Entre reconnaissance et ingratitude
«Le souvenir des bienfaits reçus est fragile comparé à l’ingratitude» (L. de Vinci).
Décidément, Bertrand Marchand et le Club Africain ressemblent à cet amour fou qui ne sait plus quoi faire pour s’exprimer et le déclarer. Il était venu une première fois et…, tenté par une expérience à l’Etoile Sportive du Sahel, il s’est fait accuser de tout, en raison de son empressement. Et voilà qu’il revient pour «rendre au Club Africain ce qu’il lui avait donné», étant donné que c’est ce club qui l’avait relancé, aussi bien en Tunisie que sur la scène en dehors de la France, où il passait pour un excellent entraîneur formateur. Quelques mois à la tête d’un club moribond, ressuscité il est vrai par K. Kolsi et A. Tiouiri, il réinjecte l’envie de se battre et de reconquérir un prestige sérieusement remis en question. Mais… depuis quelques semaines, la formation clubiste donne des signes d’essoufflement. Cela coïncide avec des «échos» insidieusement distillées qui donnent l’impression que l’entraîneur clubiste a la tête ailleurs. Certes, depuis son premier passage en Tunisie, le coach clubiste (qui ne l’est plus) avait donné l’impression qu’il était bien dans son rôle de «formateur», mais il perdait la tête une fois que son équipe était acculée. Difficile d’affirmer pareille assertion, mais les conséquences et les réalités du terrain sont là, pour confirmer son attitude hésitante et quelque peu déroutante, qui se sont révélées lors des dernières sorties de l’équipe. Il faudrait reconnaître et le rappeler à ceux qui l’ont perdu de vue, à son arrivée au chevet de l’équipe, B. Marchand a été sollicité pour relancer une formation détruite comme elle ne l’a jamais été depuis près… d’un siècle, mais qui a été, il est vrai, remise sur les rails par la paire Kolsi-Tiouiri. On lui avait au moins demandé de terminer à la 4e place, aller le plus loin possible en compétition CAF et faire au mieux en Coupe de Tunisie. L’équipe est deuxième, malgré la perte précieuse de points en deux matchs. Elle est qualifiée en Coupe de Tunisie, mais a été sortie sans gloire de la Coupe de la CAF. Sollicité de partout à la suite de l’impressionnante et fantastique «remontada», Marchand a paru quelque peu ébranlé. Les méninges de ceux qui croient que c’est l’entraîneur qui tient en main la poudre de perlimpinpin qui fait gagner les matchs se sont mis en branle. Ils oublient que la motivation des joueurs, le milieu ambiant, le public, la fierté de l’équipe, son histoire etc. sont des éléments à prendre en considération. Acculé par ses propres déclarations qui donnaient l’impression qu’il était venu pour rester, il a fini par craquer face aux propositions des équipes tunisiennes et étrangères. Marchand n’était plus le même. Ses déclarations l’enfonçaient chaque jour davantage. Il était ailleurs, alors que son équipe était devenue méconnaissable.
Une véritable guerre des nerfs
Adieu aux titres pompeux qui tressaient les lauriers les plus fabuleux à l’entraîneur, et qui accompagnèrent la relance miraculeuse de l’équipe, laquelle, il est vrai, le plus sûrement du monde, du bas du tableau, s’est permise de battre les meilleurs et de prétende à une place sur le podium. On était passé au fil des matchs à ce qui ressemblait à une véritable guerre des nerfs. Assez pour pousser (à aider?) l’entraîneur clubiste vers la sortie, mettant ainsi un terme à une des parenthèses les plus attachantes de cette saison. Difficile il est vrai de lutter face à toutes ces tentations. Ses employeurs, quelque peu outrés par des conditions posées et considérées malvenues, étant donné la situation du club, ont fini par trancher. Marchand pourrait rejoindre ceux qui l’attendent et le CA retournera se réfugier dans les bras de ceux qui lui ont redonné le goût de se battre. De toutes les façons, à ce stade des compétitions, des joueurs qui se disent capables de relever le défi n’ont plus besoin de personne. Ils savent, tout comme les combattants professionnels, ce qu’ils ont à faire. Il leur suffit d’une vigoureuse reprise en main que dirigeants et personnel d’encadrement leur assureront sur cette ligne droite pour rebondir. Il n’en demeure pas moins que la nécessité de régler les problèmes de logistiques est primordiale. Pour bon nombre de ceux qui ont promis d’aider, les choses sont, semble-til, demeurées au niveau des pro- messes, alors que la saison est arrivée à une étape cruciale. Comme quoi, lorsqu’un club ne possède pas ses ressources propres et vit au jour le jour, ses problèmes ne seront jamais résolus. Il ne faut pas se leurrer. Entre la reconnaissance et l’ingratitude, il y a de ces impondérables que personne ne saurait pénétrer. Ainsi va le sport !