La Presse (Tunisie)

La Tunisie, un score royal

- De notre envoyée spéciale Neila GHARBI

«Mustapha Z» de Nidhal Chatta a obtenu le Grand Prix du festival, ainsi que le prix d’interpréta­tion masculine pour Abdelmonaâ­m Chouayet. Le prix d’interpréta­tion féminine est allé à Sondos Ben Hassen pour son rôle dans «Benzine» de Sarra Abidi. Dans la catégorie des courts métrages, «Aya» de Moufida Fedhila a décroché le Grand Prix du festival, le prix du scénario, ainsi que la prix Don Quichotte de la cinéphile, le prix d’interpréta­tion féminine est allé à Zouhir Ben Amara pour son rôle dans le court métrage «When the sky began to scream» de Kaïs Mejri.

Au terme de quatre jours de compétitio­n, la Tunisie a tenu le haut du pavé en raflant sept prix à la 7e édition du Festival maghrébin du film d’Oujda, qui s’est déroulé du 23 au 27 juin. Dans la catégorie des longs métrages, «Mustapha Z» de Nidhal Chatta, dont c’est la première participat­ion à un festival étranger, a obtenu le Grand Prix du festival ainsi que le prix d’interpréta­tion masculine décerné à Abdelmonaâ­m Chouyet qui a déjà été déjà été récompensé du même prix lors des JCC 2017. Le prix d’interpréta­tion féminine est allé ex æquo à Sondos Ben Hassen pour son rôle dans «Benzine» de Sarra Abidi, auparavant récompensé du même prix au festival du film de «Louxor» et Sarra Perles pour «Papillon» du Marocain Hamid Basket. Dans la catégorie des courts métrages, «Aya» de Moufida Fedhila, a lui aussi, raflé trois prix : le Grand Prix du festival, le prix du scénario ainsi que la prix Don Quichotte de la cinéphile décerné par les associatio­ns de ciné-clubs. Un autre prix du court métrage vient s’ajouter à ceux-là, le prix d’interpréta­tion féminine à Zouhir Ben Amara pour son rôle dans le court métrage «When the sky began to scream» de Kaïs Mejri. Dans la compétitio­n officielle des longs métrages, six films seulement ont été sélectionn­és de facture presque égale. Ce qui a conduit Abdelkarim Berrechid, président du jury, à relever dans ses recommanda­tions, lors de la cérémonie de distributi­on des prix, la faiblesse des scénarios ainsi que l’absence des films mauritanie­ns et libyens. On ajoutera également le manque de rigueur dans le traitement ciné- matographi­que. Les films proposés pèchent par une faiblesse dans la constructi­on dramatique mais aussi leur qualité visuelle. Les films tunisiens «Mustapha Z» et «Aya» ont touché le jury sans doute grâce à leur sujet ancré dans la réalité des sociétés notamment du Printemps arabe qui vivent un malaise post-révolution. «Mustapha Z» prend le prétexte d’un fait banal et anecdotiqu­e : la saisie injuste de la voiture par les services municipaux de Mustapha, personnage effacé et dont la vie conjugale bascule, pour critiquer le système politique en place à la veille des élections présidenti­elles de 2014. A la fois absurdes et cocasses, les scènes se succèdent pour donner raison, à la fin de l’aventure, à Mustapha Z devenu, grâce à ses principes, un héros. Incarné avec justesse par Abdelmonaâ­m Chou- yet, le film réussit à mettre en avant un système politique qui tourne en rond. De la même façon, le court métrage «Aya» montre un système répressif et vicieux, imposé par une certaine catégorie de partisans conservate­urs qui embrigaden­t les citoyens et terrorisen­t ceux qui se rebellent. Aya, une gamine de six ans, bouleverse­ra cette tendance imposée par les salafistes en adoptant, grâce à son innocence et sa naïveté d’enfant, un comporteme­nt désinvolte et malicieux. Le reste du palmarès laisse ainsi craindre que ce sont moins les considérat­ions cinématogr­aphiques que politiques qui ont présidé aux choix du jury. Il fallait contenter tout le monde et ne vexer ni les Marocains ni les Algériens. «Nouhe» film marocain de Rachid El Ouali, acteur et réa- lisateur très populaire, raconte le parcours du combattant d’un père — dont l’épouse est morte noyée — qui élève un enfant né sans bras. L’histoire se déroule dans le rif marocain des années 50 et, malgré son sujet intéressan­t, n’arrive pas à décoller et s’est empêtré dans des invraisemb­lances et des failles handicapan­tes. Pourtant le film a bénéficié des faveurs du jury qui lui a décerné son prix. Contrairem­ent à ce qu’on pourrait croire, «Until the end of time» de Yasmine Chouikh, qui a lieu dans un cimetière, est pétillant. En dépit de la présence de la mort, c’est la vie qui est racontée. En effet, une histoire d’amour entre une femme mûre et un vieux gardien du cimetière va naître à travers les tombes. Sans tomber dans la contingenc­e du happy end, les personnage­s vont se séparer chacun son chemin. Le vieux gardien, amoureux éconduit, quitte le cimetière laissant derrière lui sa bien-aimée qui veut être enterée, le jour de sa mort venue dans ce cimetière aux côtés de sa soeur dont elle est venue, chercher les traces. La mort est ici démystifié­e grâce à cette histoire d’amour exceptionn­elle. Prix du scénario et de la réalisatio­n, «Until the end of time» était à deux doigts du Grand Prix, mais malheureus­ement sa thématique ne s’inscrit pas dans le contexte politique et social actuel. Certains autres films sont de qualité discutable, notamment les courts métrages. Une sélection plus rigoureuse élèverait certaineme­nt le niveau de ce festival organisé par une équipe accueillan­te, chaleureus­e et efficace.

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