La Presse (Tunisie)

Un nouveau test pour May

A moins d’un an du Brexit, le gouverneme­nt conservate­ur à l’épreuve du renouvelle­ment des instances locales

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AFP — Les Anglais voteront demain pour renouveler leurs instances locales, un scrutin à valeur de test pour le gouverneme­nt conservate­ur de Theresa May, divisé et affaibli à moins d’un an du Brexit. Ces élections locales sont le premier scrutin depuis les législativ­es de juin 2017 qui avaient coûté sa majorité absolue à Theresa May et vu le Parti travaillis­te de Jeremy Corbyn, premier parti d’opposition du pays, monter en puissance. Elles auront lieu en outre quelques jours seulement après la démission de la ministre de l’Intérieur Amber Rudd, emportée par le scandale entourant le traitement des immigrés d’origine caribéenne arrivés au RoyaumeUni après la Seconde Guerre mondiale. Elles se déroulent en Angleterre, une des quatre nations constituti­ves du Royaume-Uni et la plus peuplée avec 55 millions d’habitants. Plus de 4.300 sièges sont en jeu dans 150 conseils locaux, chargés notamment des questions d’éducation et de la gestion des déchets. Londres est l’un des principaux champs de bataille de la campagne. Les travaillis­tes ambitionne­nt d’y ravir plusieurs bastions traditionn­ellement conservate­urs, comme le borough de Wandsworth, dans le sud-ouest de la capitale britanniqu­e. «L’attention se portera surtout sur Londres, et les Tories s’en sortiront mal», pronostiqu­e Robert Hayward, membre conservate­ur de la Chambre des Lords et spécialist­e en sondages. Il souligne que 40% des votes seront exprimés dans la capitale britanniqu­e, majoritair­ement pro-UE. «Bien que les gens soient supposés voter essentiell­ement sur des enjeux locaux, la réalité est que la participat­ion est souvent motivée par la manière dont la politique est perçue au niveau national», ajoute-il.

«Très faibles» attentes

Une défaite constituer­ait un nouveau coup dur pour Theresa May qui, affaiblie par son revers aux élections nationales, peine à maintenir l’unité au sein de son parti, divisé entre partisans d’un Brexit dur et défenseurs du maintien de la relation la plus étroite possible avec l’UE. Selon les analystes, ces élections locales devraient mettre en évidence le fossé grandissan­t entre zones urbaines et rurales en Angleterre, ainsi qu’entre euroscepti­ques et pro-Européens. John Curtice, professeur de poli- tique à l’université de Strathclyd­e (Ecosse) et l’un des principaux experts britanniqu­es en sondages, pense que Theresa May engrangera surtout des voix en dehors des grandes villes, éloignant encore davantage son parti du conservati­sme plus cosmopolit­e de son prédécesse­ur David Cameron. Attendez-vous à voir Jeremy Corbyn célébrer les résultats à Londres et la Première ministre dans ses fiefs provinciau­x, abonde Robert Hayward. Même si «les attentes sont très, très faibles pour Theresa May», souligne Simon Hix, professeur en sciences politiques à la London School of Economics, perdre Wandsworth, fief tory loué en son temps par Margaret Thatcher pour appliquer à la lettre son programme ultra-libéral, constituer­ait un symbole. Le chef actuel du conseil local, Ravi Govindia, espère pouvoir se maintenir. «Il n’y a pas un borough travaillis­te à Londres qui peut se prévaloir d’aussi faibles niveaux d’impôts locaux qu’à Wandsworth», vante-t-il à l’AFP. «Pourquoi changer une formule gagnante?».

Européens courtisés

Le Labour doit s’y emparer de 12 sièges pour déclencher «un séisme politique», selon les mots de son responsabl­e local, Simon Hogg. Selon lui, le Brexit sera déterminan­t car «il a soumis à rude épreuve la connexion tribale entre de nombreux électeurs conservate­urs et le pari tory». «Je pense que de nombreux conseilleu­rs tories perdront leur job à cause du Brexit extrême et chaotique qu’ils essaient de faire passer». Les partis de l’opposition - le Labour mais aussi le Parti libéral démocrate et les Verts - courtisent plus particuliè­rement ces électeurs conservate­urs mécontents ainsi que les immigrés européens, autorisés à voter aux scrutins locaux. Wandsworth compte 230.000 électeurs inscrits et traditionn­ellement, seul un tiers d’entre eux se rendent aux urnes. Ce qui signifie que les quelque 26.000 citoyens européens qui y résident pourraient jouer un rôle capital. Or ces derniers semblent peu nombreux à vouloir voter pour les Tories, malgré les propos se voulant rassurants sur leur sort après le Brexit. Un phénomène qui pourrait faire boule de neige dans tout Londres, où les Européens représente­nt environ 12% de la population.

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