L’autre monde de Jenaïna Messaoudi

Disjonctée, certes, déjantée aussi, décalée certainement, en un mot «space» comme disent les adolescents, ce qu’elle était il n’y a guère longtemps. Jenaïna Messaoudi est tout sauf banale, et rien moins que conventionnelle. Née dans le sérail d’une famille d’artistes, elle aurait du mal à être bcbg, et politiquement correcte. Alors, suivons-la sur les chemins de sa fantaisie débridée, et amusons-nous à traverser le miroir qu’elle nous tend. Chez Musk and Amber, dans le décor délicatement raffiné qui l’accueille, elle fait entrer un vent de contestation, un tourbillon de folie douce, une tempête de couleurs explosives. Elle qui s’offre comme support ce qu’elle trouve, vieilles portes, fenêtres désaffectées, colonnes de carton recyclé, trouve pourtant parfaitement sa place dans ce temple du design et du bon goût. C’est que Jenaïna a du talent, et contre cela, aucun code de bonne conduite ne peut tenir. Jenaïna nous présente les personnages de son univers, ceux qui rient et ceux qui pleurent, ceux qu’elle masque et ceux qu’elle démasque, ceux qui sont vrais, et ceux qui sont faux, ceux arrivent et ceux qui s’enfuient. Elle les tague, les couvre de tatouages, de symboles qu’elle seule peut déchiffrer, les maquille ou les déguise, les fait valser ou s’envoler. Et même quand ils grimacent ou qu’ils pleurent, ils sont gais et drôles encore. Pour elle, derrière ce miroir, rien n’est impossible, le monde est bleu comme une orange, la gravité n’existe pas, dans toutes les acceptations du terme, et tout est permis à condition de savoir rêver. Que dire d’autre, sinon que c’est tonique, jouissif, et que l’on respire mieux quand on en sort.