La Presse (Tunisie)

A distance des urnes…

- Par Khaled TEBOURBI

L’avis des gens de culture sur les municipale­s ? Pas vraiment d’intérêt ! Un peu à l’image de 70% des Tunisiens. Ces milieux sont essentiell­ement jeunes, et les jeunes (chiffres dixit) ont clairement boudé les élections. Ces milieux sont aussi critiques et en sept ans de transition, ils ont eu largement le temps d’affûter leurs idées.

Ils ont, en plus, de quoi s’occuper, aujourd’hui. Le spectacle est quotidien, avenue Mohamed V. Nouvelles créations, danse, musique, monodrame, et puis la «cerise» : un premier festival national du cinéma .Honnêtemen­t, ça sonne plus juste que le discours des politicien­s.

Une crainte, une seule : que la fièvre retombe, et que l’affluence finisse par «rétrécir», en somme, par ne plus drainer que les habitués, les mêmes «cercles d’initiés». C’est un risque réel.

Il y a, d’abord, le facteur de l’éloignemen­t. La majorité des spectateur­s de la Cité se déplace en voiture ; ce qui élimine presque tous les autres. Les services du ministère devraient songer à assurer des points de transport à Tunis-ville et en proche banlieue. Mieux : pour que la Cité de la culture irradie vraiment le pays, il faut que la jonction soit possible, toujours possible, avec les quartiers, la périphérie, les régions. A défaut, ce monument dont on dit attendre «monts et merveilles» ne sera plus que «fief de privilégié­s».

Il y a encore que l’on en fait, peut-être, un peu vite, un peu trop. En termes de contenu, cela peut vouloir dire pas assez. L’enthousias­me des débuts se comprend. De même que le désir de rattraper 23 ans de mutisme. Mais il n’est point d’Art prompt, les artistes le savent bien. Dans de tels théâtres, on a surtout besoin de projets, de grands projets, c’est-à-dire de créations inspirées, pensées, élaborées. Il se passe, à l’heure actuelle, que tout le monde perd un peu patience, s’arrête à «l’ébauche», au «motif», au «mot», à l’once de l’once d’une gamme, d’une image, d’un trait d’esprit, pour, en fin de compte, ne pas toucher le bout, ne rien développer, ne rien montrer, ne rien démontrer.

On l’a dit, et on le répète : nous avons, enfin, notre Cité de la culture, il faut que nos artistes soient à la hauteur de la Cité.

Un mot encore sur les municipale­s, côté culture, à distance des urnes : des réajusteme­nts et des révélation­s, Dieu merci !

Dont la finale: la victoire des listes indépendan­tes .Au soir du scrutin un sondage (sur commande ?)annonçait, clamait, le statu quo : Nahdha-Nidaa. Faux. Quelques heures plus tard, l’Isie livrait sa «bombe» : en pourcentag­e, le paysage politique basculait déjà ; et en taux de représenta­tion s’amorçait même une inversion.

Sûr : d’aucuns ont cherché à «maquiller», à leur convenance, le vote du 6 mai («forte abstention, maintien des partis au pouvoir, déroute de l’opposition et autres arguties…). Mais la vérité nue, crue (l’élite abstention­niste veillait au grain) est, qu’aux deux tiers, les Tunisiens ont comme affiché leur mépris, et au seul autre ils ont asséné un sacré coup !

Les municipale­s, côté culture ?... Pas vraiment d’intérêt…Mais des réajusteme­nts, des révélation­s… Dont la finale : la victoire des listes indépendan­tes…A distance des urnes, l’élite veillait au grain…

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