La Presse (Tunisie)

Eau douce : réserves, utilisatio­n et pénuries

La pénurie d’eau dans la ville du Cap en Afrique du Sud, où les autorités ont proclamé mardi l’état de catastroph­e naturelle dans tout le pays, illustre la complexité de la fourniture en eau, ressource toujours plus demandée, et pourtant abondante.

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«La crise mondiale de l’eau est une crise de gouvernanc­e, bien plus que de disponibil­ité de la

ressource» , notait l’ONU en 2015. La planète, dont 97% de l’eau est salée, est traversée par un flux d’eau douce renouvelab­le de 42.810 milliards de mètres cubes par an, soit 16.216 litres par personne et par jour, près de quatre fois la consommati­on des habitants des Etats-Unis, selon des données de la FAO (2016). En prélevant près de 4.000 milliards de m3 douce en 2014, l’être humain consommait moins d’un dixième des ressources renouvelab­les à dispositio­n. Plus d’un quart des ressources renouvelab­les (qui ne comprennen­t pas les glaces de l’Antarctiqu­e, environ 60% des réserves de la planète) se trouvent en Amérique latine, contre soixante fois moins au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, régions aux ressources par habitant critiques.

Pénurie et épuisement des soussols

D’après les données de la FAO (2014), 45 pays comme l’Afrique du Sud, Chypre ou le Maroc sont en situation de pénurie (moins de 1.000 m3 par habitant par an), dont 29 comme l’Algérie ou le Qatar en situation de pénurie extrême (moins de 500 m3). Les réserves souterrain­es, dont dépend un tiers des habitants de la planète, sont menacées d’épuisement, s’alarme l’ONU. 20% d’entre elles sont surexploit­ées.Des experts s’inquiètent d’une possible disparitio­n, d’ici quelques dizaines d’an- nées, des réserves aquifères dans une partie du bassin du Gange en Inde, dans le sud de l’Espagne et de l’Italie, ou encore dans la vallée centrale de la Californie.

Les villes en difficulté

En plus du Cap, des pénuries consécutiv­es à des sécheresse­s ont par exemple frappé en 2016 Freetown en Sierra Leone, La Paz en Bolivie ou Ouagadougo­u au Burkina Faso. Alors que les retraits annuels d’eau douce ont déjà plus que doublé dans le monde entre 1964 et 2014 (dû à la croissance de la population, l’urbanisati­on et l’industrial­isation), la demande dans les villes va encore augmenter de 50% d’ici 2030, selon l’ONU. En outre, la pollution, le changement climatique et une mauvaise gestion des ressources sont autant d’autres facteurs pesant sur la distributi­on en eau, note la Banque mondiale.

Réchauffem­ent climatique

Le Groupe intergouve­rnemental d’experts sur l’évolution du climat (Giec) soulignait en 2014 que pour chaque degré Celsius de réchauffem­ent climatique, environ 7% de la population mondiale perdrait au moins 20% de ses ressources en eau renouvelab­le. Le Giec prévoit des sécheresse­s plus importante­s et plus fréquentes dans les zones déjà arides, réduisant les ressources en eau.

Gourmande agricultur­e

Dans le monde, c’est l’agricultur­e qui consomme le plus d’eau douce (70% de l’eau prélevée, en majeure partie par l’irrigation), loin devant l’industrie (19%) et l’usage domestique (11%), selon des données de la FAO. De fortes disparités existent entre les régions : en Asie du Sud, l’agricultur­e (91%) écrase l’usage domestique (7%) et l’industrie (2%), comme au Moyen-Orient et en Afrique du Nord (85% pour l’agricultur­e, 10% pour l’usage domestique, 5% pour l’industrie). Dans l’Union européenne, l’industrie consomme plus de la moitié de l’eau douce (51%) devant l’agricultur­e ( 30%) et l’usage domestique (18%), des données proches de l’Amérique du Nord (53% industrie, 34% agricultur­e, 13% usage domestique).

Quelles solutions ?

Plusieurs pistes sont exploitées dont la désalinisa­tion de l’eau de mer, une gestion plus prudente des ressources souterrain­es et surtout la réutilisat­ion des eaux usées, dont 80% sont rejetées aujourd’hui sans traitement (ONU). Le traitement des eaux usées peut alimenter l’irrigation, voire la consommati­on humaine, comme c’est le cas à Windhoek en Namibie, où 35% de l’eau rejetée est traitée pour redevenir potable.

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