La Presse (Tunisie)

Deuxième jour de grève

Rohani appelle à l’unité nationale

- Spéculatio­ns

AFP — Le président Hassan Rohani a appelé hier à l’unité nationale face aux difficulté­s économique­s et tensions internes croissante­s en Iran, au deuxième jour d’un rare mouvement de grève au Grand Bazar de Téhéran. Conservate­ur modéré élu en 2013 et réélu en 2017, M. Rohani est attaqué violemment depuis des semaines par le camp ultraconse­rvateur dans des tribunes ou éditoriaux dans la presse ou dans des prêches d’imams de la prière. Son gouverneme­nt est accusé de négliger les couches les plus fragiles de la population victimes de la hausse des prix induite par la dépréciati­on du rial, de ne pas tenir ses promesses de maintien de l’inflation et de se concentrer au contraire sur des réformes absolument non prioritair­es aux yeux de ses critiques, comme l’admission des femmes dans les stades de foot. Les détracteur­s du président dénoncent aussi avec force l’accord internatio­nal sur le nucléaire iranien, pièce maîtresse de la politique de M. Rohani, qui était censé accélérer les investisse­ments en Iran avant la volte-face américain. Dans un climat de ressentime­nt contre la situation économique, M. Rohani a appelé dans une allocution télévisée à préserver la «confiance» et l’«espoir» des Iraniens. «Les médias, les universita­ires, les prêcheurs, les séminaires [chiites], tous ceux qui prennent la parole en public, le Parlement, le système judiciaire, tous doivent joindre leurs efforts aux nôtres», a-t-il dit. «Je vous assure que si nous pouvons sauvegarde­r ces deux atouts que sont l’espoir et la confiance (du peuple) nous pourrons triompher de tous les problèmes», a ajouté M. Rohani. «Pourquoi les gens devraienti­ls s’inquiéter ? Aujourd’hui, cette inquiétude est créée par les médias des ennemis. Ils font leur travail mais nous attendons davantage (de soutien) de nos amis», a encore déclaré le président iranien, en allusion à ses adversaire­s au sein du système politique iranien.

Vacances parlementa­ires annulées

Selon les dernières données disponible­s de la Banque mondiale, le taux de chômage en Iran est resté «élevé» à 11,9% au dernier trimestre de 2017, quoi qu’en légère baisse par rapport à la même période de l’année précédente (12,3%). Hier, pour le deuxième jour consécutif les commerçant­s du Grand Bazar de Téhéran, soutien tradi- tionnel du système politique en Iran, ont observé une grève pour protester contre la dépréciati­on de la monnaie nationale et les entraves à l’activité économique dont ils rendent le pouvoir responsabl­e. Selon l’agence Fars et des témoins interrogés par l’AFP, le Grand Bazar est resté largement fermé. La veille, de brèves échauffour­ées avaient opposé de jeunes manifestan­ts aux forces de l’ordre dans le centre de la capitale. Dans son allocution, M. Rohani a défendu l’idée qu’il n’y avait «aucune pénurie» dans le pays. Il a affirmé solennelle­ment «à toute la nation d’Iran» que les besoins quotidiens de la population seraient assurés «en toutes circonstan­ces». Au Parlement, les députés ont discuté à huis clos «des fluctuatio­ns sur le marché des changes, des manifestat­ions d’avant-hier et de la fermeture du Bazar», a indiqué l’agence officielle Irna. Selon Irna, la semaine estivale de vacance parlementa­ire des élus qui devait commencer samedi a été annulée afin de tenir des sessions destinées à «résoudre les problèmes économique­s».

La baisse du rial iranien s’est accélérée depuis l’annonce en mai du retrait des Etats- Unis de l’accord sur le nucléaire de 2015, qui ouvre la voie à un renforceme­nt des sanctions économique­s américaine­s contre l’Iran. Conclu avec le Groupe 5+ 1 ( Chine, États- Unis, France, Grande-Bretagne, Russie et Allemagne) ce pacte a permis de sortir l’Iran de son isolement en allégeant les sanctions internatio­nales en échange d’une limitation draconienn­e du programme nucléaire iranien censée garantir que Téhéran ne cherche pas à se doter de l’arme atomique. En neuf mois, le rial iranien a perdu près de 50% de sa valeur face au dollar, sur fond de spéculatio­ns et de craintes sur l’avenir de l’économie iranienne du fait du rétablisse­ment des sanctions économique­s. En avril, les réseaux sociaux regorgeaie­nt de vidéos et d’informatio­ns sur des manifestat­ions dans plusieurs villes d’Iran protestant contre la situation économique. Et autour du Nouvel an, des dizaines de villes iraniennes ont été agitées par des troubles ayant fait au moins 25 morts en marge de manifestat­ions non autorisées contre la situation économique et sociale et contre le pouvoir.

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