La solution n’est pas sécuritaire
Le 2e congrès national des mouvements sociaux, érigé en rendez-vous annuel incontournable, vient d’achever ses travaux dimanche dernier à Sousse, où pas moins de 150 acteurs y ont, volontiers, pris part. Tenu à l’initiative du Ftdes, celui qui chapeaute la dynamique associative dans les régions, ce congrès est toujours placé sous le même slogan, «Diversité, résistance et solidarité », devenu, d’ailleurs, sa devise nationale. Un tel travail en réseau semble, alors, lui donner raison d’être et de paraître comme cadre idéal du débat, à bien des égards. De par cette manière d’agir en collectif, le Ftdes tend à élargir sa ceinture d’appui et s’entourer d’une sorte de galaxie d’influents prêts à l’action. Surtout que les organisations adhérentes forment bel et bien un trait d’union, partagent le même credo révolutionnaire et défendent les mêmes causes sociales, en l’occurrence la dignité, la liberté, l’égalité, la justice sociale. Voire les fondamentaux du progrès, du développement régional et de l’emploi. Autant de revendications, aussi légitimes soientelles, qui avaient, ces dernières années, attisé le feu des protestations dans plusieurs régions, quitte à embraser tout le pays. Soit 10.452 mouvements sociaux enregistrés l’année écoulée, presque le double par rapport à 2015, et un peu plus de ceux survenus en 2016 (8.713). On évoque, pour rappel, les événements d’El Kamour et du bassin minier, les multiples grèves des ouvriers des chantiers, des ouvrières du textile, les sinistrés de la pollution à Gabès, la mobilisation des jeunes médecins, ainsi que l’escalade des enseignants et des diplômés au chômage. A cela s’ajoutent les campagnes, à n’en plus finir, des facebookers, menées respectivement contre la loi de réconciliation (Manich Msameh), la loi de finances 2018 (Fech Nestanaou) et contre le mutisme du gouvernement face aux appels des familles des martyrs et blessés de la révolution (Lâchez la liste).
Dialogue en vedette
En revanche, tous ces mouvements n’ont pas, jusque-là, réussi à dissuader le gouvernement de sa fuite en avant. Pire, ils ont été, à maintes fois, muselés et brutalement réprimés par la police. Ce qui a entraîné des poursuites judiciaires contre des centaines de jeunes manifestants. «Certes, la colère ne va pas s’apaiser, tant que leurs demandes ne sont pas satisfaites», affirment les congressistes, dans «la déclaration finale de Sousse», après trois jours d’échange et de concertations. Ils dénoncent ce recours à la force qui ne fait, à leurs yeux, qu’aggraver la situation et conduire le pays vers l’inconnu. «La solution n’est jamais sécuritaire. Le dialogue l’emporte», plaidentils encore. Et de juger que la coalition au pouvoir, à savoir Ennahdha et Nida, s’est, plutôt, montrée, aujourd’hui, incapable d’ouvrir tous les dossiers et venir à bout des problématiques socioéconomiques. La crise de santé, le bras de fer ministère-enseignants et la prolifération de la corruption ne sont, alors, que la preuve d’une politique d’Etat mise à l’échec.
Et pour cause. La Coordination nationale des mouvements sociaux veut qu’un changement immédiat soit opéré, à même d’orienter les stratégies vers davantage de réformes globales touchant à l’entreprise publique, à l’école, à l’enseignement supérieur et à la santé de base. D’autant que le partenariat publicprivé ne doit, en aucun cas, tout mettre aux enchères. «L’entreprise publique, si vitale, est un acquis inaliénable», affirment-ils. Pour eux, la bataille est bien celle des droits. Quatre objectifs à retenir, au terme de leurs travaux. Tendance, tout d’abord, vers une mobilisation massive des forces vives de la société dans le cadre d’un large réseau associatif encore plus efficace. Le tout s’organise sous la houlette de ladite coordination nationale. Secundo, le renforcement du rôle du comité national de la défense des mouvements sociaux, soit plus d’avocats pour les soutenir. Tertio, penser à des alternatifs du développement susceptibles de créer les richesses et générer les emplois. L’économie sociale solidaire demeure, à l’en croire, un modèle de choix auquel adhèrent tous les participants. Quarto, militer pour vaincre les corrompus, afin de sauver notre économie. Le gouvernement devrait, lui aussi, réviser ses comptes. Sinon, la trêve sociale qu’on nous demande n’aura pas du sens, lit-on en ultime déclaration.