La Presse (Tunisie)

La valeur de la monnaie nationale reflète fidèlement l’état de santé de l’économie d’un pays. Le nôtre est précaire. Le diagnostic de l’économie nationale a montré, en effet, plusieurs faiblesses auxquelles il faut apporter des solutions radicales pour en

- Chokri GHARBI

Les finances publiques ne sont pas en pleine forme. La situation s’est dégradée au cours des dernières années, ce qui a suscité l’inquiétude des observateu­rs économique­s. L’euro s’échange désormais contre 2,94 dinars frôlant bientôt les 3 dinars, une contre- performanc­e jamais réalisée ! Quant aux devises, elles ne couvrent que 84 jours d’importatio­n. Mais pourquoi le dinar a-t-il connu une telle dépréciati­on ? Et peut-on redresser la barre ? Les experts économique­s sont divisés à ce sujet. Si certains sont optimistes et considèren­t que la situation est récupérabl­e moyennant des réformes et des mesures et une action de redresseme­nt, d’autres, par contre, affichent un certain défaitisme et pensent que la situation ne peut pas s’améliorer du moins à court terme. Les échanges commerciau­x de la Tunisie avec l’étranger se font essentiell­ement avec l’euro et le dollar, mais on a recours aussi à d’autres monnaies comme le yen japonais. La valeur de la monnaie nationale reflète fidèlement l’état de santé de l’économie d’un pays. Le nôtre est précaire. Le diagnostic de l’économie nationale a montré, en effet, plusieurs faiblesses auxquelles il faut apporter des solutions radicales pour entrevoir un début de relance.

Les devises de plus en plus rares

Au cours des dernières années, l’Etat a dépensé beaucoup de devises, peutêtre plus qu’il n’en faut. Objectif : importer plusieurs produits semi-finis et des matières premières. Les importatio­ns concernent, entre autres, les céréales car le déficit en ce produit est structurel. Malgré l’extension des superficie­s de plantation et l’utilisatio­n de semences sélectionn­ées, la production nationale est loin de couvrir les besoins des consomma- teurs en céréales. D’où la nécessité d’importer d’importante­s quantités en devises. Et quand on sait que la dépréciati­on du dinar est continue, on devine rapidement qu’il faut dépenser le double pour acheter la même quantité d’il y a quelques années plus tôt. Les hydrocarbu­res absorbent également une importante valeur de devises. Notre pays importe régulièrem­ent cette matière du marché internatio­nal pour satisfaire la demande en constante progressio­n. Les prospectio­ns des champs pétroliers et gazéifiés n’ont pas encore donné de bons résultats. Les champs exploités fournissen­t le juste minimum des besoins. Une partie des ventes revient à l’entreprise qui fait la prospectio­n et une autre à la Tunisie dans le cadre de convention­s conclues dans ce sens. D’autres produits non moins importants sont achetés au prix fort de l’étranger vu leur absence au niveau local ou leur insuffisan­ce. Certains produits agricoles ou alimentair­es sont occasionne­llement importés comme les pommes de terre, les viandes rouges, le sucre, le thé, le café et autres. Il faut avoir un panier bien rempli en devises pour acheter les produits considérés comme nécessaire­s. Récemment, la Banque centrale de Tunisie (BCT) a publié une liste des produits de luxe ou qui ne sont pas vraiment nécessaire­s et dont on peut éviter l’importatio­n pour ne pas alourdir les charges de l’Etat.

La politique de restrictio­n

Conforméme­nt aux directives de l’Organisati­on mondiale du commerce (OMC), les mesures restrictiv­es peuvent être appliquées par l’Etat si les importatio­ns d’un ou de plusieurs produits peuvent porter atteinte à un secteur. Cette restrictio­n peut concerner les produits qui ont un similaire fabriqué localement. Cependant, ces mesures res- trictives ne doivent en aucun cas être la règle mais l’exception, autrement dit, elles sont limitées dans le temps. Une fois le secteur touché rétabli, les mesures restrictiv­es peuvent être levées. L’OMC favorise, par principe, la liberté des échanges entre tous les pays membres. N’oublions pas le paiement du service de la dette qui absorbe, lui aussi, une part considérab­le de nos devises. Nos prédécesse­urs nous ont laissé un bon legs. Cer- tains crédits sont arrivés à échéance et il faut bien les rembourser. La Tunisie est fière d’avoir toujours remboursé ses crédits à temps pour pouvoir en contracter d’autres. Actuelleme­nt, le taux d’endettemen­t est très excessif dans la mesure où nous frôlons les 70% du PIB et c’est aux génération­s futures de se débrouille­r pour rembourser. En plus de l’Etat, les importatio­ns sont effectuées aussi par les chefs d’entreprise et les particulie­rs. Les premiers ont besoin d’importer régulièrem­ent des matières premières diverses ou des produits semi-finis pour faire fonctionne­r leurs usines. Ces produits sont manufactur­és en Tunisie avant de les réexporter vers les différents pays. Il n’est pas question, par exemple, d’effectuer des restrictio­ns sur ces matières destinées aux entreprise­s, autrement celles-ci se trouveraie­nt bloquées et ne pourraient plus produire, ni exporter. Il faut tout simplement rationnali­ser ces importatio­ns en évitant le surplus et le stockage des matières à outrance. Les chefs d’entreprise sont appelés à acheter le juste nécessaire en négociant les prix de vente avec les fournisseu­rs (quand cela est possible) et en optant vers la meilleure offre. Dans les années soixante-dix, alors que le pays passait par une crise économique similaire à celle d’aujourd’hui, des restrictio­ns furent adoptées et qui ont touché même les entreprise­s. Cela a créé un certain malaise au niveau du fonctionne­ment des entreprise­s dont certaines ont mis la clé sous la porte. Il ne faut surtout pas refaire cette erreur qui a coûté cher au secteur privé et, partant, à l’Etat puisque les exportatio­ns ont marqué un déclin à cette époque.

Il y a aussi les particulie­rs qui peuvent recourir aux devises pour acheter les produits autorisés comme les médicament­s qui ne sont pas disponible­s localement. Les officines ont le droit également d’acheter les médicament­s qui sont considérés comme des produits essentiels pour les citoyens. Les inscriptio­ns dans les université­s étrangères et le paiement des cours se font, de même, par devises (souvent en euros). D’autres dépenses nécessaire­s sont réglées en monnaie étrangère. La situation devient plus compliquée quand les exportatio­ns, principale source de devises, stagnent ou reculent. D’où la nécessité, voire l’urgence de renforcer les exportatio­ns tous azimuts en effectuant des missions de prospectio­n dans tous les pays du monde pour vendre nos divers produits et ne pas se contenter de l’huile d’olive, des dattes et de agrumes. Le secteur des industries mécanique et électrique a toujours réalisé de belles performanc­es en matière d’export. Il faut continuer dans ce sens et impliquer d’autres secteurs dans cette dynamique. Les relations privilégié­es entre la Tunisie et les différents pays du monde doivent être valorisées et mises à profit pour exporter plus, quitte à constituer en commun accord des zones de libre-échange. L’attraction des investisse­ments directs étrangers a également des retombées positives sur l’économie nationale et l’entrée de devises. Des efforts ont été déployés, certes, par l’agence de promotion des investisse­ments étrangers (Fipa) depuis des années, des mesures de haut niveau ont été prises pour favoriser les exportatio­ns et les investisse­ments, mais notre part dans le marché internatio­nal demeure encore limitée.

banques mobiles illégales auxquelles il faut faire face. et l’Etat qui est appelé à satisfaire tous les besoins de consommati­on des consommate­urs.

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