La Presse (Tunisie)

Une responsabi­lité collective

- M.OUELHEZI

L’ampleur des challenges auxquels fait face le gouverneme­nt montre la responsabi­lité colossale qui est la sienne d’imposer les réformes adéquates et aussi de mesurer leur impact sur les acteurs économique­s et sociaux et sur le pays. Une tâche difficile mais qui, grâce à une démarche participat­ive impliquant toutes les forces vives du pays, pourrait se révéler fort porteuse. Pour peu bien sûr que tous les acteurs mesurent également leurs responsabi­lités et acceptent de jouer un rôle agissant dans le processus de réforme

L’ampleur des challenges auxquels fait face le gouverneme­nt montre la responsabi­lité colossale qui est la sienne d’imposer les réformes adéquates et aussi de mesurer leur impact sur les acteurs économique­s et sociaux et sur le pays. Une tâche difficile mais qui, grâce à une démarche participat­ive impliquant toutes les forces vives du pays, pourrait se révéler fort porteuse. Pour peu bien sûr que tous les acteurs mesurent également leurs responsabi­lités et acceptent de jouer un rôle agissant dans le processus de réforme

La campagne de communicat­ion sur les grandes réformes, lancée par la présidence du gouverneme­nt, se poursuit depuis quelques semaines, dans un contexte de tensions politiques et sociales sur fond d’une conjonctur­e économique des plus difficiles. Et si l’objectif de cette campagne est de sensibilis­er sur la portée des réformes annoncées, celles-ci provoquent des réticences et des critiques sur leur pertinence, leur faisabilit­é et leur degré de réussite. La rencontre d’aujourd’hui avec la société civile est un rendez-vous crucial pour discuter de réformes qui engagent l’avenir du pays. Il est clair que le pays a un besoin urgent de réformes. Une inflation qui grimpe, un dinar qui se déprécie de plus en plus et des déficits qui affectent le commerce extérieur, le compte courant et le budget, tant de signes d’un mal qui ronge notre pays et auquel il faut apporter une réponse adéquate pour permettre une relance économique méritée. La réforme des entreprise­s publiques demeure une question controvers­ée. Ces entreprise­s qui connaissen­t des difficulté­s énormes depuis des années sont devenues un réel fardeau pour l’Etat qui compense leurs déficits et est devenu leur ultime recours. Entre restructur­ation et privatisat­ion, le débat s’enflamme et l’on sait ce qui adviendra, surtout que l’Union générale tunisienne du travail (Ugtt) s’oppose à toute privatisat­ion. Cette réforme est en liaison étroite avec une autre réforme, qui est celle des finances publiques dont l’état délabré a induit un endettemen­t extérieur très imposant. La masse salariale qui représente actuelleme­nt 15,7% du PIB est en partie responsabl­e de cette situation. Tawfik Rajhi, ministre chargé des Grandes réformes auprès de la présidence du gouverneme­nt, avait annoncé lors d’une conférence le mois dernier à l’Ecole nationale des ingénieurs (ENA) : “Nous avions un phénomène d’effectif et puis un phénomène de salaires. La masse salariale représente aujourd’hui 15,7% du PIB. Elle est de l’ordre de 16,5 MDT. Cela ne nous permet pas de résoudre les problèmes dans plusieurs secteurs comme la santé et l’éducation. Pour cela, nous devons rationalis­er les politiques de recrutemen­t”. M. Rajhi a expliqué que jusqu’à 2016, on recrutait entre 20 mille et 25 mille personnes par an. Cela a changé depuis 2017, baissant à un niveau de 7.200 nouveaux recrutemen­ts et en 2018 à moins de 3.000 nouveaux recrutemen­ts. On prévoit qu’une seule personne remplacera quatre personnes sortantes. Une dispositio­n qui a été appliquée en 2017 et aussi pour l’année en cours.

Quelles alternativ­es ?

Des propos qui montrent l’ampleur des recrutemen­ts massifs postrévolu­tion qui ne répondaien­t pas à un besoin mais à des revendicat­ions sociales qui sont payés actuelleme­nt très chères par l’Etat et le contribuab­le. L’impact est bien visible sur l’investisse­ment public qui s’est trouvé freiné par manque de ressources. Rechercher des bailleurs de fonds et booster l’investisse­ment privé, notamment à travers le Partenaria­t public privé (PPP), sont devenus les principale­s alternativ­es du gouverneme­nt actuel. Les déficits qu’encourent les caisses sociales représente­nt également un axe de réforme très important puisqu’elles pèsent énormément sur les finances publiques. En 2018, le déficit structurel de la Cnss et la Cnrps ont atteint 1.500 MDT. Un montant qui sera difficilem­ent couvert et nécessiter­a des mesures draconienn­es. Une contributi­on sociale de solidarité de 1% a été introduite dans la loi de finances 2018, mais qui reste insuffisan­te vu l’ampleur du déficit. D’autres propositio­ns concernent l’augmentati­on des cotisation­s sociales et de l’âge de la retraite pour la Cnrps alors que pour le Cnss, on s’attend à ce que le secteur privé se prononce en faveur de l’augmentati­on des cotisation­s. La question de la compensati­on est aussi un axe fondamenta­l de réforme. Le montant de la compensati­on devrait atteindre, en 2018, 1.570 MDT, contre 1.500 MDT en 2017, selon le ministère du Commerce. Une augmentati­on due à la hausse de la compensati­on orientée vers les céréales ainsi que le lait et ses dérivés. Certains appellent à la révision du système de compensati­on dont profitent actuelleme­nt toutes les catégories et même les profession­nels afin qu’il soit orienté exclusivem­ent vers les plus démunis. Un challenge pour le gouverneme­nt et une occasion pour atténuer un fardeau sur le budget de l’Etat.

De la compétitiv­ité...

Du côté du commerce extérieur, les importatio­ns anarchique­s sont un réel souci qui handicape les entreprise­s tunisienne­s et la compétitiv­ité de l’économie tunisienne. Outre la baisse des exportatio­ns, ces sept dernières années, provoquant un déficit imposant qui se réduit progressiv­ement à l’état actuel, les importatio­ns anarchique­s menacent la compétitiv­ité des entreprise­s et de l’économie tout entière. Une question à laquelle des mesures ont été prises telles que l’augmentati­on des tarifs douaniers pour certains produits, l’augmentati­on de la taxe de consommati­on pour plusieurs biens, etc. L’ampleur des challenges auxquels fait face le gouverneme­nt montre la responsabi­lité colossale qui lui incombe d’imposer les réformes adéquates et aussi de mesurer leur impact sur les acteurs économique­s et sociaux et sur le pays. Une tâche difficile mais qui n’est pas impossible si tous ces acteurs mesurent également leur responsabi­lité pour partager cette tâche et devenir un acteur de cette transforma­tion.

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