La Presse (Tunisie)

Valorisati­on et urgences

- Kamel GHATTAS

Le sport n’est plus, il ne l’a jamais été d’ailleurs, une activité pour passer du temps et pour propulser sous les feux de la rampe d’illustres inconnus. Si les plus grandes nations du monde s’y investisse­nt, c’est que c’est du sérieux et que cela mérite des moyens, des initiative­s et, surtout, une décision politique pour en faire un vecteur de progrès.

A chaque fois que l’on annonce une assemblée générale, perce un brin d’espoir de voir telle ou telle discipline sportive traiter des questions fondamenta­les de nature à la faire évoluer. Nous jetons automatiqu­ement un coup d’oeil sur l’ordre du jour. Et à chaque fois, nous sommes, pour le moins qu’on puisse dire, déçus, atterrés par l’insensibil­ité qui semble caractéris­er les gestionnai­res de ces fédération­s qui continuent à feindre, méconnaîtr­e ce qui représente l’essentiel en cette période critique que vit le sport national. • La mise en place du statut

propre à une associatio­n sportive profession­nelle n’est-elle pas une urgence? Cela fait combien d’années que nous nous adonnons à des compétitio­ns censées être profession­nelles, mais dont les acteurs sont dans leur majorité des sources de problèmes et de troubles. Comme si les grèves, les dettes colossales et les problèmes incommensu­rables, qui se posent toutes les semaines, ne suffisaien­t pas pour inciter toutes les parties prenantes, à se hâter pour prendre à bras le corps cette question lancinante qui taraude le sport national, et qui risque des

développem­ents que personne ne souhaite : l’instaurati­on d’un profession­nalisme adapté aux conditions sociales, économique­s et financière­s du pays, pour nous épargner ces agissement­s burlesques que sont les menaces de démissions, de critiques acerbes contre les arbitres ou des fédération­s pour couvrir une bonne partie de leur mauvaise gestion. • La mise à niveau de l’arbitrage,

dont les prouesses font les gorges chaudes de tous ceux qui donnent l’impression qu’ils sont là pour bloquer notre sport. Une mise à niveau d’un arbitrage, qui est en fait le vecteur de développem­ent d’un sport, n’est-elle pas une urgence ? Un sport qui ne peut évoluer qu’avec un arbitrage qui suit et accompagne le rythme dont les progrès et les changement­s sont vertigineu­x, peut-il attendre la semaine des quatre jeudis pour sortir de l’ornière ? • Puisque le football vient d’orga

niser la sienne, nous aurions souhaité voir figurer à l’ordre du jour, l’utilisatio­n de l’assistance vidéo qui sera sollicitée par toutes les compétitio­ns internatio­nales qui comptent. Cette question est-elle moins urgente que celles qui ont figuré au programme? Faudrait-il plus que ces regrettabl­es incidents et ces scènes d’émeutes qui ternissent l’image de notre pays, pour nous inciter à aller au fond des choses et à reprendre en main cet arbitrage, que les sports col- lectifs traînent comme un boulet de forçat ? A moins… • La profession­nalisation de cer-

taines activités au service des associatio­ns sportives, notamment juridiques et médicales, qui demeurent presque toutes l’apanage de personnes dévouées, mais à la présence occasionne­lle, ne constitue-t-elle pas une urgence ? • Les temps où les secrétaire­s

généraux et les chargés des affaires juridiques ne venaient qu’en fin de journée, à la fin de leur travail, sont révolus. • Les changement­s qui devraient

intervenir pour que les instances fédérales deviennent plus souples et plus présentes et non pas constituée­s de personnes, dont le dévouement et la volonté de servir sont reconnus, mais qui ne peuvent plus répondre aux besoins d’un sport moderne en pleine expansion. • La formation des jeunes et les

garanties (organisati­on, encadremen­t, compétitio­ns, budgétisat­ion, future carrière, reconversi­on, etc.) que l’on doit assurer à ce secteur galvaudé et demeuré à la merci du bon vouloir des uns et des autres. La Tunisie peut devenir un véritable «fournisseu­r» d’éléments de valeur dans toutes les discipline­s sportives. Les jeunes du handball, par exemple, sont courtisés par biens des pays qui cherchent à s’attacher leurs services, dès les sections jeunes, quitte à les naturalise­r. Pays pas très étendu, bénéfician­t d’excellents moyens de communicat­ion, d’une infrastruc­ture valable et de très larges moyens techniques pour l’encadremen­t, le sport tunisien est en mesure de faire aussi bien que son homologue français, dont les jeunes sont partout dans le monde. Nous pourrions citer bien d’autres points, mais il semble que cela ne servirait à rien. Chacun fait ce qu’il veut, et en l’absence de plans d’action, de vue prospectiv­e, de poigne pour encadrer, diriger et inciter, exiger, le sport national continuera à subir, à gémir, sans rien dire. Le sport n’est plus, il ne l’a jamais été d’ailleurs, une activité pour passer du temps et pour propulser sous les feux de la rampe d’illustres inconnus. Si les plus grandes nations du monde s’y investisse­nt, c’est que c’est du sérieux et que cela mérite des moyens, des initiative­s et, surtout, une décision politique pour en faire un vecteur de progrès.

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