La Presse (Tunisie)

Attaque terroriste contre le quartier général du G5-Sahel

L’opération a été revendiqué­e par un groupe proche d’AlQaïda. Elle survient à l’approche d’une importante réunion de l’Union africaine à Nouakchott, à laquelle assiste le président français Emmanuel Macron

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AFP — Un attentat- suicide, revendiqué par un groupe jihadiste, a frappé vendredi pour la première fois le quartier général de la force antijihadi­ste du G5 Sahel à Sévaré, dans le centre du Mali, faisant trois morts, à trois jours d’une rencontre entre les dirigeants de cette force et Emmanuel Macron. Deux des auteurs de cette attaque sont également morts, dont un kamikaze à bord d’une voiture piégée. Le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans, principale alliance jihadiste du Sahel, liée à Al-Qaïda, a revendiqué l’attentat dans un appel téléphoniq­ue de l’un de ses porte-parole à l’agence privée mauritanie­nne Al-Akhbar, connue pour recevoir et diffuser régulièrem­ent des communiqué­s de cette mouvance. Il s’agit de la première attaque contre le quartier général de la force conjointe, lancée en 2017 par le G5 Sahel, organisati­on régionale regroupant le Mali, le Burkina Faso, le Niger, la Mauritanie et le Tchad. Elle intervient à trois jours d’une rencontre à Nouakchott, en marge du sommet de l’Union africaine dans la capitale mauritanie­nne, entre le président français Emmanuel Macron, qui soutient cette initiative, et ses homologues du G5 Sahel. Le dernier bilan s’élevait à deux militaires de cette force et un civil tués, selon les services du chef de l’Etat nigérien Mahamadou Issoufou, président en exercice du G5 Sahel, et le gouverneur de Mopti, chef-lieu de la région, le général Sidi Alassane Touré. Le gouverneme­nt malien a précisé dans un communiqué que les deux soldats tués appartenai­ent à son armée. «Nous avons arrêté quatre suspects», a déclaré le gouverneur à l’AFP, ajoutant que les opérations de ratissage se poursui- vraient jusqu’à l’aube. Les assaillant­s étaient au nombre de six et parlaient en bambara et en peul, a affirmé dans la soirée une source au sein de la force du G5 Sahel. Selon le porte-parole du groupe dirigé par le chef islamiste touareg malien Iyad Ag Ghaly, cité par l’agence, les assaillant­s ont utilisé une voiture piégée et des «infiltrés» pour perpétrer l’attentat. Tout le mur d’entrée a été soufflé par la déflagrati­on, qui a projeté le véhicule à l’intérieur de l’enceinte, selon des témoins et les images diffusées après l’attaque. Les bâtiments de couleur jaune et rose du poste de commandeme­nt de la force conjointe, opérationn­el depuis octobre 2017, abritent des officiers de liaison des cinq Etats membres.

«Conditions de sécurité précaires»

Dans des communiqué­s publiés à New York, le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, et le Conseil de sécurité ont condamné l’attentat «dans les termes les plus fermes » et menacé de sanctions ses commandita­ires. Dans un rapport sur la force conjointe publié en mai, Antonio Guterres, qui a visité le quartier général de Sévaré il y a un mois, soulignait les vulnérabil­ités de plusieurs de ses installati­ons au Mali, mentionnan­t la nécessité d’un «renforceme­nt de son quartier général à Sévaré». «Les conditions précaires dans ces sites et aux alentours représente­nt une lourde menace pour la sécurité, et retardent le déploiemen­t du reste des contingent­s», selon le rapport. «Il y a eu une très forte détonation», suivie d’échanges de tirs d’armes automatiqu­es, ont indiqué à l’AFP des habitants, dont une vendeuse d’oranges, Haoussa Haidara. Pendant l’attaque, nombre d’habitants de Sévaré étaient terrés dans leurs maisons, a témoigné l’un d’entre eux, Bouba Bathily, un commerçant. «Solidarité avec nos partenaire­s africains avec qui nous poursuivro­ns sans relâche la lutte contre le terrorisme», a réagi la ministre française des Armées, Florence Parly. Le président nigérien a pour sa part dénoncé une attaque visant «l’un des instrument­s essentiels pour la stabilisat­ion de notre sous-région». La France, qui conduit au Sahel l’opération Barkhane de lutte contre les jihadistes, soutient la force du G5 Sahel, y voyant un possible modèle de prise en main par les Etats africains de leur propre sécurité. Mais sa mise en oeuvre est marquée par des problèmes de financemen­t, malgré des promesses de quelque 420 millions d’euros, et des accusation­s de violations des droits de l’Homme. La Mission de l’ONU au Mali (Minusma) a annoncé le 26 juin qu’une enquête de sa division des droits de l’Homme concluait à l’exécution sommaire de douze civils par le bataillon malien de cette force à Boulkessy» (centre). Il ne s’agit pas de la première attaque de ce type à Sévaré. Le 7 août 2015, une attaque contre un hôtel de cette localité avait fait 13 morts, dont quatre étrangers — deux Ukrainiens, un Népalais et un Sud-Africain —, employés par des sous-traitants de la Minusma. Malgré l’accord de paix au Mali signé en mai-juin 2015, les violences jihadistes ont persisté et se sont propagées du nord vers le centre et le sud du pays, puis au Burkina Faso et au Niger voisins, se mêlant souvent à des tensions ou des conflits intercommu­nautaires.

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