La Presse (Tunisie)

Le Parti des travailleu­rs fait barrage à l’arrestatio­n

«Lula doit résister jusqu’à la fin. Il ne s’enfuira pas et le peuple ne le livrera pas. Nous allons fermer les rues, rester devant la porte et nous devrons affronter la police», affirme un syndicalis­te

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AFP — L’ex-président brésilien Lula, censé se présenter aux autorités hier pour purger une peine de 12 ans de prison pour corruption, devait décider s’il acceptait de le faire de lui-même, à six mois d’une élection présidenti­elle pour laquelle il est donné favori. Sur son site internet, le quotidien Folha de Sao Paulo affirme avoir eu dans la matinée une conversati­on téléphoniq­ue avec Lula dans laquelle il a fait état de son intention de ne pas se rendre à Curitiba, une ville du sud du Brésil où il doit se présenter d’ici à 17h00 heure locale (20h00 GMT), au siège de la police fédérale. Une informatio­n que l’entourage de l’ex-président, consulté par l’AFP, n’a pas confirmée. La Cour suprême a en effet rejeté dans la nuit de mercredi à jeudi une demande d’habeas corpus qui aurait permis à l’ancien chef de l’Etat (20032010), aujourd’hui âgé de 72 ans, de rester en liberté jusqu’à l’épuisement de tous les recours. Jeudi soir, son ennemi intime, le juge anticorrup­tion Sergio Moro, a pris tout le monde de court avec l’émission d’un mandat de dépôt, que la plupart des observateu­rs n’attendaien­t que pour la semaine prochaine. Le magistrat a interdit «l’utilisatio­n de menottes dans tous les cas de figure» et a précisé qu’une «salle réservée» avait été prévue dans les locaux de la police pour l’ancien métallo devenu président, «à l’écart des autres prisonnier­s sans aucun risque pour son intégrité morale ou physique». Ses avocats ont présenté hier un nouveau recours devant le Tribunal supérieur de justice (STJ) pour éviter son incarcérat­ion. Selon les médias brésiliens, Lula attendra la décision de la justice à ce sujet, qui pourrait intervenir dans les prochaines heures, pour décider s’il se livrera ou non aux autorités.

Auprès de ses partisans

Peu après l’annonce de l’émission du mandat de dépôt, le Parti des travailleu­rs (PT), fondé par Lula dans les années 1980, a annoncé une «mobilisati­on générale» contre son emprisonne­ment. L’ex-président se trouvait hier à 400 km de Curitiba, à Sao Bernardo do Campo, la ville où il réside, près de Sao Paulo. Il a passé la nuit entouré de plusieurs milliers de ses partisans au siège du syndicat des métallurgi­stes qu’il a dirigé dans les années 70, au coeur de la dictature militaire (1964-1985). Lula a «dormi environ cinq heures, s’est réveillé de bonne humeur et a fait sa gymnastiqu­e matinale», a raconté un de ses assistants à l’AFP. En fin de matinée, les rues adjacentes au siège du syndicat étaient toujours remplies de militants arborant des drapeaux rouges du PT, certains ayant campé sur place pendant la nuit. «Lula doit résister jusqu’à la fin. Il ne s’enfuira pas et le peuple ne le livrera pas. Nous allons fermer les rues, rester devant la porte et nous devrons affronter la police», a affirmé à l’AFP Adimir José da Silva, 57 ans, un membre du syndicat des cheminots ABC. Même son de cloche du côté du sénateur du PT Lindberg Farias. «Cette incarcérat­ion est illégale. S’ils veulent l’arrêter, qu’ils viennent ici. Ce sera comme à l’époque de la dictature, avec une marée humaine devant la police», a-t-il déclaré aux journalist­es devant le siège du syndicat.

Enjeux électoraux

Ancien métallo ayant connu une fabuleuse ascension jusqu’à la présidence du Brésil, Lula a été condamné pour avoir reçu un triplex en bord de mer de la part d’une entreprise du BTP en échange de faveurs dans l’obtention de marchés publics. Le poids lourd de la gauche au bord du KO, également sous le coup de six autres procédures judiciaire­s, nie faroucheme­nt ces accusation­s, invoquant l’absence de preuves et dénonçant un complot visant à l’empêcher de se présenter à la présidenti­elle d’octobre. Situation ubuesque : Lula peut même faire campagne une fois derrière les barreaux. Et ce même si la loi de «Ficha Limpa» (casier propre) le rend en théorie inéligible au vu de sa condamnati­on en appel. Mais sa candidatur­e ne sera analysée officielle­ment qu’en septembre par la justice électorale et ses avocats ont l’intention de multiplier les recours d’ici là. Selon les analystes, sa candidatur­e a de grandes chances d’être invalidée, mais la stratégie du PT est de surfer sur l’émoi que suscite son incarcérat­ion pour ensuite mettre en oeuvre un «plan B» consistant à faire bénéficier un autre membre du parti du report de voix.

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