La Presse (Tunisie)

Le petit grand jour !

Dans la petite commune d’Ez-zahra de 35.000 habitants, la journée du 6 mai 2018 est une journée comme les autres. Rien n’indique que se tiennent ici les premières élections municipale­s libres et indépendan­tes. Ici, les taux d’abstention élevés s’alignent

- K.B.S.

Hier, à l’occasion des premières élections municipale­s libres et indépendan­tes, à l’ouverture du bureau de vote, à l’école primaire de Khaznadar dans la ville d’Ez-zahra (banlieue sud de Tunis), nous étions très loin des files d’attentes interminab­les des scrutins de 2011 et 2014. Au compte-gouttes, les rares électeurs ont commencé à voter. Feyza, 68 ans, se déplaçant avec une béquille difficilem­ent, tient pourtant à mettre un bulletin dans l’urne. «Je suis sortie de chez moi à 9h15, j’ai marché lentement pendant une demi-heure pour arriver ici», nous explique la dame, qui a vécu toute sa vie en Allemagne, revenue passer sa retraite en Tunisie. Si elle vote, c’est beaucoup plus par devoir que par conviction politique. Au moment d’entrer dans le bureau de vote, elle nous avoue qu’elle ne sait pas encore pour qui elle donnera sa voix. D’ailleurs, elle demande conseil auprès d’une autre dame, qui vient tout juste de voter. A l’intérieur, les responsabl­es des bureaux de vote accueillen­t les rares électeurs. A l’extérieur, de douteux personnage­s tentent d’aider «bénévoleme­nt» les électeurs encore indécis. Dans la ville, nous croisons peu de gens avec un index gauche teinté d’encre bleue. Ce dimanche 6 mai, les citoyens ne semblent pas avoir changé leurs habitudes. Beaucoup font leurs courses, certains promènent leurs enfants, et d’autres préfèrent, comme à l’accoutumée, passer du temps au café du coin. Signe d’un désintérêt total, les élections ne font pas partie des principaux sujets de discussion dans les cafés de la ville. Mohamed Ali, contrairem­ent à 2014, a choisi de regarder ce scrutin de loin. « Je n’ai été convaincu par aucune des liste en lice », nous dit-il. Pourtant, c’est un féru de l’actualité politique, toujours au fait de ce qui se passe sur le plan national et local. « J’ai constaté que les programmes étaient les mêmes pour toutes les listes, ensuite, pour les listes indépendan­tes, l’une est constituée d’un ancien d’un parti représenté au gouverneme­nt, et dans l’autre les jeunes sont sous-représenté­s », précise Mohamed Ali. Le jeune homme de 26 ans ne cache pas son dégoût pour la scène politique telle qu’elle se présente aujourd’hui. La confiance dans la classe politique, il l’a perdue au fil des élections qui se sont déroulées depuis 2011. Chaima, 23 ans, quant à elle, choisit d’aller voter. « Au départ, j’avais ma petite idée, je savais à peu près pour qui j’allais voter, nous explique-t-elle. Mais au final, j’ai simplement trempé mon doigt dans l’encre et j’ai mis un bulletin blanc». Pour sa part, Imen, 45 ans, a voté à contrecoeu­r pour une liste indépendan­te. «Tout ce dont j’étais certaine, c’est qu’il ne fallait pas voter pour les partis et particuliè­rement pour les partis qui composent actuelleme­nt le gouverneme­nt», confie-t-elle. La commune d’Ez-zahra compte 20.136 inscrits sur le registre électoral. Les huit listes candidates se disputent 24 sièges au conseil municipal.

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