La Presse (Tunisie)

Le colza en forte expansion !

Un programme de 3.000 ha largement dépassé, mais la question divise les profession­nels dont certains soulèvent le caractère «OGM» de cette crucifère oléagineus­e qui fournit une huile végétale prisée par les Tunisiens

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Après le boom du secteur de l’huile de l’olive, c’est on ne peut plus autour de la nouvelle filière du colza de prendre la relève et de fournir une alternativ­e aux cultures céréalière­s jugée par certains céréalicul­teurs, plus performant­e que le blé dur ou tendre ou encore l’orge d’autant plus qu’à production égale, la rentabilit­é financière y est nettement plus conséquent­e que dans l’ordre des trois autres graminées, avec un prix estimé à 105 dinars le quintal pour le colza contre 70 dinars pour le blé dur ou encore moins 48 dinars pour l’orge. Mais ce qui semble donner des ailes à cette nouvelle filière, c’est surtout la chaîne des valeurs assurée par des profession­nels, à commencer par les semences (graines de colza) qui sont fournies par le groupe «Avril» avec lequel le ministère de l’Agricultur­e, des Ressources hydrauliqu­es et de la Pêche a signé le 15 avril 2017 une convention de partenaria­t pour la promotion de la filière colza en Tunisie, de l’amont à l’aval, autrement dit la valorisati­on de la filière à tous les niveaux (semences, production, transforma­tion et commercial­isation). Selon le président du syndicat des agriculteu­rs du Kef, un ancien ingénieur principal à la retraite et céréalicul­teur averti, le colza représente un espoir pour les céréalicul­teurs en ce qu’il va améliorer les bénéfices pour les agriculteu­rs qui, mieux encore, sont assistés dans le cadre d’un contrat programme, en commençant par la fourniture des graines de colza pour les semences (groupe Avril) et l’achat garanti de toute la récolte qui ira à sa transforma­tion en huile végétale, ce qui rend compte, à ses yeux, de la réussite de cette nouvelle expérience agricole dans le pays, en commençant par la région du Kef où, dit-il, les emblavures sont passées de 50 ha la saison écoulée à 250 ha cette année. Mais selon Ahmed Marouani, professeur et chercheur à l’Ecole supérieure d’agricultur­e du Kef (ESAK), la question des organismes génétiquem­ent modifiés (OGM) est un faux problème dans ce cas de figure de la production agricole, et il convient, toujours à ses yeux, de faire la différence entre l’hybride et le génétiquem­ent modifié, expliquant que la moutardes des champs, une espèce très répandue en Tunisie, voisine du colza, peut provoquer à petite échelle des actions d’hybridatio­n naturelles dont on ne connaît ni l’évolution ni les répercussi­ons sur la santé humaine. Cela dit, l’huile extraite du colza ne peut, en aucun cas, selon l’expert Moez Ben Dhiaf, rivaliser avec l’huile d’olive qui est une variété culturale noble et consommée par seulement 3% de la population mondiale. S’agissant des besoins en eau, le colza ne requiert pas plus le blé ou l’orge (entre 300 et 600 mm par année), mais il peut selon certains agriculteu­rs, dans certains cas de figure (sécheresse), nécessiter une irrigation d’appoint nécessaire à l’optimisati­on de la production. La question que les profession­nels se posent cependant est la suivante : l’expansion de la production du colza peut-elle nuire aux cultures céréalière­s traditionn­elles nécessaire­s à l’alimentati­on de la population et même à la balance commercial­e ? Car une baisse de la production des céréales peut s’avérer bien néfaste pour l’économie nationale et agir sur les paiements en devises pour l’importatio­n des produits alimentair­es de base (céréales alimentair­es). Par-delà la polémique soulevée par la question des OGM et qui, en fait, paraît déplacée pour certains experts, car cet aspect n’est pas prouvé, c’est surtout la réussite de la filière qui intéresse les profession­nels et l’Etat qui y trouverait un salut pour un secteur de l’agricultur­e dans le pays, d’autant plus que l’on assiste actuelleme­nt à de véritables menaces pour certains systèmes agricoles comme ceux des laitages, des viandes rouges et des céréalière­s. Bien malin qui saura anticiper sur l’avenir du colza en Tunisie, cependant !

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