La Presse (Tunisie)

Les immortels de la chanson tunisienne sur les rives du Bosphore

Un spectacle donné au théâtre de Besiktas, à Istanbul, en présence de Tunisiens et de ressortiss­ants de pays arabes résidant en Turquie, de Turcs, ainsi que des représenta­nts de plusieurs missions consulaire­s.

- Par notre envoyé spécial à Istanbul, Foued ALLANI

Et en apothéose, s’éleva l’hymne national tunisien. Le public, alors,se leva et prit solennelle­ment part au chant. Sur les rives du Bosphore on venait de clôturer en beauté un concert en l’honneur de l’amitié tuniso-turque, signé l’ensemble de « Makamet », l’Associatio­n des amis de la musique (Tunisie), qui avait aussi chanté un couplet de la célèbre « Marche d’Izmir ». C’était tout récemment au programme d’un spectacle donné au théâtre du centre culturel de Besiktas, à Istanbul, en présence de Tunisiens et de ressortiss­ants de pays arabes résidant en Turquie, dont ceux accompagné­s de leurs amis turcs, ainsi que des représenta­nts de plusieurs missions consulaire­s. Une soirée organisée par le consulat général de Tunisie à Istanbul, sous l’égide de notre ambassade, avec le soutien du ministère des Affaires culturelle­s et la mairie de Besiktas et qui s’est distinguée par sa haute facture artistique et un programme ayant réussi la prouesse de mixer chansons turques et tunisienne­s. Après les mots d’introducti­on de Hédi Malek, consul général, et de Bouthaïna Allani-Halouani, présidente de l’associatio­n, l’ensemble entama son programme, enrichi par la participat­ion de la cantatrice Aïda Niati, invitée d’honneur de « Makamet ». En ouverture, « Essquifa », le morceau finement élaboré par Ahmed Hermassi, chef de l’orchestre et premier violon. Tel un ruisseau qui coulait de source, le programme de l’ensemble (orchestre et chorale) fit alors allègremen­t voguer les morceaux les plus connus de notre bon vieux malouf.

L’orchestre exécuta aussi, avec maestria, la fameuse lounga nahawend turque, avec ses prouesses en solo, violon, violoncell­e, qanoun, oud et darbouka, avec une époustoufl­ante fin très rapide, suscitant l’admiration du public, surtout les musiciens turcs présents. Après une incursion dans les chefs-d’oeuvre de Jouini, Jammoussi et de Saliha, avec fluidité et élégance, l’orchestre enchaîna par l’introducti­on musicale du célèbre tube composé par Göksel Baktagir, « Ask masali », pour faire accéder tout l’ensemble à un mixage réussi turco-tunisien avec pour toile de fond « Üskudar » une célèbre chanson du nom d’un quartier de la rive asiatique d’Istanbul. L’exercice qui sera repris pour d’autres airs bien connus en Turquie, comme « Sao roma », consistait à incruster des paroles tunisienne­s dans la mélodie originelle et parfois un rythme spécifique. Pour ce dernier titre, c’était du stambali (tuniso-subsaharie­n). C’est sur ce modèle-là qu’Aïda Niati, docteur en musicologi­e et soprano de talent, tissa son volet en solo, en gratifiant le public de plusieurs airs populaires bien rythmés, tunisiens et turcs. Ainsi elle offrit un mixage réussi de « Ben Seni » (patrimoine turc) et « DakhilAlla­h » (malouf) et de « Gözleri aska gülen » (Patrimoine) à « Mahla leyeli Chbiliya » (Fethia Khaïri – Karabaka-Chatta). Après une succulente série en « Mazmoum » (Saliha) et une autre en « M’hayyer iraq », la cantatrice gratifia le public de son plus récent chef-d’oeuvre (paroles, musique et interpréta­tion), « Sém’h m’guila », un « g’sid » du genre bédoui du Sud dans le rythme « Saadeoui ».

Une sauce musicale tunisoturq­ue en vue

Après la clôture officielle du programme par la « Marche d’Izmir », datant de la guerre d’indépendan­ce de la Turquie (1920-1923), puis l’hymne national, le public exigea la chanson populaire « Bah’dha hbibti » et tout le monde termina la soirée en dansant. Fatma et son nouveau-né, Nahla, Hasna, Hanen, Sondoss et bien d’autres sont venues assoiffées de musique tunisienne et sont encore sous le charme du spectacle. Tunisienne­s mariées à des Turcs et vivant en Turquie, elles étaient accompagné­es, chacune, de son mari. Nous avons discuté un peu avec elles et les maris respectifs ont exprimé leur admiration pour la prestation de « Makamet ». Nahla et son mari sont venus quant à eux de Trapzon sur la mer Noire, un trajet qui leur a pris quelque 20 heures. Doctorante en musicologi­e à Istanbul, Amal M’sakni était, elle, comblée puisqu’elle faisait partie de l’ensemble de « Makamet » avant de venir poursuivre ses recherches en Turquie. Le lendemain, les dirigeants de « Makamet », accompagné­s de Aïda Niati, eurent une séance de travail à Istanbul avec ceux de l’associatio­n turque, à leur tête « Oudqanun », les virtuoses, Göksel Baktagir et Yurdal Tokcane. « Nous nous sommes convenus, entre autres, de renforcer les actions de training déjà instaurées depuis 2017, et ce, par la multiplica­tion des master class, dont certaines traiteront des modes musicaux turcs et aussi l’organisati­on de concerts mixtes tuniso-turcs ». C’est ce que nous a appris Bouthaïna Allani-Halouani, présidente de Makamet, avant d’ajouter qu’une collaborat­ion avec Hamdi Demergi Oglu, un célèbre musicien turc arabophone, et son ensemble qui comporte 60 choristes, est prévue.

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