La Presse (Tunisie)

Une manne pour les commerces et la friperie

Les étalages anarchique­s ont drainé également un grand nombre de badauds à l’affût d’articles et de vêtements bon marché

- Mohsen ZRIBI

Il est communémen­t admis et vérifié que les familles démunies souffrent le martyre à chaque Aïd que Dieu fait. Elles qui, par-dessus le marché, comptent beaucoup de gosses qui ne tolèrent jamais qu’on leur gâche une fête qui est la leur. Mais que faire pour ne pas décevoir ces âmes innocentes? La question revêt une telle importance qu’une petite tournée dans certaines boutiques de la capitale nous a permis de dégager un constat des plus amers, à savoir la hausse des prix qu’affichent les vêtements pour enfants. Jugez-en : un petit pantalon est vendu entre 25 et 40 dinars, contre presque la moitié, l’année dernière. Idem pour les chemises et les paires d’espadrille­s dont les prix ont quasiment triplé ! «Avec ces prix absolument inaccessib­les, les magasins sont devenus réellement inabordabl­es, voire redoutés comme la peste», déplore un père de famille qui évoque «un désarroi et une injustice indignes de notre révolution». Même son de cloche chez une dame qui n’a trouvé mieux que de tirer à boulets rouges sur les tenanciers de ces vitrines qu’elle accuse d’inhumanité et d’enrichisse­ment illicite sur le dos du pauvre citoyen. Pour s’en défendre, un vendeur de vêtements pour enfants reconnaît l’existence d’une hausse, non sans l’imputer à la montée vertigineu­se des coûts de production et des tarifs à la livraison, outre l’augmentati­on des autres taxes.

Vive la... friperie

Si, avant la révolution, les magasins étaient, durant la seconde moitié de chaque mois de Ramadan, généraleme­nt très sollicités, au point qu’on y refusait souvent du monde, il n’en est pas de même pour cette année où ils sont, du moins jusqu’au week-end dernier, presque désespérém­ent vides. C’est que la plupart des familles nécessiteu­ses, heureuseme­nt pas en panne d’idées, ont eu cette trouvaille : la friperie. Celle-ci est justement pour eux une bouée de sauvetage inespérée. Il est vrai que, dans les étals anarchique­s de ce petit commerce parallèle ô combien populaire, on trouve parfois ce qui est introuvabl­e ailleurs. Et à bas prix, SVP. «Avec 30 dinars, à tout casser, j’ai pu m’offrir les habits de l’Aïd pour mes cinq gosses» , jubile un habitant de Raoued qui affirme être un smigard qui éprouve de la peine pour arrondir ses fins de mois. «Moi, je suis un fidèle habitué de la friperie tout au long de l’année et forcément à l’occasion de l’Aïd» , soutient un autre qui précise, en habile calculateu­r, que «l’argent que j’économise par le biais de la friperie est toujours consacré au défoulemen­t de mes progénitur­es à Dahdah et au zoo du Belvédère». Faute donc de ruées sur les magasins de prêt-à-porter, on assiste ces jours-ci à de formidable­s raids quotidiens dans les étals anarchique­s où l’on brave soleil de plomb et bousculade monstre, pourvu qu’on rentre avec les tenues de l’Aïd pour les enfants. Ah, que les temps ont changé!

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