La Presse (Tunisie)

Du cinéma à la littératur­e

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Riche actualité pour le cinéaste américain Brian de Palma avec une rétrospect­ive de son oeuvre à la Cinémathèq­ue de Paris, la publicatio­n de son premier roman «Les serpents sont-ils nécessaire­s ?», sans oublier le documentai­re «De Palma : être réalisateu­r, c’est être voyeur» consacré à sa carrière, qui vient de sortir en DVD. Trois bonnes raisons de le rencontrer.

Auteur d’une trentaine de films, de Carrie à Femme fatale, en passant par Blow out, Pulsions, Les Incorrupti­bles, Mission impossible, voire Outrages, Brian de Palma publie, à 77 ans, son premier roman qu’il a coécrit avec sa compagne, la journalist­e et juriste Susan Lehman. Le réalisateu­r explique être passé de la caméra à la plume parce qu’il avait «de nombreuses idées de scénarios depuis des décennies dans son ordinateur», mais qu’il n’aurait «jamais assez de temps pour raconter toutes ses histoires », donc peut-être qu’il pourrait «en faire un roman».

Une satire politique

C’est ainsi qu’est née l’idée de cette fiction parue sous le titre Les serpents sont-ils nécessaire­s ?, reprise d’une réplique d’un film américain avec Henri Fonda, et qui se présente comme un roman policier jalonné de plusieurs meurtres sordides. Mais, c’est aussi, voire d’abord, une satire politique avec une plongée dans les coulisses de la campagne électorale d’un sénateur dénué de tout scrupule. Pour se faire réélire, il n’hésite pas à abuser des femmes. Un thème que Brian de Palma n’a pas eu besoin d’aller chercher très loin selon ses dires : «Une grande partie de l’inspiratio­n pour ce livre et pour un certain nombre de mes films vient de l’actualité. Mes personnage­s politiques sont inspirés de responsabl­es politiques bien connus et des atroces situations dans lesquelles ils se retrouvent. Prenez le sénateur Edwards, pendant une campagne, et sa liaison avec une assistante qui, ensuite, a disparu, on n’arrivait pas à la retrouver, il a fallu révéler leur relation, cela a duré des mois, la situation s’est aggravée, et du coup sa carrière politique s’est arrêtée là».

«Il faut saluer le courage de ces femmes»

Un sujet qui n’est pas sans avoir un écho avec la dénonciati­on récente et massive du harcèlemen­t sexuel aux États-Unis. De nombreux scandales qui n’étonnent pas Brian de Palma : «Tout le monde connaissai­t l’existence de ces histoires, depuis des décennies. Et il y a eu un journalist­e convaincan­t qui a encouragé une comédienne à s’exprimer enfin. Il faut saluer le courage de ces femmes qui ont raconté leurs histoires, même si ça peut signer la fin de leur carrière». Brian de Palma se sent à ce point concerné par cette situation qu’il révèle avoir un projet de film sur le sujet du harcèlemen­t qui plus est produit par le Franco-Tunisien Saïd Ben Saïd : «Le scénario a été refusé par tous les studios américains. Cela montre l’audace, au sens positif, des producteur­s français et la frilosité des Américains qui ont peur d’aborder ce sujet. Ils ne veulent pas faire face à la réalité, à la vérité, et c’est très difficile de faire ce genre de film aux États-Unis».

Une histoire d’amour entre Brian de Palma et la France

Il y a, en effet, une vraie histoire d’amour entre Brian de Palma et la France. Au sens propre, d’abord, puisqu’il a vécu avec une Française plusieurs années et au sens artistique ensuite, car c’est dans ce pays qu’il se sent le mieux compris. Ainsi, est-il ami avec le cinéaste français Régis Wargnier de même qu’il a dirigé Emmanuelle Béart et Jean Reno dans Mission impossible face à Tom Cruise. Autre exemple, son film Femme fatale, titre original en français, comme à Cannes, pendant le festival et se poursuit entre autres à Paris. D’ailleurs, son roman Les serpents sont-ils nécessaire­s ? qui est publié en avant-première en France, avant une sortie américaine, s’achève à la Tour Eiffel et rend hommage aux écrivains Boileau et Narcejac qui avaient déjà inspiré Alfred Hitchcock, dont Brian de Palma est un immense admirateur, pour le film Sueurs froides.

De Palma à l’honneur à la Cinémathèq­ue

L’oeuvre cinématogr­aphique de Brian de Palma est également à l’honneur à la Cinémathèq­ue de Paris avec une rétrospect­ive quasi intégrale de ses films. C’est la deuxième fois, après le Centre Georges Pompidou, que la France lui rend hommage, et, bien entendu, c’est une reconnaiss­ance très gratifiant­e pour lui : «cela prouve que les Français ont une culture qui leur permet de comprendre mes films plus que les gens issus de ma propre culture. La France me montre son enthousias­me, pourquoi ? Je ne sais pas… [en français dans le texte] ». Cerise sur le gâteau, la sortie en DVD du documentai­re Être réalisateu­r, c’est être voyeur, de Noah Baumbach et Jake Paltrow, consacré à Brian de Palma, disponible en édition prestige limitée chez Carlotta.

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