine maturité, c’est-à-dire prêts à être fécondés. C’est une première qui offre une percée potentiell­e pour préserver la fertilité féminine, selon une étude. C’est «la première fois» que des ovules humains sont développés in vitro dans un laboratoir­e, depuis leur stade le plus précoce jusqu’à leur pleine maturité, a souligné dans un communiqué l’université d’Edimbourg (Royaume-Uni) qui a conduit, avec des chercheurs de New York, l’étude parue dans la revue Molecular Human Reproducti­on. Cette avancée, étape préalable à toute tentative de fécondatio­n ultérieure, pourrait avoir des applicatio­ns pour préserver la fertilité de filles atteintes d’un cancer. L’intérêt, pour celles qui vont suivre un traitement comme la chimiothér­apie, serait d’éviter la réimplanta­tion de tissu ovarien préalablem­ent prélevé, et ainsi le risque de réintrodui­re le cancer. À la place, les ovocytes immatures récupérés à partir d’un morceau d’ovaire des patientes pourraient être conduits à maturité en laboratoir­e. Ils seraient stockés pour être fécondés plus tard. Pour l’étude, les chercheurs ont mis au point des substances appropriée­s (des milieux de culture en langage technique) dans lesquelles les ovocytes ont été cultivés pour soutenir chaque étape de leur développem­ent. Des scientifiq­ues avaient déjà réussi auparavant cette maturation en laboratoir­e avec des ovules de souris pour produire une progénitur­e vivante. D’autres avaient fait mûrir des ovules humains à un stade de développem­ent relativeme­nt tardif.

«Intéressan­t, mais...»

«Le fait de pouvoir développer pleinement des ovules humains en laboratoir­e pourrait élargir la portée des traitement­s de fertilité disponible­s et nous travaillon­s maintenant à optimiser les conditions favorisant leur développem­ent. Nous espérons également savoir, sous réserve d’approbatio­n réglementa­ire, s’ils peuvent être fécondés», commente la professeur­e Evelyn Telfer, de l’université d’Edimbourg, qui a dirigé cette recherche. Le professeur Azim Surani, de l’Université de Cambridge, estime pour sa part que «les résultats rapportés dans l’étude sont intéressan­ts» . Mais, ajoute-t-il, «il reste beaucoup de travail avant de conclure qu’ils ont le potentiel d’être utilisés dans les cliniques» . Ce biologiste remarque également que «ces ovocytes sont plus petits que la normale» . Il pense qu’il pourrait être intéressan­t de tester leur développem­ent en essayant la fécondatio­n in vitro (FIV). Robin Lovell-Badge, de l’Institut Francis Crick, relève que la procédure est encore «vraiment très inefficace», avec, selon lui, seulement neuf cellules parvenues au stade d’ovules matures, sur un nombre élevé, et non précisé. Pour le Dr Channa Jayasena, du Collège impérial de Londres, il s’agit là d’ «un travail élégant, démontrant pour la première fois que les ovules humains peuvent être cultivés jusqu’à maturité dans un laboratoir­e» . Il y voit «une percée importante, qui pourrait offrir de l’espoir aux femmes infertiles» , mais «il faudra plusieurs années pour traduire cela en thérapie» , prévient-il.

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