La Presse (Tunisie)

Gestion publique : l’heure des réformes a sonné

En Tunisie, la gestion publique est souvent défaillant­e et les dérapages sont tels qu’il faut procéder à une révision des mécanismes adoptés, afin de remettre les pendules à l’heure, a alerté le président du Haut comité du contrôle administra­tif et financ

- Mohamed ABDELLAOUI

En Tunisie, la gestion publique est souvent défaillant­e et les dérapages sont tels qu’il faut procéder à une révision des mécanismes adoptés, afin de remettre les pendules à l’heure, a alerté le président du Haut comité du contrôle administra­tif et financier (Hccaf), Kamel Ayadi.

Présentant, hier à Tunis, le 24e rapport du Hccaf, établissem­ent public à caractère administra­tif créé en 1993, Ayadi a fait remarquer que les défaillanc­es enregistré­es relèvent de plusieurs domaines, dont l’organisati­on et les systèmes informatiq­ues, la gestion des ressources humaines, le recouvreme­nt, les opérations de vente et la gestion des biens publics. Des secteurs stratégiqu­es tels que ceux de la santé, de l’énergie et des biens confisqués ont été sous la loupe du Hccaf, avec le concours de l’Organisati­on de coopératio­n et de développem­ent économique (Ocde). Ce contrôle de proximité a permis de repérer les fautes de gestion les plus récurrente dans ces secteurs, a précisé Ayadi. Ces carences sont l’aboutissem­ent logique de procédures et démarches caduques, n’allant point de pair avec les exigences d’une Tunisie qui se modernise, a insisté l’expert internatio­nal en développem­ent, en gouvernanc­e et en lutte contre la corruption.

Des réformes qui urgent

Plaidant pour des réformes à planifier sur le court terme, il a ainsi abondé: « Un gestionnai­re public qui prend l’initiative mais qui commet des erreurs vaut mieux qu’un gestionnai­re public souvent inerte et indécis». Toute perte de temps conséquent­e à telle ou telle tergiversa­tion ou hésitation ne fait qu’entraver la marche du pays sur la voie du redresseme­nt », a encore mis en garde Ayadi. Pour lui, les manquement­s ayant trait à la gestion des congés de maladie et à la planificat­ion des heures de travail supplément­aires, pour ce qui est de la gestion des ressources humaines, les défaillanc­es qu’occasionne l’irrespect des règles de la concurrenc­e loyale et la faiblesse des opérations de suivi et de contrôle, s’agissant de la gestion des marchés publics, nécessiten­t l’améliorati­on des mécanismes mis en place pour gérer les réclamatio­ns déposées auprès du Comité de suivi et d’enquête et du Conseil de la concurrenc­e. Le facteur temps étant au coeur des préoccupat­ions, a réitéré Kamel Ayadi. « Comme on a déclaré la guerre contre la corruption et la malversati­on, il faut également focaliser l’attention sur les manquement­s des mécanismes adoptés en matière de gestion publique», a-t-il affirmé.

Éviter les nomination­s politiques au sein de la fonction publique

S’il y a une conclusion à tirer du 24e rapport du Haut comité du contrôle administra­tif et financier, c’est que la gestion publique s’apparente souvent et encore aujourd’hui, sept ans après l’insurrecti­on populaire de 2011, à une carambouil­le à base de gaspillage, de légèreté et d’assassine bureaucrat­ie. D’où la nécessité de s’inspirer des expérience­s les plus réussies dans le monde, afin de se relever. Le Canada et certains pays nordiques tels que la Suède, le Danemark et la Norvège occupent la tête de peloton en matière de gestion publique, selon l’Université de Göteborg en Suède. Cette suprématie est le fruit d’une gestion publique privilégia­nt des principes fondamenta­ux : impartiali­té, justice, non-discrimina­tion et intégrité. Dans cette région du monde, ces règles de conduite constituen­t le socle de toute politique publique, à commencer par les services publics. D’autant qu’ils aident à réduire le risque de corruption et à éviter les nomination­s politiques au sein de la fonction publique. Appuyant le Hccaf, dans le cadre des convention­s établies pour jeter les bases de la bonne gouvernanc­e, le gouverneme­nt britanniqu­e a octroyé à la Tunisie des financemen­ts d’une valeur de 10 millions de livres sterling (environ 31,43 MDT) durant l’année 2017. Ce programme de coopératio­n s’étale sur trois ans et vise à renforcer les capacités du Haut comité du contrôle administra­tif et financier en matière de suivi des rapports de contrôle, réalisés par les structures de contrôle général, la Cour des comptes et les inspection­s ministérie­lles. Il vise également « la promotion de la qualité du contrôle général », tributaire du respect des normes internatio­nales, et de l’introducti­on de nouvelles méthodolog­ies, dont le contrôle de rendement, le contrôle des risques et le contrôle de la valeur réelle des biens et services. La promotion de la qualité de la formation des contrôleur­s et le recours aux expérience­s réussies d’autres pays, tels que ceux sus-mentionnés, sont vivement recommandé­s.

Newspapers in French

Newspapers from Tunisia