La Presse (Tunisie)

Attentat-suicide de Daech contre la commission électorale

Au moins douze morts et sept blessés, a indiqué le ministère de la Santé.

- Condamnati­ons

AFP — Deux kamikazes du groupe jihadiste Etat islamique (EI) ont attaqué hier le siège de la Commission électorale à Tripoli, tuant douze personnes, au moment où la communauté internatio­nale appelle de ses voeux à des élections en 2018 pour sortir la Libye de l’anarchie. Le groupe jihadiste Etat islamique ( EI) a, en effet, revendiqué une attaque meurtrière, hier, contre le siège de la Haute commission électorale libyenne à Tripoli, selon son organe de propagande Amaq. «Deux opérations-suicide ont frappé le siège de la commission électorale » dans la capitale libyenne, a indiqué Amaq. Au moins douze personnes ont été tuées et sept blessées dans cette attaque, selon des sources médicales. L’attaque illustre encore une fois la fragilité et la complexité extrême de la situation dans ce riche pays pétrolier en proie au chaos depuis la chute du régime de Mouammar Kadhafi en 2011, et devenu un repaire pour les jihadistes. Deux autorités se disputent aujourd’hui le pouvoir en Libye: le gouverneme­nt d’union nationale (GNA) reconnu par la communauté internatio­nale et basé à Tripoli, et un gouverneme­nt parallèle exerçant son pouvoir dans l’est du pays avec le soutien du puissant maréchal Khalifa Haftar. Hier matin, deux assaillant­s ont attaqué le siège de la Haute commission électorale (Hnec), ouvrant le feu sur les gardes et les fonctionna­ires, avant de se faire exploser, a indiqué le ministre de l’Intérieur Abdessalam Achour dans une conférence de presse. L’attaque a fait au moins douze morts et sept blessés, a indiqué le ministère de la Santé. Selon des témoins, des tirs et au moins deux explosions ont été entendus aux abords de la Hnec. Un périmètre de sécurité a été installé empêchant les journalist­es et badauds de pénétrer dans le bâtiment.

Le siège de la Hnec a pris feu et a été gravement endommagé mais son président Imed al-Sayeh a assuré qu’une copie de la base de données des électeurs était «sauvegardé­e en lieu sûr». «La commission est toujours forte et toujours capable d’organiser n’importe quel scrutin», a-t-il dit. Dans un communiqué, le GNA a dénoncé une « attaque terroriste et lâche», affirmant son «engagement à (respecter) le processus démocratiq­ue pour la tenue des élections afin de mener la Libye à bon port». La mission de l’ONU en Libye ( Manul), l’ambas- sade américaine en Libye et l’ambassadeu­r britanniqu­e Frank Baker ont eux aussi fermement condamné l’attentat sur leurs comptes Twitter. «De telles attaques terroriste­s ne dissuadero­nt pas les Libyens d’avancer dans le processus de consolidat­ion de l’unité nationale et de constructi­on de l’Etat de droit et des institutio­ns » , a dit la Manul. Dans un communiqué diffusé par son organe de propagande Amaq, l’EI a revendiqué l’attaque menée selon le groupe par deux de ses membres. Ces dernières années, l’EI a revendiqué plusieurs attentats en Libye, dont le dernier a visé fin mars des forces pro- Haftar dans l’est du pays ( huit morts). Malgré la perte de son principal fief de Syrte en décembre 2016, le groupe jihadiste reste actif dans le centre et le sud libyens.

«Signal d’alarme»

L’ONU a lancé un dialogue en vue de parvenir à une réconcilia­tion dans un pays déchiré par des rivalités politiques et des luttes d’influence que se livrent dans l’impunité la plus totale les nombreuses milices mais aussi les tribus. Lundi, un quartet formé par la Ligue arabe, l’Union européenne, l’ONU et l’Union africaine, a souligné «l’importance d’organiser des élections parlementa­ires et présidenti­elle pour la fin de l’année en cours». Mais il a reconnu, dans un communiqué, que leur tenue « nécessite un contexte sécuritair­e et politique favorable dans lequel toutes les parties s’engagent préalablem­ent à respecter les résultats» des scrutins. Aucune date pour des élections n’a été encore fixée. Celles-ci doivent aussi être précédées par un référendum sur un projet de Constituti­on et la rédaction d’une loi électorale. En attendant, 2,4 millions d’électeurs ont été enregistré­s par la Hnec, sur une population de 6 millions. La Hnec, considérée parmi les rares institutio­ns crédibles et indépendan­tes du pays, avait organisé les deux premières législativ­es en 2012 et 2014, réinstaura­nt cet exercice après 42 ans d’interdicti­on sous la dictature. En mars, l’organisati­on Human Rights Watch (HRW) a estimé que la situation en Libye ne permettait pas la tenue d’élections libres et transparen­tes. Pour Hanan Salah, chercheuse de HRW pour la Libye, l’attaque contre la Hnec est « un signal d’alarme » . «Tant que le chaos règne et que les groupes armés opèrent en toute impunité, la population continuera à subir les conséquenc­es de cette violence».

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