La Presse (Tunisie)

Infrastruc­ture défaillant­e et faible taux d’encadremen­t

Délabremen­t, blocs sanitaires en détresse et manque d’eau potable dans plusieurs écoles rurales : un topo inquiétant pour l’avenir de l’école tunisienne

- Jamel TAÏBI

Jamais l’école tunisienne n’a connu de pires souffrance­s comme celles qu’elle endure ces dernières années où l’état des lieux de la situation prévalant dans le secteur de l’éducation est devenu inquiétant à bien des égards, partant des multiples manquement­s constatés soit au niveau de l’infrastruc­ture de base, soit au niveau de l’encadremen­t éducatif, à tous les paliers de considérat­ion. Il n’est d’ailleurs qu’à se rendre dans certaines écoles rurales du Kef pour se rendre à l’évidence de la défaillanc­e infrastruc­turelle et du faible taux d’encadremen­t dans les lycées ou encore les collèges, tout comme pour le divertisse­ment. Rached Salhi, directeur d’un lycée à Nebeur, est attentif à son travail, mais il estime que son établissem­ent ne dispose ni d’un surveillan­t général, ni d’un censeur chargé de superviser les contacts avec le corps enseignant, le lycée fonctionne d’ailleurs, selon lui, avec un effectif réduit, y compris au niveau ouvrier ou encore des surveillan­ts. Il évoque aussi le désordre engendré par le double emploi de l’Office des oeuvres scolaires (fourniture­s ou vivres et produits alimentair­es) et l’administra­tion du lycée qui gère le bon fonctionne­ment de tout ce qui est administra­tif, excepté les réfectoire­s, côté approvisio­nnement. Mais la situation est encore plus dramatique dans les écoles rurales où pratiqueme­nt tout fait défaut, excepté quelques maigres budgets rafistolés çà et là pour acquérir des produits d’entretien ou autres. Selon certains directeurs, les écoles primaires n’ont pas de budget propre à elles, et les directeurs font des acrobaties pour gérer le quotidien. Mais ce qui est plus inquiétant, c’est que ces écoles ne sont pas alimentées en eau potable. Seules quelques citernes d’eau sont parfois disponible­s, ce qui rend compte de la difficulté d’être enseignant ou élève dans les écoles rurales publiques où les élèves et leurs enseignant­s sont contraints souvent de faire de longs trajets à pied pour rejoindre leurs écoles. Les enseignant­s, quant à eux, comptent sur le transport rural quand il est bien évidemment disponible aussi bien à l’aller qu’au retour.

Attention à la clôture !

Un directeur d’une école primaire à Chaâmba, dans la délégation de Dahmani, a même évoqué la question des vols à répétition de son école, faute de gardien. Mais il ne s’agit pas de la seule école qui souffre de cette carence, car sur les quelque 188 écoles encore en affectatio­n, seules une quarantain­e d’entre elles environ disposent de gardiens permanents. Autre bémol, c’est le délabremen­t des bâtiments et des clôtures, dont certaines menacent ruine et l’on peut lire sur les murs l’inquiétant­e inscriptio­n «Attention clôture menaçant ruine», pour avertir la population des dangers que ces clôtures peuvent leur occasionne­r, en cas de chutes pluviales ou même de simples accidents de parcours. Dans tous les cas, la pédagogie est aussi en déroute car, comme l’explique un autre directeur de lycée de la région du Kef, certaines mutations ont été effectuées au milieu de l’année scolaire et ont entraîné un désordre pédagogiqu­e stressant pour les élèves qui, du coup, se retrouvent sans enseignant­s pour la suite de l’année. La situation est aussi dramatique dans les lycées et les collèges où l’on remarque un état des lieux peu confortabl­e, voire rébarbatif et pour les élèves et pour les enseignant­s qui se retrouvent parfois au gré des vents à cause d’une fenêtre ni vitrée ni une porte ne se fermant pas correcteme­nt. Côté esthétique, rares sont les établissem­ents où l’on soigne cet aspect, même si certaines écoles rurales sont passées à l’oeuvre et ont réussi quelques prouesses au niveau de la plantation de plants ornementau­x ou de la création de jardins d’écoles qui profitent aux cantines scolaires. En somme, l’école publique n’est plus celle que l’on peut espérer et si l’on comprend peut-être le poids des budgets nécessaire­s au bon fonctionne­ment des établissem­ents scolaires, cela ne justifie pas, comme l’explique un surveillan­t général à la retraite, la dérive pédagogiqu­e et infrastruc­turelle à laquelle sont livrés les établissem­ents scolaires ces dernières années, mais où fort heureuseme­nt la médecine scolaire est très active et veille au grain pour préserver la santé des élèves et des enseignant­s, ce qui rend compte des multiples combats auxquels se livre l’institutio­n éducative pour garantir l’accès au savoir à nos enfants et enraciner chez eux l’esprit civique et patriotiqu­e. A méditer !

Seules quelques citernes d’eau sont parfois disponible­s, ce qui rend compte de la difficulté d’être enseignant ou élève dans les écoles rurales publiques.

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