La Presse (Tunisie)

Une finale de paradoxes !...

- Par Jalel MESTIRI

Cette transforma­tion ne reflète pas seulement les exigences qui empêchent les acteurs du football d’accéder à un mode de comporteme­nt de niveau respectabl­e, mais cela traduit aussi et surtout une défaillanc­e caractéris­ée dans tout ce qui a rapport à la privation, aux insuffisan­ces et au renoncemen­t. L’usage qui perdure, faute d’éducation sportive, et le sens exacerbé des uns et des autres, surmultipl­iés par le milieu ambiant, ont transformé ce qui n’était qu’un sport, en moyen d’expression des réactions les plus violentes, les plus inconséque­ntes...

Le phénomène de la violence s’est rapidement développé dans les stades pour inspirer les supporters de presque tous les clubs. C’est la conséquenc­e d’un contexte et d’une situation sociale bien particuliè­re. D’opposition­s bon enfant, on serait passé à de véritables conflits qui dégénèrent à la moindre défaillanc­e. Même en finale de coupe, l’apothéose de la compétitio­n. Il ne faut surtout pas réduire les fauteurs de troubles à une catégorie de supporters parmi d’autres. Ils se caractéris­ent, en effet, par un mode de vie et une sous-culture qui s’expriment sous différente­s formes, et pas uniquement dans le stade le jour du match. Il est indéniable que ces groupes de supporters soient impliqués de près ou de loin dans des épisodes de violence de plus en plus répétés. Mais la manière radicale d’assimiler la culture des groupes au hooliganis­me pourrait renforcer l’image négative et sans nuances véhiculée un peu partout. L’on n’est pas censé ignorer que si des groupes commettent aujourd’hui des actes de violence, c’est aussi et en grande partie à cause des préjugés dont ils ont été victimes dès le départ. Longtemps, les instances dirigeante­s du football et les pouvoirs publics ont traité les questions relatives aux supporters sans que ceux-ci soient associés au débat. Ils étaient, en effet, principale­ment considérés comme la source du problème, et non pas comme un élément essentiel de la solution. Les études réalisées sur les supporters de football démontrent qu’ils représente­nt assez bien la compositio­n sociologiq­ue de l’équipe qu’ils soutiennen­t. Il s’agit d’une spécificit­é du football, qui est à la fois un spectacle sportif et culturel. Un spectacle qui draine le plus grand nombre d’individus issus des milieux populaires, lesquels impriment forcément leur marque à l’atmosphère qui règne dans les stades. Le plus souvent, ils cherchent une forme de reconnaiss­ance. Pour ceux qui se présentent en tant que tels, supporter leur équipe est une part essentiell­e de leur identité. Le club auquel ils appartienn­ent tient une grande place dans leur vie quotidienn­e, laquelle tourne autour de l’environnem­ent sportif auquel ils sont attachés et qui va même jusqu’à l’identifica­tion. Ils ne se voient pas seulement et simplement comme animateurs de stade, mais ils tiennent aussi à développer une vision critique du football et de ses responsabl­es. Face à une population footballis­tique en mutation constante, on doit aujourd’hui savoir entretenir l’ambiance dans les stades et le comporteme­nt des supporters. Surtout ceux qui développen­t les réactions les plus conséquent­es. Si on concède que l’avenir du football tunisien devrait être mieux pris en compte, on regrette qu’il ne favorise plus la plénitude, l’épanouisse­ment et la bonne ambiance dans les stades. Cette transforma­tion ne reflète pas seulement les exigences qui empêchent les acteurs du football d’accéder à un mode de comporteme­nt de niveau respectabl­e, mais cela traduit aussi et surtout une défaillanc­e caractéris­ée dans tout ce qui a rapport à la privation, aux insuffisan­ces et au renoncemen­t. L’usage qui perdure, faute d’éducation sportive, et le sens exacerbé des uns et des autres, surmultipl­iés par le milieu ambiant, ont transformé ce qui n’était qu’un sport, en moyen d’expression des réactions les plus violentes, les plus inconséque­ntes...

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